« Bon débarras ! » : quand une (petite partie) de la gauche décide de quitter X

© Capture écran X
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« Je viens de faire mon #eXit ! » Ce 20 janvier, jour de l’investiture de Donald Trump, le collectif HelloQuitteX appelle ses adeptes à quitter massivement la plateforme X (anciennement Twitter). Une plateforme devenue, selon eux, « dangereu[se] pour la démocratie ». En cause, Elon Musk, son propriétaire et soutien du 47e président des Etats-Unis, qui instrumentaliserait « l’algorithme à des fins politiques ». « Après le 20 janvier, de facto, Elon Musk n’aura plus de compte à rendre à la justice. X, en tant qu’écosystème numérique, sera alors plus dangereux que jamais pour la santé mentale de ses utilisateurs et pour la démocratie », s’alarment les membres de ce collectif. HelloQuitteX propose donc à ses soutiens une solution informatique afin de faire migrer leur compte X vers une autre plateforme.

Un organisme public derrière le projet anti-Musk ?

Ce projet se retrouve, ce 20 janvier, au cœur d’une polémique. Sur son site internet, on peut ainsi lire que ce « projet [a été] fondé par le CNRS, la Ligue des droits de l’homme, la Quadrature du Net [une association, un temps financée par George Soros, NDLR] » et d’autres organismes. Par ailleurs, une soirée est organisée ce 20 janvier, en partenariat avec une unité du CNRS, autour du projet HelloQuitteX. Auprès de Valeurs actuelles, le CNRS, organisme public donc financé par le contribuable, dément pourtant avoir « fondé » ce collectif. Reste que l’un de ses fondateurs, David Chavalarias, chercheur au CNRS, explique sur X - notons qu’il utilise encore cette plateforme pour répondre à ses détracteurs - : « Il est évident que ce n’est pas la direction du CNRS qui s’engage et valide directement le démarrage de tous projets de recherche Ce sont les chercheurs qui en sont responsable dans la limite de leurs moyens, moyens auxquels le CNRS ne participe que pour partie ». Contacté pour connaitre la réelle participation du CNRS à ce projet, ni le CNRS, ni HelloQuitteX n’ont répondu à nos sollicitations.

Rousseau, Vogel et Le Monde quittent X

Au matin du 20 janvier, le mouvement initié par HelloQuitte X n’est pas aussi massif que prévu. Certaines personnalités de la gauche et de la vie politique annoncent bel et bien la fermeture de leur compte. Sandrine Rousseau, emblématique figure française du réseau social, finit par quitter X après l’avoir annoncé à de multiples reprises. « Ce réseau est devenu un forum d’extrême droite et surtout un outil de sa conquête du pouvoir, dénonce la députée écologiste de Paris. Y rester c’est y contribuer. Partir c’est s’organiser pour construire une alternative ». Yannick Jadot également, après avoir créer un compte à rebours, a annoncé son départ de la plateforme parce qu’il « refuse, dit-il, d’utiliser un réseau social qui est devenu l’instrument d’une propagande massive au service d’une extrême droite, raciste, homophobe, sexisme, climatosceptique ». Mélanie Vogel, sénatrice écologiste des Français établis hors de France, suit le même mouvement. Sur France Info, l’élue explique ne pas vouloir se « rendre complice » des ambitions d’Elon Musk. Face à elle, Stanislas Rigault (Reconquête!), présent sur le plateau, glisse, non sans malice, « bon débarras ! ». Au total, seule une petite vingtaine de députés du NFP avaient annoncé leur départ de X ce 20 janvier. Plus étonnant, Roland Lescure, vice-président de l’Assemblée nationale, s’est également retiré de X, dénonçant « un outil de propagande au service d’un homme et d’une idéologie réactionnaire ». A ces politiques, on peut ajouter une poignée de médias français (La Voix du Nord, Le Monde, Reporterre), quelques journalistes, des institutions (Ecole Polytechnique, ville de Paris, région Grand Est, Gallimard…) et des associations comme Emmaüs, ou encore La Cimade. A noter que certains ont seulement annoncé « suspendre » ou « interrompre », et non quitter.

Même si David Chavalarias se réjouit des retours sur son projet, force est de constater que l’exode ne fait pas l’unanimité à gauche. Marine Tondelier, qui avait pourtant qualifié X de « dangereux » et promettait de quitter la plateforme, a finalement retropédalé. Dans un communiqué, la présidente des Ecologistes se justifie : « Un départ de X n’a de sens que s’il est collectif. […] X reste indispensable à la fonction politique ». L’élue promet néanmoins de publier en priorité sur une plateforme concurrente. Manon Aubry également, assume « préférer mener la bataille frontalement » et refuse donc de fermer son compte X. D’autres, comme Olivier Faure, hésitent, prennent le temps de la réflexion et laissent planer un doute. En réalité, de nombreux élus de gauche, s’ils promettent de privilégier des plateformes concurrentes, ne se résignent pas à supprimer leur compte sur X, fruit de plusieurs années de travail, qui leur offre une visibilité non négligeable. Il faut dire que les mouvements de départ précédents, comme celui initié par Anne Hidalgo en novembre 2023 ou celui qui a suivi la réélection de Donald Trump, n’ont pas eu l’effet escompté.

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Clémence de Longraye
Journaliste à BV

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