Booba interdit de concert au Maroc pour « propos dégradants » envers les femmes

©Arnaud Scherer, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
©Arnaud Scherer, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons

Le rappeur Booba devait se produire le 21 juin à Casablanca. Il n’y chantera pas, la préfecture locale ayant interdit ce concert. Motif invoqué ? Certaines de ses chansons dont les paroles ne mettent pas tout à fait à l’honneur celui des femmes maghrébines en général, marocaines en particulier.

Celles de « Génération assassin », par exemple : « Je vais à la chicha qu’pour les beurettes. Si tu vois l’négro à genoux, c’est qu’j’ai pris haja dans l’appui-tête. J’nique des mères à toute vitesse, ma queue a syndrome de la Tourette. » Du point de vue poétique, nous sommes effectivement assez loin du Perse Omar Khayyam, l’un des plus grands versificateurs d’Orient. Ajoutez-y ces quelques mots, issus d’une autre chanson, « É.L.É.P.H.A.N.T. » – « Carla Bruni joue de la gratte à Sarkozy. Petite Marocaine se tape Berlusconi, Izi » – et c’est la goutte qui fait déborder la bouteille de boulaouane, Izi étant une prostituée marocaine, mineure à l’époque où elle participait aux soirées « bunga bunga » de l’ancien président du Conseil italien, l’inénarrable Silvio Berlusconi.

Résultat des courses ? Le Club des avocats du Maroc porte plainte contre Booba pour « diffamation et injures portées contre les femmes marocaines », tôt suivi par le parti islamiste d’opposition, Justice et Développement. À l’origine de cette campagne ? Le groupe Twitter des Moorish, rassemblant de jeunes Marocains, royalistes et fiers de l’être et dont la proximité avec le pouvoir en place ne serait plus à démontrer, à en croire le journaliste Aboubakr Jamai, interrogé par Le Figaro, ce jeudi 8 juin. Bref, Booba, qui se fait surnommer « le duc de Boulogne », n’aurait pas pesé bien lourd face au roi du Maroc. Le contraire eût été étonnant.

Au-delà de la simple polémique d’ordre plus ou moins artistique, quels sont les véritables enjeux ? Pour Aboubakr Jamai : « Je ne lis pas le boycott de Booba comme du conservatisme religieux. C’est plutôt le miroir d’une atmosphère ultra-patriotique. […] Il existe indéniablement une espèce d’ultra-nationalisme anti-français primaire au Maroc, mais l’annulation de Booba ne rentre pas forcément dans ce cadre. Déjà parce qu’il n’est lui-même pas toujours tendre avec la France… […] Les insultes vis-à-vis des femmes marocaines qui sont reprochées au chanteur ne sont pas glorieuses, mais si l’État a répondu aux campagnes de boycott, c’est qu’il veut surtout se montrer en défenseur de l’honneur du pays et des valeurs nationales. »

On remarquera que ce froid diplomatique franco-marocain est principalement dû aux errances d’un Quai d’Orsay sous influence macronnienne ; laquelle, ayant poussé la France à se rapprocher à la fois du Maroc et de l’Algérie, a fini par nous brouiller durablement avec ces deux pays.

À ce constat, faut-il encore ajouter la traditionnelle inimitié entre Afrique du Nord et Afrique noire, angle mort des professionnels de ce nouvel antiracisme pour lesquels les « racisés » seraient condamnés à se chérir les uns les autre contre les vilains Blancs. Pourtant, l’esclavagisme ne fut pas l’apanage des seuls Européens, tandis qu’il est à mettre au crédit des troupes coloniales françaises d’avoir fermé le dernier marché dédié à la traite négrière, en 1920.

Mais allez expliquer ça à des universitaires dont les seuls livres trônant dans leurs bibliothèques n’ont toujours pas fini d’être coloriés.

Pour tout arranger, Booba - Elie Yaffa de son vrai nom - n’est pas tout à fait un rappeur comme les autres. Juif par sa mère mosellane, Lucie Borsenberger, il est musulman par son père, Seyrou Nourou Yaffa, d’origine sénégalaise. Il chante évidemment la « misère » des cités de Seine-Saint-Denis mais a grandi à Meudon-la-Forêt. Certes, c’est la banlieue, mais pas tout à fait celle de Bobigny. La preuve, d'après sa demi-sœur, il possédait son propre cheval quand il était à peine adolescent.

Bref, rien n’est simple. Quel couscous !

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

7 commentaires

  1. Le Maroc a fermé la porte à ce chanteur de pacotille , et s’il est vénéré en France, c’est que la langue française est ,comme tout , partie en déliquescence , et remercions nos amis marocains de ne point accorder de crédit à ce troubadour des banlieues , et de redorer le blason de notre langue et de ses us et coutumes , mais surtout de la dignité de la personne humaine et tout particulièrement des femmes marocaines , certes , mais également de toutes la gente féminine qui n’a de cesse d’idolâtrer tous ces pseudo chanteurs misogynes .

  2. Une preuve que ces barbares viennent chez nous car ils risquent bien moins d’être arrêtés et mis hors de nuire en France que dans leurs pays d’origine ….

  3. le type même, si bien décrit dans la chanson d’Alain Souchon  » allo maman bobo, maman comment tu m’as fait j’suis pas beau »  » j’suis mal dans ma peau , j’suis mal en ville… etc  » – bref un métissage mal assumé, avec une enfance loin de la misère ! y’en a qui assument bien leur double culture, et d’autres, va savoir pourquoi dérape ( sans jeu de mot !)
    Pour en revenir à la décision du Maroc, ils ont parfaitement le droit de ne pas vouloir écouter des insanités à leur encontre, et la France devrait faire pareil !

  4. Curieux , les Marocains n’ont pas le même sens artistique que nous qui acceptons les pires insanités car c’est soit disant de l’art . Si les Marocains le font pourquoi pas nous ??

  5. C’est vrai que dans ces « pays-là » on peut le faire, mais surtout pas le dire.

  6. Décidément les mots n’ont plus de sens. Il fut appeler un chat un chat. Le Rap n’est pas de la musique ni leur participants des chanteurs.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Un vert manteau de mosquées

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois