Breton, ministre des Finances de Bayrou ? Du nouveau monde à Jurassic Park

©Shutterstock
©Shutterstock

« Pensez printemps », disait un Emmanuel Macron messianique, en 2017, au moment de présenter pour la première fois sa candidature aux suffrages des Français. Cela ne voulait rien dire, mais c’était frais, les gens aimaient bien et le jeune ministre des Finances démissionnaire avait appliqué à la lettre ce précepte des publicitaires dans le sketch éponyme des Inconnus : « Il ne faut jamais prendre les gens pour des cons, mais il ne faut pas oublier qu’ils le sont. » Cela avait bien fonctionné. Deux fois, d’ailleurs, puisque ce théâtre avait remobilisé les gogos en 2022, malgré la détestation (assez justifiée) dont faisait l’objet notre chef de l’Etat.

Le printemps a disparu, et c’est maintenant un automne interminable qui préside aux destinées de la France. On le reconnaît au retour des vieux arbres : voyez François Bayrou. À 73 ans, après avoir à peu près tout raté, à l’exception d’une louable longévité à la tête de la ville de Pau, il a été nommé Premier ministre après avoir piqué une grosse colère et menacé de quitter la majorité avec les élus du MoDem. Cette menace, qui aurait fait rigoler n’importe quel député macronien en 2017, a valeur de coup de tonnerre, en 2024. C’est à ces signes que l’on mesure l’état de décomposition des institutions républicaines.

 

 

Le Béarnais a annoncé une réconciliation, un truc à la Henri IV, qui est, paraît-il, son modèle en politique. Sauf que quand Henri IV se mettait à quatre pattes sur le parquet, c’était pour faire le cheval avec ses petits-enfants et non pour obtenir un portefeuille. Mais qu’importe. Réconcilions, donc. Pour cela, il va falloir un gouvernement d’union nationale et toute cette sorte de choses. Et c’est là que la rumeur qui enfle en ce moment est plutôt cocasse, à défaut d’un meilleur adjectif : le ministre des Finances de Bayrou pourrait être… Thierry Breton ! C’est un poste que l’ancien commissaire européen au Marché intérieur connaît bien, pour l’avoir déjà occupé… il y a dix-neuf ans, de 2005 à 2007. Par la suite, Thierry Breton, jusque-là présenté comme un redresseur d’entreprises sans égal, a joué un rôle important dans la chute du fleuron français Atos, dont il a été l’emblématique PDG. Et puis, donc, il s’est recasé à la Commission européenne, avec la bénédiction d’Emmanuel Macron.

Le retour des vieux copains

Est-ce vraiment une lumineuse idée que de proposer, pour occuper le poste très sensible de Bruno Le Maire (l’homme qui valait 3.000 milliards), un homme qui, à son échelle, a participé à quatre décennies de gabegie financière ? Est-ce vraiment cela, la réconciliation nationale : le retour des vieux copains ? Les Français en ont marre, de l’Union européenne et d’Ursula von der Leyen. Thierry Breton peut toujours jouer sur son inimitié (véritable) pour cette dernière. Il n’est pas certain que ça suffise pour faire passer la pilule.

Décidément, ce double quinquennat, ressenti comme un siècle et qui devait être celui du « nouveau monde », aura surtout permis de recaser les dinosaures du monde politique. On attend Villepin ou Juppé aux Affaires étrangères, Jack Lang à la Culture, Jospin à l’Éducation… Une sorte de tournée « Âge tendre et tête de bois », mais version politique. Une dream team des plus célèbres éléphants depuis 1981. Une nuit des morts-vivants qui n’en finirait pas. Cela va réconcilier ferme, à n’en pas douter. Il n’est pas certain qu’Emmanuel Macron ait pris toute la mesure de sa décision. Ce n’est jamais bon de trancher par faiblesse.

Picture of Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

54 commentaires

  1. Je me permets 2 corrections.
    Ce n’est pas un automne interminable que nous traversons, mais un hiver des plus froid.
    Et quant à trancher par faiblesse, il faut rappeler que Macron a toujours été faible et que s’il a tranché c’est une première en presque 8 ans !

  2. Quand la gangrène est trop avancée il n’y a que 2 solutions : amputer ou laisser mourir. Comme personne n’a la volonté d’amputer laissons mourir. et accélérons le processus. Le phénix peut renaitre de ses cendres. Donc le choix de Thierry BRETON me semble excellent pour terminer notre descente aux enfers. Avec Sandrine ROUSSEAU à l’Éducation Nationale et MELANCHON au Ministère de ‘Immigration, par exemple. Mais

  3. Il était de suite évident que Bayrou ressorte les vieux de la vieille. La raison est fort simple, les vieux et les jeunes ne parlent pas le même langage, en clair ils ne se comprennent pas, ou pas bien. Je le sais, j’ai deux ans de plus que Bayrou. Toutefois ces choix posent un problème, ce sont toujours ceux qui ont fichu la France par terre qui sont rappelés.

  4. Nos politiques nous prouvent tous les jours que contrairement aux travailleurs auxquels on fixe un age légal pour avoir droit à une retraite, cette notion n’a aucun poids, tant le poids des ans glisse sur eux. Changeons la donne, que tous ces dinosaures qui distillent tant de bons conseils pour les autres enfilent, au moins une fois qui la tenue de l’ouvrier, de l’agriculteur, de l’artisan, etc… . Peut être alors sauront ils alors,ce que le besoin d’une retraite veut dire?

    • Allez écouter les prises de paroles des sénateurs et vous comprendrez qu’ils sont à des année lumières du peuple ! …
      Ils votent des lois contre le peuple français et s’en dédouanent allègrement ! …
      L’HISTOIRE DE FRANCE va prouver que ce n’est qu’un éternel recommencement ! …
      « Ca » ne peut pas « tenir » encore longtemps comme ça ! …

  5. J’ai bossé 40 années dans une entreprise où L’équipe du Codir était composée de collaborateurs tous très spécialisés dans leurs domaines d’activité professionnelle . Parfois , une erreur de casting dans cette équipe survenait , on disait alors «  untel est parfait pour tel ou tel poste mais pas pour celui qu’il occupe aujourd’hui «  c’était l’expression d’une lucidité cruelle mais nécessaire pour l’Entreprise . On mesure difficilement les résultats économiques absents , non réalisés par manque de professionnalisme ou par l’absence d’un bon Collaborateur , par contre on sait très bien ce que cela coûte à l’Entreprise d’y laisser un incompétent notoire

  6. Breton ,ben voyons ! Et pourquoi pas « bozo le clown  » pendant que nous y sommes . Hé ben ! ça promet . Je pense que nous avions raison de penser qu’il durerait moins longtemps que Barnier le Bayrou . Le mec , il n’ a pas de gouvernement , Mayotte est pratiquement dévastée par un cyclone ,et il va assister a un conseil municipal à Pau ! ….Il a un drôle de sens des priorités ! ça promet !

  7. Puisque le système politique de notre pays est en pleine décomposition et qu’une majorité de ses représentants est honnie par les Français, on peut finalement voir comme une bonne chose le fait qu’il ne cesse d’accentuer le dégoût toujours plus profond qu’il suscite dans la population. Peut-être finira-t-il par franchir la limite du supportable et provoquera-t-il sa propre chute. Ca en serait alors fini des nominations indignes, des petits accommodements cyniques et des mesurettes encore plus douloureuses qu’inutiles dont le seul but est de permettre à la caste prédatrice de continuer à vivre grassement sur le dos d’un peuple qu’elle vampirise et épuise.

  8. En mettant aux finances un incompétent notoire (Atos) vendu à cette Europe et qui à participé, en son temps, au creusement de la dette, j’ai l’impression que Bayrou que je croyais plus « manoeuvrier » commence à faire un pas vers la motion de censure… De plus, j’apprends qu’il veut conserver sa mairie de Pau (chemin de repli au cas où ? ). On ne peut pas dans le contexte avoir un ministère intérimaire… il commence à pencher du côté où il va tomber.

  9. Et pendant que les pauvres Mahorais essaient de compter leurs morts et découvrent la désolation de leur habitat, Môssieur le premier ministre s’en va présider (en visioconférence) une réunion municipale à Pau !! Cela fait la deuxième fois que ce triste sire se débine devant des responsabilités qui le dépassent. Une fois devant les journalistes, laissant pantois Bruno Retailleau qui, lui, a fait le job et cette fois. De plus il s’apprête à prendre  » un ténor « de la casse industrielle à la tête de Bercy ! Ce qui n’en doutons pas, va faire un beau tandem avec  » le Mozart de la finance  » ! Il parait que c’est dans les vieux chaudrons qu’on fait la meilleure soupe, mais là c’est une tambouille indigeste que nous propose François Bayrou. On frémit en attendant la liste complète des dinosaures qui devraient être à la retraite depuis des lustres. On est en plein « Jurassic Park ».

Laisser un commentaire

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Un vert manteau de mosquées

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois