Brevet des collèges : et si on le transformait en examen d’entrée au lycée ?

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Les épreuves du brevet des collèges, prévues pour les 27 et 28 juin, sont reportées aux 1er et 2 juillet, en France métropolitaine, pour cause de canicule. C'est ce qu'a annoncé Jean-Michel Blanquer lors d'une conférence de presse. En cause, la canicule. Pouvait-il faire autrement alors que, depuis quelques jours, les médias ne parlent que de la chaleur et de ses conséquences ?

Le brevet continue de bénéficier, comme le baccalauréat, d'un fort taux de réussite. En 2018, 88 % l'ont obtenu en série générale, 78,1 % en série professionnelle. Comme d'habitude, toutes séries confondues, les filles réussissent mieux que les garçons. Une inégalité à laquelle les maniaques de l'égalité vont devoir s'attaquer. Peut-être pourrait-on attribuer un bonus aux garçons ? Cela n'aurait rien de scandaleux, tant les modalités d'évaluation du brevet sont déjà laxistes.

Il faut savoir que le décompte des points se fonde sur le niveau de maîtrise du socle commun (ce machin inventé par l'Union européenne), noté sur 400 points, et les épreuves de l'examen terminal, sur 400 points également. Les différentes composantes du socle commun sont évaluées selon une échelle à quatre niveaux : maîtrise insuffisante, maîtrise fragile, maîtrise satisfaisante et très bonne maîtrise. Mais que les élèves se rassurent : ils obtiennent des points, même si les compétences ne sont pas acquises.

Ainsi, pour chaque composante, on bénéficie de 10 points pour le niveau « maîtrise insuffisante », 25 points pour le niveau « maîtrise fragile », contre 40 points pour une « maîtrise satisfaisante » et 50 points pour une « très bonne maîtrise ». Autant dire que beaucoup d'élèves partent avec une certain capital, eussent-ils de mauvaises notes à l'examen, qui comprend quatre épreuves écrites (français, mathématiques, histoire-géographie et enseignement moral et civique, sciences) et une épreuve orale de soutenance (l'Éducation nationale excelle en formules pompeuses).

Que les candidats ne s'inquiètent pas non plus pour ces épreuves : la plupart ne sont déroutés que par la facilité des exercices et l'indulgence des barèmes. Pour le français, il est loin, le temps où on sanctionnait de –4 points une faute de grammaire et de –2 une faute d'usage. C'étaient des pratiques réactionnaires, qui appartiennent au passé ! Quant à l'accent circonflexe ou le tréma, c'est tout juste si on ne vous sanctionne pas quand vous l'utilisez. D'ailleurs, il ne faut pas parler de « faute », ce qui pourrait traumatiser l'élève, mais « d’erreur ».

On se demande donc, à commencer par les élèves, à quoi sert cet examen qu'on obtient si facilement. D'autant plus que si, par malheur, vous échouez, cela ne vous empêche pas de passer en seconde. Le seul intérêt qu'on pourrait y voir, c'est qu'il donne aux élèves une première expérience des conditions d'un examen. La chaleur peut en faire partie : voilà des décennies qu'on distribue de l'eau aux candidats quand la température est excessive.

Le seul moyen de rendre au brevet son utilité et d'inciter les élèves à le préparer sérieusement consisterait à en faire un examen de passage en classe de seconde. Quelle horreur ! s'écrient les gourous de la pédagogie qui n'ont jamais enseigné. Oser parler de sélection ! Assurément, vous devez être un réac, un facho, pire encore ! Le système éducatif est rongé par le préjugé égalitaire. La réussite pour tous est le slogan en vogue - la médiocrité pour tous, devrait-on dire, plus justement.

C'est ainsi qu'on nuit d'abord à ceux qui n'ont que l'école pour s'instruire. Au lieu de reporter les épreuves du brevet, le ministre aurait mieux fait de supprimer carrément un examen qui ne sert à rien, sinon à entretenir une illusion.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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