Bruno Gollnisch : « Je suis très surpris de cet assassinat »

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Spécialiste du Japon et ancien professeur de langue et de civilisation japonaises, l'ancien vice-président du Front national Bruno Gollnisch réagit à l'assassinat de Shinzō Abe, l'ancien chef du gouvernement nippon, survenu ce 8 juillet.

Marc Eynaud. On vient d’apprendre l’assassinat de l’ancien Premier ministre japonais Shinzō Abe. Était-il connu pour des positions polémiques ?

Bruno Gollnisch. Pas particulièrement par rapport aux autres hommes politiques de ce Parti libéral-démocrate qui est au pouvoir presque depuis la fin de la guerre. Il y a eu quelques intermèdes où l’opposition a été majoritaire, mais la plupart des politiciens de ce parti ont des visions assez semblables et patriotiques. Shinzō Abe s'était distingué sur le plan économique avec un plan de relance de l’économie japonaise qui avait eu un certain succès. Comme ancien Premier ministre, il était resté un homme d’influence. En effet, au Japon, ce sont souvent les anciens qui tirent les ficelles derrière le rideau, comme le dit une expression familière japonaise ! Il avait renoncé à sa fonction de Premier ministre et n’était donc plus véritablement un enjeu politique majeur, c’est pourquoi je suis assez surpris de cet assassinat. À l'heure actuelle, nous ignorons les motivations de l’auteur de ce crime qui, semble-t-il, est un ressortissant japonais. A priori, cela ne procède pas d’on ne sait quelle rancœur nationale que pourrait avoir un Coréen ou un terroriste islamiste ou autre.

M. E. Un assassinat politique n’est pas courant, au Japon...

B. G. Avant-guerre, c’était assez fréquent. Il y a eu des cas d’assassinats politiques au Japon. Un ancien Premier ministre japonais avait été assassiné par un nationaliste coréen, lors de l’annexion de la Corée par le Japon, dont il était devenu le proconsul. D’autre part, avant-guerre, des jeunes officiers ultra nationalistes ont assassiné le Premier ministre Inukai. Il y a même eu une tentative de putsch. Mais depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale et l'avènement de la nouvelle Constitution de 1946, il y a eu une violence politique à l’extrême gauche, avec les zengakuren, ou à l’extrême droite, lors de l’assassinat au sabre de l’homme d’État socialiste Asanuma par un militant extrémiste, mais c’est assez rare. Le Japon est aujourd’hui une société assez consensuelle et je ne perçois pas quelles peuvent être les motivations de l’auteur de ce crime.

M. E. Shinzō Abe était-il identifié comme un promoteur de l’occidentalisation du pays ? Peut-être déplaisait-t-il aux éléments plus traditionnels du Japon ?

B. G. Cela pourrait être une motivation de la part de certains éléments radicaux. Mais en cela, il n’est pas plus coupable que les autres personnalités politiques ou Premiers ministres issus du Parti libéral-démocrate qui se sont succédé depuis longtemps. On ne peut pas dire qu’il ait renforcé l’espèce de vassalité, sur le plan international, du Japon par rapport aux États-Unis. Cette situation suscite des protestations, un mouvement voudrait s’émanciper de cette alliance pesante, pour ne pas dire tutelle, américaine. Mais à mon avis, Shinzō Abe n’a pas de responsabilité particulière là-dedans.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

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