[Bruxelles] Face à face, l’Europe des technos et l’Europe de la terre

bruxelles patricia chagnon

Ce jeudi 1er février, à Bruxelles, les dirigeants des pays européens se sont rencontrés pour débattre de la révision du budget de l'Union européenne pour la période 2021-2027. Le rendez-vous s’est déroulé dans l’habituel entre-soi - malgré la présence, sur la proche place du Luxembourg, de plus d’un millier de tracteurs et d’une foule d’agriculteurs venus de France, d’Italie, d’Allemagne, de Hollande, de Belgique. Quel symbole que ces gens de la terre protestant à la porte même de l’Union européenne !

L’eurodéputée RN Patricia Chagnon était parmi les manifestants, ce matin. « J’ai constaté chez eux, explique-t-elle à BV, une grande frustration : celle de ne pas être écoutés. Mais aussi un espoir : ils ne se battent plus seuls dans leur coin. Les divergences nationales existent, mais les agriculteurs ont conscience que la source de leur problème, c’est l’Union européenne. Elle impose la concurrence déloyale des traités de libre-échange, les normes absurdes, la décroissance sous forme d’une réduction de 15 % des terres agricoles. Il y a là un combat commun. » C’est cela, la grande différence avec les manifestations antérieures. L’Union a fait l’union… mais contre elle. « On ne construit pas l’Union en contraignant les peuples, en les soumettant à des décisions contraires à leurs intérêts et qui n’ont jamais été votées par les Parlements nationaux », rappelle l’eurodéputée.

L'eurodéputée Patrica Chagnon avec des agriculteurs aujourd'hui à Bruxelles.

De l’utilité des herses

Ces jours derniers, on a pu voir le bâtiment de l’UE se protéger de herses barbelées. Ces herses qu’on n'a jamais vues aux frontières pour nous protéger des migrants, les responsables de l’UE se les gardaient pour eux - pressentant peut-être qu’un jour, à force d’emm… les Européens, ceux-ci viendraient leur demander des comptes. « Les frontières des Européens sont ouvertes, la concurrence déloyale reste impunie, mais les portes des bureaucrates sont bien fermées et très sécurisées », a tweeté la députée Vox Rocio De Meer.

Aux herses se sont ajoutés les forces de l’ordre et trois hélicoptères. Les agriculteurs ont lancé des fumigènes, incendié des palettes et des pneus, renversé l’une des statues d’un monument à la gloire du sidérurgiste John Cockerill. En milieu de matinée, certains d’entre eux ont tenté de forcer le passage vers le Parlement, ils ont été repoussés par les canons à eau et les gaz lacrymogènes.

L’ordre du jour ? L’Ukraine. Et l’esprit de Jacques Delors

À part Viktor Orbán, qui avait rencontré, mercredi soir, les agriculteurs alors qu’ils positionnaient leur blocus, les dirigeants des pays européens n’ont pas eu un mot pour les manifestants en arrivant à la réunion. Ils n’avaient que « Ukraine » à la bouche. Une position résumée par la présidente du Parlement européen Roberta Metsola qui, après avoir déclaré « Les gens attendent de nous crédibilité, légitimité et anticipation » (oh que oui !), énumérait un ordre du jour à côté de la plaque : l’Ukraine, le Moyen-Orient, la santé, l'énergie et la recherche.

« Cela montre le mépris total de nos dirigeants pour la ruralité, réagit Patricia Chagnon. Ils pensent savoir mieux que les peuples ce qui est bon pour eux. Ils dictent ce qui est bien et ce qui est mal. Ils ne veulent pas admettre que les peuples ont une âme et une volonté. » Un mépris confirmé par un tweet d’Ursula von der Leyen, qu’Emmanuel Macron a rencontrée en amont. Sans un mot pour les agriculteurs, elle y invoquait « la flamme de l’esprit de Jacques Delors ».

Dans une rue non loin du Parlement européen. Source Twitter Patricia Chagnon

Rendez-vous le 9 juin

C’est toute l’ambition de l’Union européenne, une flammèche fumeuse et vacillante qu’on a envie de moucher définitivement ? « Aux élections européennes, plus que jamais, selon Patricia Chagnon, deux visions s’opposeront. Celle des normes, toujours plus de normes et d’UE, ou celle qui desserre l’étau et laisse respirer les États-nations. L’agriculture a une importance économique, stratégique, culturelle, historique : à chaque pays de décider. » Le 9 juin, en voiture, à vélo ou... en tracteur, il s'agit d'aller voter.

Jeudi en fin d’après-midi, Ursula von der Leyen a annoncé que la Commission européenne va travailler à « réduire le fardeau administratif » des agriculteurs, mais aussi à défendre leurs « intérêts légitimes ». Découvrirait-elle la Lune ? L’eau tiède ? Ou n’est-ce qu’un enfumage, histoire de calmer le jeu ? Au même moment, les premiers tracteurs commençaient à quitter la place du Luxembourg. Certains manifestants s’en sont à nouveau pris à la police. Il n’est pas exclu que des tracteurs restent sur place, histoire de rappeler à Mme von der Leyen que les engagements, même superficiels, même vagues, ça se tient.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

33 commentaires

  1. C’est très bien, je ne digère toujours pas l’attitude de la dame Leyen depuis l’affaire de la Covid. Je ne supporte pas non plus plus la veulerie de tous ces chefs d’État qui ferment les yeux devant l’usurpation d’autorité de cette commission de Bruxelles. Il faut changer complètement l’organisation de cette Europe qui petit à petit est devenue le jouet des affairistes de tout bord. Il est pitoyable ce Macron qui fait semblant d’avoir de l’importance alors qu’il a refilé la France à ces charognards. Non les peuples ne seront pas « en même temps » Ils se battront pour rester eux-mêmes.

  2. La France n’est plus gouvernée, nous n’avons plus de président digne de ce nom, depuis longtemps ils ne font que transposer les diktats de Bruxelles, en rajoutant une couche de contraintes (voir pour le glyphosate, mais pas que). La preuve que c’est Bruxelles qui dirige la France, dès qu’un problème se fait jour, macron va voir Von Der Leyen pour savoir ce qu’il doit faire, comme à l’école maternelle, quand on levait le doigt, pour avoir l’autorisation d’aller faire pipi. Pauvre France!

  3. Je ne suis pas un brillant économiste et j’ai plutôt été poursuivi par mes études auxquelles j’ai essayé d’échapper du mieux que j’ai pu, mais ça n’empêche pas de se poser des questions : Jadis, en terme de commerce, on allait se procurer à l’extérieur ce que généralement on ne possédait pas ou ne produisait pas chez soi. C’est ainsi que de courageux navigateurs se sont lancés sur les Océans encore mal connus pour aller se procurer par exemple les précieuses épices. En échange, on leur apportait nos produits manufacturés. Aujourd’hui, on passe des accords commerciaux, toujours pour se procurer des matières premières qui nous manquent, mais en échange, au lieu de leur fournir ce qu’ils ne produisent pas eux mêmes, on importe des produits dont on a pas besoin parce qu’on les produit mieux chez nous. J’avoue qu’il y a là une logique qui m’échappe…

  4. Des années qu’ils oppressent les agriculteurs et tout à coup des louanges… le discours est faux.

  5. un technocrate ça tourne avec un agenda , pas question que la plebe viennent y mettre son grain de sable … ..qui pourrait bien gripper cette machine aussi obése qu’inutile apparemment pour le peuple

  6. Les bâtiments de l’UE sont transformés en bunkers.
    Que les élus européens et surtout leur germanique présidente non élue Von der Leyen, rouvrent les livres d’histoire relativement récente…
    Depuis la Normadie et jusqu’à Berlin les bunkers n’ont pas résisté contre les peuples assoiffés de liberté.

  7. Les dirigeants feignent de n’avoir pas été au courant du problème des agriculteurs !
    Ils nous prennent vraiment pour des andouilles

    • Ouuuh ! Toujours en colère… j’aime ça !
      Et puis, mêler les herses avec barbelés et l’esprit de Jacques Delors, je trouve que c’est un peu fort de café, n’est – ce – pas ?

  8. nous avons une Europe complètement pourrie, tant qu’on ne fera pas le ménage pour que les états européens retrouvent leur liberté ça n’ira pas ! j’espère qu’aux mos de juin , on balaiera une grande partie de ces européistes pour que les états retrouvent la liberté de leurs lois chez eux !!

  9. Le monde de la paysannerie au sens noble du terme aux portes de l’Europe. Effectivement un symbole de courage, de ras le bol de cette dictature technocratique des petits hommes en gris et verts. Cette armée d’agriculteurs sur leur tracteurs à dû faire trembler tous ces pantins en costumes qui se gavent sur le dos des nations. Cette Europe de Macron on n’en veut plus. Nous sommes un pays de France et non une fédération. Des rois ont maintenu la France et Macron n’est pas un roi il n’y a que lui qui le croit. Il nous gave avec son Europe dont il se verrait bien président. Il n’en a rien à faire de la France.

    • Macron n’est pas un roi il n’y a que lui qui le croit. Il nous gave avec son Europe dont il se verrait bien président. Il n’en a rien à faire de la France.

      Entièrement d’accord avec vous! Mais attendons les résultats des votes de juin pour commencer et surtout de 2027. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises, mais peut-étre pas dans le sens que nous espérons ! Beaucoup de naturalisations pendant ces 3 années, donc résultat …. !

  10. Ils doivent déjà plancher sur la façon de détourner le résultat du vote qui ne fait plus guère de doute
    2005 2024 ?!

  11. ‘ l’Europe des technos…’ ? C’est bien pire : les technos ne sont que les exécutants des Commissionnaires eux mêmes obéissants aux lobbys dans l’ombre. Les conflits d’intérêts d’Ursula sont un bel exemple. Le 9 juin on vidange !

  12. L’artillerie lourde pour les paysans , celle qu’on a oublié d’utiliser pour les racailles qui ont tout cassé dans ce pays . On voit bien là la préférence de ces élus , oui tous aux urnes , sans exeption . Quand aux forces de l’ordre qui affirmaient soutenir les agriculteurs elles m’ont déçues . Quand elles se font massacrer par les voyous , que ni les élus , ni les juges ne les défendent le peuple s’appitoyaient sur leur sort , pour ma part terminé . Comme pour les gilets jaunes elles ont choisi leur camp et ce n’est pas celui du peuple .

  13. On ne peut se contenter de petites mesures, les grandes règles doivent changer. Que les agriculteurs aient le plus grand taux de suicide et vivent, pour beaucoup, largement sous le seuil de pauvreté est inacceptable, indigne d’un pays qui prétend être une grande économie. Il y a donc deux volets : le prix payé des produits bruts, qui doit être parfaitement décent. Le Smic en résultat net doit être peut-être le strict minimum. Les paysans veulent vivre de leur métier, et pas de subventions. Ces subventions, les aides de l’UE : il y a les grosses fermes et les petites. Souvent ces aides sont captées par les grosses unités, ce qui est très anormal. C’est trop souvent le partage de l’œuf: à moi le jaune et blanc, à toi la coquille. Mais l’UE et le gouvernement préfèreraient l’horreur industrielle, dix fermes à mille vaches. Les Français préfèrent mille fermes à dix vaches. Ces dernières doivent pouvoir vivre. Macron cause, mais il ne fait que ça : son discours est flou (sur l’Ukraine, c’est typique) il ne s’engage en rien, il essaie de tenir jusqu’aux Européennes, alors qu’il n’a rien fait ces sept dernières années, quand en plus « son » Renew vote toutes les lois maléfiques à Bruxelles et qu’il protège M. Canfin. Et, comble de l’humiliation pour notre pays, il « demande » à Van der Leyen si elle « veut bien » accorder des modifications. La France mendie, toute dignité abolie. Mais l’Europe agricole n’est pas contente, les belles paroles ne suffiront plus. Les Français s’en rendent compte.

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