Budget de la Défense : les militaires ne descendent dans la rue que le 14 juillet !

Entendre s’exprimer, chez Jean-Jacques Bourdin, M. Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, sur la coupe sèche de 850 millions d’euros dans le budget de la Défense pourrait prêter à sourire si le sujet n’était pas grave. "Sur certaines lignes du ministère des Armées, il y a possibilité de décaler non pas des salaires, non pas la sécurité, non pas les militaires eux-mêmes, mais de décaler quelques commandes, sur du gros matériel par exemple, et c’est pour ça que nous avons identifié ces 850 millions."

Les militaires seront évidemment ravis d’apprendre que l’on ne va pas "décaler leurs salaires", encore moins eux-mêmes ! C’est donc presque une bonne nouvelle quand on sait que le service de la paie, réformé sous Sarkozy, a créé des dysfonctionnements, comme on dit pudiquement, durant des années et qui ont eu pour principale conséquence, justement, des retards sans précédent dans le paiement des soldes.

Quant aux Français, ils seront enchantés d’apprendre que l’on ne va pas décaler non plus leur sécurité…

Là où l’on frise la désinvolture, c’est lorsque l’homme à la barbe de trois jours évoque le décalage de "quelques commandes, sur du gros matériel par exemple". Comme si, finalement, le gros matériel, c’était un peu comme des gros jouets pour ces enfants gâtés que seraient les militaires. Quels sont, du reste, ces "gros matériels" pour celui qui n’a commandé jusqu’à présent qu’une armée d’employés municipaux dans sa commune de Forcalquier – ville, soit dit en passant, qui connaît un endettement de 1.500 euros par habitant, contre 600 euros en moyenne pour les villes de la même strate. Mais nous nous éloignons. Quoique… Quels sont ces matériels, disais-je, dont on va décaler la livraison ? Est-ce, par exemple, ces véhicules blindés multi-rôles (VBMR) qui doivent remplacer le véhicule de l’avant blindé (VAB), un engin qui a le double d’âge des jeunes soldats qui risquent leur vie à son bord pour assurer la sécurité de notre pays et, accessoirement, de l’Union européenne qui nous impose de passer sous les fourches caudines du 3 % de déficit, raison de cette coupe sèche ? On ne sait pour l'instant.

"Tous les ministères y contribuent", explique Christophe Castaner, pour trouver ces 4,5 milliards d’euros. Ainsi, les armées vont supporter presque 19 % de cette purge, alors que le poids du ministère des Armées n’est que de 13 % dans le budget de l’État. Cherchez l’erreur…

Autant dire que toutes les autres explications du porte-parole ne sont là que pour faire passer la pilule. Le Président "aura l’occasion de s’exprimer sur sa priorité qui est de faire en sorte que le budget des armées pendant cette mandature soit en forte augmentation"... Tout est dit : "faire en sorte que"

Pour ceux qui pourraient être déboussolés par cette fameuse « autre façon de faire de la politique », si chère aux affidés d’Emmanuel Macron, qu'ils soient tout à fait rassurés. Le gouvernement Macron va faire comme font tous les gouvernements, de gauche ou de droite, depuis trente ans : se servir de la Défense comme d’une variable d’ajustement du budget de l'État. Et le 2 % du PIB pour la Défense, promis pour 2025 par le candidat Macron – ce qui signifiait déjà un déclassement de notre outil de défense –, sera sans doute repoussé aux calendes grecques.

Le général de Villiers, chef d’état-major des armées, a déclaré mercredi devant les membres de la commission de la Défense de l’Assemblée nationale : "Je ne vais pas me faire b… comme ça." Cela me rappelle ce que disait l'un de mes chefs lorsque j’étais jeune lieutenant : "Il vaut mieux b… toujours les mêmes ; ça fait moins de mécontents." Vu comme ça ! Il est vrai que les militaires ne descendent dans la rue que le 14 juillet...

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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