Buzyn Agnès : atteinte au moral d’une nation en guerre
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La guerre dans laquelle nous sommes entrés est sanitaire mais elle est aussi psychologique. Et, il faut bien le reconnaître, ça démarre très mal. Avec l’interview pleurnicharde d’Agnès Buzyn dans le confessionnal confiné du Monde, on se dit qu’avec des « amis » comme ça, on n’a pas besoin d’ennemi. Outre le scandale d’État qui se profile et ses éventuelles conséquences judiciaires - si l’on croit encore un peu au principe de responsabilité -, les aveux de l’ancien ministre de la Santé - en gros, je savais et je l’ai dit au Président et au Premier ministre, qu’on allait à la catastrophe - s’apparentent ni plus ni moins à une atteinte au moral de la nation.
Cette femme à qui, il y a encore quelques mois, certains chroniqueurs avisés prêtaient un brillant avenir politique montre qu’elle était tout autant faite pour cela que Gérard Larcher pour être danseur étoile à l’opéra. Ce qu’a dit Agnès Buzyn est vrai ou faux, mal exprimé ou mal compris, peu importe, en fait, dans l’immédiat : on réglera les comptes après la guerre. Cela a été dit dans un entretien écrit et non pas balancé à la va-vite dans une interview en direct. « Quod scripsi, scripsi », disait Ponce Pilate. Et, sans doute, il va s’en trouver, des Ponce Pilate, pour se laver, plus qu’à leur tour, leurs blanches mains au gel hydroalcoolique qui ne devrait pas manquer dans leur armoire à pharmacie !
Pas besoin d’avoir lu Machiavel pour comprendre qu’un vrai politique n’aurait jamais lancé une telle bombe au moment même où toute la classe politique, et d’abord ceux qui sont aux commandes, doivent montrer une parfaite cohésion face à l’adversité. Au moment où la nation s'enterre dans une guerre - le mot du Président prononcé cinq fois ! - de position. Comment les petits soldats que nous sommes, barricadés dans notre tranchée domestique, peuvent-ils encore avoir confiance dans ce généralissime de quarante ans qui nous parle à la télé depuis son bunker aseptisé, si l’on sait qu’il est entouré de généraux de cette étoffe ? Aussi émotifs ? De tels bras cassés, entend-on de plus en plus. Pas certain : car faut-il encore avoir des bras ! « Ils ont les mains propres mais ils n’ont pas de mains », disait Péguy. Mme Buzyn nous a fait sa petite thérapie sur le divan du Monde, histoire de traiter sa petite dépression post-déculottée : « Ça ressemble fort à un syndrome post-électoral », aurait confié un ministre, selon L’Express. Je vais dire un truc qui va peut-être choquer les bonnes âmes prêtes à compatir aux douleurs étalées sur papier glacé : là, aujourd’hui, dans ma tranchée, je m’en fous un peu, pour ne pas dire plus, des larmes de Mme Buzyn. Et très certainement, c’est le cas de millions de Français.
Ce qui est terrible, c’est que Mme Buzyn est forcément, nécessairement, une personne très intelligente. Bête de concours depuis toute petite, probablement (à l’heure où j’écris ces lignes, je n’ai même pas envie d’aller vérifier !), elle a tenu des fonctions de haute responsabilité. Oui, peut-être, mais l’intelligence de situation ? Ce n’est pas la première fois de son histoire que la France est gouvernée par des bras cassés. Mais en général, ils avaient au moins l’intelligence de la fermer, histoire de ne pas en rajouter et de ne pas plomber le moral du peuple et de la troupe.
En 1957, Maurice Bourgès-Maunoury, ministre de la Défense nationale, avait saisi la Justice militaire d’un ordre d’informer concernant Jean-Jacques Servan-Schreiber à cause d’articles écrits dans son journal L’Express sur la situation en Algérie, et ce, afin de calmer l’émotion que cela avait soulevé dans les rangs de l’armée. Le motif ? « Atteinte au moral de l’armée ». Les temps ont bien changé, évidemment, et il serait bien étonnant que les bras cassés se tirent une balle dans le pied.
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