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Pour de nombreuses personnes aujourd’hui, le sport est devenu une religion. Elle tire sur le païen, avec des idoles, mises en situation d’être adulées par une plèbe que l’on gave de ces jeux, le pain ne faisant pas vraiment défaut dans nos contrées. Les zélateurs de Mamon organisent et exploitent ce culte et empochent une substantielle rétribution au passage. La puissance publique est heureuse de l’aubaine : tant qu’il regarde le sport, le peuple ne regarde pas dans d’autres directions qui fâcheraient peut-être.

Les sportifs, dont on oublierait presque que ce ne sont que des hommes et des femmes avec des affects, des convictions, des pensées, sont instrumentalisés par cette collusion des affaires et de la propagande. Les enjeux dépassent ces jeunes, qui consacrent tant d’énergie à devenir d’admirables champions qu’ils en oublient de réfléchir. Et parfois, il y a une anomalie : un sportif de talent qui ne se laisse pas déposséder de toute sa liberté et qui fait usage des neurones qu’il n’a pas grillés à l’entraînement.

Le talentueux All Blacks Sonny Bill Williams a décidé de faire usage de cette liberté. C’est lui qui avait donné sa médaille de champion du monde 2015 à un gamin admiratif sèchement plaqué par un stadiste. Il est musulman, joue pour les Auckland Blues et il a obtenu que son maillot n’affiche pas le nom de la Banque de Nouvelle-Zélande, sponsor du club. De même, il refuserait de porter un maillot faisant de la promotion pour de l’alcool ou du jeu. Il est, en cela, cohérent avec les prescriptions de l’islam. Mais il est aussi en position d’imposer cette clause de conscience dans le contrat qui le lie à son employeur, parce qu’il a fait la preuve de son talent (double champion du monde, pour ne citer que ça). Est-ce alors un caprice de riche, ceux qui n’ont pas ce palmarès n’en ayant pas la possibilité ?

Ceux qui auront vu le film Les Chariots de feu se souviendront d’un autre rugbyman et surtout coureur, Eric Liddell, qui, en 1924, aux Jeux olympiques de Paris, refusait de courir une finale du 100 mètres parce qu’elle avait lieu le dimanche et que ses convictions de presbytérien lui interdisaient d’y participer. Il a pu s’imposer sur 400 mètres. L’objection de conscience, ce n’est pas neuf et ça permet de ne pas complètement désespérer du monde du sport et de ce qu’il fait des sportifs.

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