Cathédrale de Paris : le nouveau reliquaire de la Ste Couronne laisse perplexe

reliquaire couronne d'épine
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On hésite : est-ce le gong d’un temple bouddhiste ? La cible géante d’un jeu de fléchettes, peut-être ? Non, c’est le nouveau reliquaire qui va recevoir la Sainte Couronne d’épines dans la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Révélée au public, cette œuvre de l’architecte Sylvain Dubuisson laisse pour le moins perplexe… surtout quand on a connu celle qui l’a précédée : la magnifique châsse reliquaire dessinée par Viollet-le-Duc, hélas brisée dans l’opération de sauvetage au soir de l’incendie. Le nouveau reliquaire obéit sans aucun doute à ce nouveau mot d’ordre : la cathédrale de Paris doit se dépouiller de toute grandeur et prendre des allures de cellule monacale.

Dans cette optique, c’est déjà le projet du designer Guillaume Bardet qui a été retenu pour le nouveau mobilier liturgique – autel, cathèdre, tabernacle, baptistère… Il est d’une « noble simplicité », a dit le jury. Le qualificatif d’« épouvantable austérité » conviendrait mieux : tout de bois sombre, arêtes aiguës et lignes épurées à l’extrême, on hésite entre design écolo et musée des arts et traditions populaires.

Tout en fausse modestie

Ainsi, l’évêque et son acolyte devront s'asseoir dans un meuble qui ressemble plus à un pétrin qu’à un fauteuil ; quant au tabernacle – Dieu me pardonne – , ce n’est rien d’autre que la boîte à sel de ma grand-mère ! « Les pièces doivent embrasser le passé, vivre le présent et accueillir le futur< », a dit l’artiste. Pourtant, l’Église nouvelle doit se montrer modeste. « Elles doivent avoir une forme d’évidence pour les catholiques et être remarquables pour les non-chrétiens. Elles doivent exister pendant et hors la liturgie : sans crier, mais sans se cacher non plus. Être une présence évidente. » Passe-partout, en somme ; pas plus ostentatoires qu’un banc public.

Et donc, pour accueillir la suprême relique qu’est la Sainte Couronne d’épines, c’est la même philosophie qui prévaut, loin des ors et des pierreries dans lesquels elle fut enchâssée depuis 1236.

Au printemps 2023, Sylvain Buisson dévoilait un coin de son projet pour ktotv.com. Il confiait que Mgr Lustiger lui avait déjà, dans le passé, demandé de réfléchir à un nouvel écrin pour la relique, mais l’idée avait été abandonnée. C’est l’incendie qui en a relancé la nécessité. « Le fait que la couronne ait été gardée à Constantinople, achetée par Saint Louis, nous a inspirés pour faire un clin d’œil au monde orthodoxe en disposant donc la relique elle-même au sein d’un grand iconostase en bois de cèdre, dit-il. Le bois de cèdre, c’est le bois même de la relique de la croix qui est conservée à Notre-Dame. »

Pas de majesté, de la « majestuosité »

Mais c’est sa collaboratrice Tiphaine Mer qui en parle le mieux, si l’on ose dire : « Ça va être une hauteur assez haute pour qu’il y ait une certaine hauteur et prestige de l’objet. La couronne d’épines, par rapport à la châsse reliquaire qu’on est en train de dessiner, on l’a vue au centre du dispositif. Elle est, comme l’a déjà dit Sylvain, un peu plus haute que le regard et nos propres têtes pour montrer sa majestuosité, au centre. Et on l’aimerait, on la souhaiterait légèrement penchée pour simuler le fait qu’elle est sur la tête du Christ au sein du dispositif. » Dont acte.

Sylvain Dubuisson a, nous dit-on, « voulu donner une approche unique et personnelle à cette œuvre ». Alors, comment dire, cher monsieur : on se fout de votre approche personnelle ; la Couronne d’épines vous dépasse, dans le temps, dans l’espace, dans l’histoire de l’humanité et dans celle de l’Église. Vous deviez être à son service et non pas elle au vôtre. Votre œuvre sans grandeur, sans spiritualité, n’incite certes pas à l’élévation de l’âme. Mais en cela, hélas, vous avez sans doute rempli la mission qui vous était confiée.

 

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Totalement en accord avec la conclusion de la rédactrice. J’en tire également la conclusion que les autorités religieuses sont soumises, ce qui au demeurant ne m’étonne plus.
    Il serait intéressant également que Boulevard Voltaire fasse le point sur la question des vitraux, car il semble que le pseudo-président veuille imposer ses vues.

  2. Je verrais peut-être cette œuvre dans une église moderne, mais je ne la trouve pas belle ni respectueuse pour le trésor qu’elle est chargée de mettre en valeur. Elle détonne et détourne l’attention de la Couronne d’épines qu’elle rend ridiculement petite et apparemment insignifiante. L’auteur ne doit pas avoir la foi ni saisir le passé et le sacré de cette unique relique, qu’il présente platement dans un cannage style Ikea, sans mystère ni âme

  3. Ça rappelle l’actualité qui nous montre qu’on ne peux enfermer tout les déséquilibrés où alors Il faudrait des bâtiments d’immenses dimensions.

  4. Donc, un architecte qui veut laisser son empreinte dans l’histoire, il est bien prétentieux, mais son « œuvre » ne fait pas du tout vibrer, il n’y a rien de spirituel. J’ai cru que c’était un gong. Décidément, ce reliquaire ne reflète ni le vrai, ni la beauté car rien n’est vrai que le beau. En effet, Madame Delarue, elle est sans grandeur, sans spiritualité, aucun Souffle et n’incite pas du tout à l’élévation d’âme.

  5. Sur le plan de l’interprétation symbolique, on y est peut-être (quoique !!) mais au niveau du résultat, de la beauté de l’œuvre artistique, on est franchement en droit d’en douter ! Là, ils ont carrément visé dans le mile de l’horreur !

  6. putain! 2000ans de civilisation. » être remarquables pour les non-chrétiens. » si les non chrétiens viennent voir autre chose que la couronne ; c’est raté.

  7. Je ne sais pas si la hauteur est assez haute pour donner une belle « majestuosité », mais ce… truc ressemble furieusement à un jeu de fléchettes ! Notre Dame nous dépasse, nous invite à l’humilité, au respect envers les bâtisseurs originels et les croyants du monde entier pour lesquels elle représente « La cathédrale ». Alors, pour les délires progressistes d’artistes en vogue, non merci.

  8. Bravo pour le commentaire si juste.
    L' »artiste »avait déjà été approché par Lustiger, tout s’explique !

  9. Avec quelques ronds en plus et des numéros on pourrait jouer aux fléchettes sur ce truc horrible . De quel droit Macron laisse faire ces horreurs qui sabotent ce bel édifice . Le patrimoine ne lui appartient pas , les dons suffisent pour la rénovation et les français veulent que tout soit refait à l’identique . En tant que donateurs mécontents peut on exiger le remboursement de ses dons ?

  10. Ah, mais avec ulrich il faut s’attendre à tout. Encore un pour qui une enquête s’impose, ulrich, le président des riches !

  11. Au soir de la disparition de la « macronie », il faudra aller faire disparaître AUSSI toutes les traces de ces ignominies ! …

    • « Donner une approche unique et personnelle » à l’œuvre est simplement synonyme d’ être à son service avec un « service personnalisé ». Vous semblez croire que cette expression est pour magnifier le serviteur ( qui aurait une vision unique, extraordinaire), mais ne voulait elle pas simplement rendre hommage à l’œuvre, extraordinaire, à servir ?
      Si oui, ce serait de la part de Mme Delarue une accusation abusive d’orgueil.

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