Anniversaire : le massacre de la rue d’Isly toujours occulté
Douze minutes d’horreur oubliées par la France. Le 26 mars 1962, huit jours après les accords d’Évian qui signent la fin de l’Algérie française, des militaires français ouvrent le feu sur des Français rassemblés pacifiquement contre le blocus du quartier de Bab El Oued (Alger), en état de siège depuis trois jours. Le bilan de cet épisode sanglant ne sera jamais véritablement chiffré. Soixante-deux ans après, la mémoire de cette terrible journée reste douloureuse.
Jusqu’à 80 morts
« La fusillade de la rue d’Isly intervient dans un contexte particulier, une semaine après les accords d’Évian. » Auprès de BV, Olivier Dard, historien et auteur de Voyage au cœur de l’OAS (Perrin), revient sur les événements du 26 mars 1962 à Alger. Quelques jours après la mise en place du blocus autour du quartier de Bab El Oued, un tract circule entre les Européens. Il appelle à « un rassemblement pacifique, sans arme, drapeau en tête » pour venir en aide aux habitants de ce quartier, laissés sans nourriture et sans médicaments. Le 26 mars en début d’après-midi, malgré l’interdiction de manifester, la foule franchit plusieurs barrages et converge vers le quartier bloqué. « C’est alors que les manifestants arrivent rue d’Isly où se déroule la fusillade », résume Olivier Dard. Un tir part. S’ensuivent, pendant de longues minutes, des rafales et des coups de feu. La foule hurle et se jette à terre. Couvertes par le bruit des balles, des voix crient « halte au feu ! » En vain. Pendant douze minutes, les balles s’abattent sur une foule non armée. « C’était un véritable carnage », commente l’historien. Le bilan précis ne sera jamais communiqué : 54 morts, 147 blessés, avancent les autorités, se limitant aux premières estimations. Les parties civiles comptent jusqu’à 80 morts et 200 blessés.
« Il y a certes une responsabilité de l’OAS, qui n’a pas imaginé que cette manifestation interdite pourrait entraîner une répression aussi féroce », commence Olivier Dard. Mais l’historien pointe surtout du doigt « la violence de la répression ». « Les autorités ne voulaient pas céder, le dispositif de maintien de l’ordre était mal pensé et les tirailleurs peu expérimentés », énumère-t-il. Le soir même, le général de Gaulle fait une allocution appelant la population à soutenir l’autodétermination de l’Algérie. Il ne prononce pas un mot sur le massacre de la rue d’Isly. « Les autorités considèrent certes que c’est une tragédie, mais que cette fusillade a permis une "décharge d’électricité". Après ça, les Européens sont traumatisés », rappelle Olivier Dard. Après le « choc du 26 mars », les Français d’Algérie commencent à faire leurs valises. Les survivants, avec découragement et dégoût, quittent l’Algérie la « rage au cœur », résume l’historien. « Ce lundi 26 mars acheva l’Algérie française », écrira, trente-ans plus tard, Jean-Pax Méfret, dans Le Figaro Magazine.
Une mémoire douloureuse
Mais après le départ, restent les questions. « Pourquoi l’armée française a-t-elle tiré sur la foule pacifique ? Pourquoi le docteur Jean Massonat, qui portait secours aux victimes, a-t-il été abattu par un tir dans le dos ? » s’interroge encore Valérie Boyer, sénatrice Les Républicains, fille d’un pied-noir présent à cette manifestation. L’élue, à l’origine de plusieurs propositions de loi « visant à la reconnaissance de la nation des massacres de la rue d’Isly du 26 mars 1962 et d’Oran du 5 juillet 1962 », jamais débattues, n’est pas la seule à vivre avec ces interrogations. Blessé rue d’Isly, M. Berret, qui témoigne auprès de l’association des familles de victimes du 26 mars 1962, vit lui aussi avec cette douleur : « C’est une autre blessure qui subsistera en moi, celle de tous ces morts oubliés, insultés, ce 26 mars qui, chaque année, réveille ma mémoire et ma peine. »
Le 26 janvier 2022, Emmanuel Macron avait, après près de soixante années de silence des autorités, qualifié les événements du 26 mars 1962 de « tragédie ». « Le massacre de la rue d’Isly est impardonnable pour la République », ajoutera le chef de l'État. Un pas, certes, mais qui reste « insuffisant », pour Valérie Boyer. « Ce 26 mars 2024, je déposerai à nouveau une proposition de loi au Sénat pour la reconnaissance de la barbarie et l’ampleur des massacres commis après le 19 mars 1962, notamment de la rue d’Isly du 26 mars 1962 et d’Oran du 5 juillet 1962, à l’égard de la population française », confie la sénatrice à BV. « Il y a encore des survivants, des proches des personnes massacrées ce jour-là par l’armée française. Ces gens continuent de souffrir et de s’interroger », explique l’élue.
La sénatrice espère qu’une enquête historique sera prochainement menée sur ces événements. « C’est le massacre le plus grave et le plus exceptionnel depuis la Commune, souligne-t-elle. Le silence n’est pas normal. L’indifférence, pour ne pas dire le mépris, dans lequel sont plongés ces Français survivants est choquant. Ce n’est pas digne de la France. » Bien que consciente que « cette histoire occultée n’intéresse pas grand monde », elle souhaite qu'on offre le plus vite possible « aux survivants la reconnaissance et la vérité ». Olivier Dard partage son sentiment. Il appelle lui aussi à ce que « les historiens puissent librement faire la lumière sur ce qui s’est passé ce 26 mars 1962 ». « La moindre des choses est d’offrir aux victimes une sépulture mémorielle. On ne peut pas occulter la mémoire de ces gens qui voulaient seulement être français », conclut, avec émotion, Valérie Boyer.
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42 commentaires
Arretons de mettre des plaques partout et je voudrais bien savoir combien de plaques sont mises en algérie pour le massacre du FLN contre nos soldat et Harkis
Merci pour ce bel article qui réveille ma mémoire et ma peine.
Le pardon ne peut ni ne doit être unilatéral, sinon il s’agit de lâcheté. Les Français attendent la réciprocité dans la repentance et Valérie Boyer a parfaitement raison. Elle n’oublie pas non plus le massacre du 5 juillet 1962 à Oran trois mois et demi après la fin de la guerre d’Algérie et quelques heures avant la proclamation de l’indépendance. Les Pieds Noirs, eux, n’oublient rien, même s’ils ont pardonné.
Il me semble que ce massacre est dû aux manques d’expériences et de sang froid d’un jeune officier Tirailleur. C’est la triste réalité du maintien de l’ordre mal maîtrisé par des soldats dont ce n’est pas la mission. Eux, leur mission c’est la guerre.
Et le massacre d’Oran, perpétré après la proclamation de l’Indépendance, donc bien après la fin de la guerre ? Il est mentionné dans l’article. Encore la faute d’un officier français ?
Le scrutin d’autodétermination a eu lieu le 1er juillet, avec 99,72 % de voix algériennes favorables à l’indépendance. L’ALN de l’extérieur, cantonnée au Maroc et qui n’a jamais combattu sur le terrain, se contentant de dépenser allègrement les dons des «pays amis», commence à entrer en Algérie le 3 juillet. Et se retrouve face aux modérés du GPRA, seuls signataires des accords d’Évian. Et, au contraire de ces derniers, l’ALN est hostile au maintien d’une présence européenne en Algérie. En bon communiste stalinien.
Ce contexte nourrit l’hypothèse de troubles prémédités en haut lieu. Certes, le massacre du 5 juillet permet à l’ALN de l’extérieur de pénétrer dans Oran le 8 pour «maintenir l’ordre» — entendant par là que le GPRA est incapable de le faire. Et surtout pour installer de force au pouvoir ses figures de proue, le colonel Boumedienne pour les militaires et Ahmed Ben Bella pour les politiques. Mais, concernant un coup monté, on est toujours dans le domaine de l’hypothèse
C’était la guerre et dans toutes les guerres il y a des choses inexplicables et incompréhensibles, sans doute que si l’OAS n’avait pas tué des appelés du contingents les militaires auraient agit différemment enfin je n’y était pas, j’y ai échappé de peu et je ne sais pas s’il faut faire remonter tout ça à la surface, le passé étant le passé, la conclusion est qu’il n’était nécessaire de faire une guerre si longue et si coûteuse en vies pour en arriver là. Enfin notre jeune président va honorer les combattants du FLN
Votre pseudo révèle bien le manque de sérieux et de la plus élémentaire solidarité à l’égard de ces dizaines de compatriotes massacrés pour la plupart dans le dos!
Je n’y ai pas « échappé « … : je servais mon pays simplement et avec foi.
Ce sont surtout les responsabilités de ceux qui ont provoqué le massacre qui sont occultées .
« Le massacre de français désarmés et pacifistes » par l’arméée française, un « haut fait d’arme de celui qui avait déjà déserté à Londres en 40 » ! Que ferait l’armée française aujourd’hui si elle recevait l’ordre de tirer sur les français qui veulent quitter l’UE ? Poser la question, c’est déjà y répondre
l’indifférence des français continentaux au sujet du drame algérien se retourne, et se retournera éternellement conte eux.
La France vit aujourd’hui la même tragédie.
Hélas, nous les Pied Noir, sommes dans le même bateaux France……… qui sombre……
Vous oubliez tous les français continentaux, comme vous dites, qui ont donné leur vie ou qui ont laissé leur jeunesse pour aller défendre et essayer de garder la terre des français non continentaux. Vous devriez a
C’est l’armée d’Afrique , qui par deux fois en 14/18 et en 39/45 que des jeunes pieds noirs sont venus sortir la France et les français du joug de l’Allemagne et ont libéré et garde la France aux français, car si cette armée d’Afrique n’avait pas existé, la France serait actuellement colonisée par les Germains.
Souvenez vous , ceux qui ont la mémoire courte.
Vous oubliez tous les français continentaux, comme vous dites, qui ont donné leur vie ou qui y ont laissé leur jeunesse pour aller défendre et essayer de garder la terre des français non continentaux. Vous devriez avoir un peu plus de respect pour eux. Moi je pensais qu’il n’y avait que des français même si parmi ceux qui n’étaient pas continentaux il n’y avait peu en fait de français métropolitains, beaucoup de pieds noirs venaient d’autres pays.
A cette lecture, Je comprends maintenant pourquoi la culture générale est devenue une lacune en France.
Vous oubliez seulement que la France a été libérée par les alliés sur le flanc ouest et par les troupes d’Afrique via la campagne d’Italie.
Nous avons du respect pour ces jeunes. Mais pourquoi « il » a maintenu la guerre pendant 4 ans (58 à 62) alors qu’il avait depuis longtemps le désir d’abandonner l’Algérie. Pourquoi les jeunes du contingent pieds noirs ne pouvaient faire leur service ou être appelés sur les théâtres d’opération en Algérie, mais envoyés en forces d’occupations en Allemagne. Ces vérités, personne ne veut les entendre.
A tous nos ennemis POLITIQUES de france .. Message solennel : Moi Antoine Furnari 5° génération en Algérie Fançaise me révolte ; crie mon Indignation quand encore aujourd’hui 26 Mars 2024 , je lis des messages Haineux – revanchards et justifiants presque cette fusillade de Soldats français sur des Civils Français sans armes et seulement portant un DRAPEAU FRANCAIS .. Je précise un Drapeau français et lire des mots – des Phrases justifiant presque cette fusillade… Je me dis que mes Propres compatriotes avec qui j’ai partagé une partie de mon adolescence – le service Militaire – les activités Professionnelles et artistiques puissent justifier un tel massacre parce que nous le MERITONS.. Je me demande si je ne vis pas un cauchemar eveillé .. Comment peut on vouloir justifier l’injustifiable et lire de pareilles INSANITES à notre egard.. Honte à vous – Honte d’être français et honte d’avoir choisi entre la terre et le drapeau français ce dernier .. RESPECT A TOUS CEUX QUI SONT MORTS DANS CETTE FUSILLADE ORDONNE PAR LE GENERAL DE GAULLE ET MIS EN APPLICATION PAR LE SINISTRE CHRISTIAN FOUCHET.
2-6 MARS 62 massacre rue d’isly à Alger et ne pas oublier non plus ceux massacres et tues du 5 juillet à Oran
Merci de le rappeler.
Ce massacre obscène ..est toujours dans un déni honteux
l’Algérie une plaie qui n’est pas prêt de se refermer !
Effectivement, le crime des pieds noirs a été celui de vouloir rester français.
Les trois choses qui salissent la mémoire de de Gaulle : ce massacre, celui des harkis laissés aux bourreaux du FLN, et le 19 mars 1962 ; pour ce dernier, on a de la chance , Macron ne l’a pas mis comme « Fête Nationale »…
Un lecteur avait qualifié mon aversion à de gaulle (*) de pathologique. S’il se reconnait, la lecture des faits sur cet évènement le fera peut-être changer d’avis. On a le droit de se tromper, mes également celui de reconnaitre la vérité quand certains veulent la mettre en exergue.
(*) Sans majuscule, réservée aux noms « propres »
J’ai AUCUNE compassion (uniquement de la considération) pour les coloniaux Français, caractérisé par l’appellation Pieds noirs. AUCUNE, Nous Français de Souche, avons largement payés ces décisions et obstinations politiques illogiques sociétalement, de cette serpillères de degaule + sa clique et son électorat ! Pour qu’au final du « je vous ai compris » … Les algériens ont le tapis rouge ici dans NÔTRES France et depuis toujours ! Et ce, au détriment des Familles de Français de Souche, grugées et ostracisées sociétalement ! Comme aujourd’hui, mais avec la multiculturalité : Emplois favorisé, aides ubuesques, etc ! Pendant longtemps, l’administration, était quasiment toute Pieds noires ! Probablement la raison du multiculturalisme rampant, instauré aux Français de Souche, aux forceps !…
Vous oubliez sa désertion en 40 et son auto-nomination au grade de général
Ce que vous dites est faux. Lorsque de Gaulle part à Londres pour rencontrer Churchill sur ordre du gouvernement, il en revient, mais pour retrouver une pétaudière sans nom, aux ordres de Pétain le sournois, tombeur de la République.
Churchill lui avait laissé son avion à disposition, pour qu’il puisse revenir si besoin était en Angleterre, pour reconstruire une armée française et continuer la lutte au côté de la Grande-Bretagne. Il a juste le temps d’apprendre que de général à titre provisoire, il vient d’être nommé général à titre définitif par Albert Lebrun, avant que le gouvernement ne tombe, et que de sous-secrétaire d’Etat à la guerre, il soit rendu disponible. Hors, il n’a plus d’affection non plus dans l’Armée. Il n’est donc pas déserteur… Il est donc bien général, et c’est le gouvernement de traîtres à la France, Pétain and Co, qui lui retire durant le Conseil de guerre son grade de général… Ce qui prouve bien que sa promotion avait été entérinée…
Seul les pétainistes revanchards et autres collabos, depuis 1945, continuent à diffuser ce genre de fausses informations sur de Gaulle.
Votre place est donc sans doute en Ukraine, où l’amicale des joyeux bandéristes vous accueillera à bras ouverts.
Reste à étudier, dans le détail, et avec un peu de recul, ce qui a amené ce désastre algérien, avec l’influence des poseurs de bombes et porteurs de valises de la Gôôôche française, ainsi que le rôle exacte d’un certain Mitterrand de 1954 à 1958…
Vous oubliez les 12 000 français « crevés » dans les camps de concentration du FLN. Quand à salir, il faut être propre pour se salir.
Ils ont été abattus, alors qu’ils chantaient la marseillaise;ils ont été abattus , alors que par humanité, ils portaient secours; ils ont été abattus pour avoir crié leur amour de la France;ils ont été abattus parce qu’ils étaient français.La nation, 62 ans plus tard ,doit reconnaître leur sacrifice et se souvenir.
Ceux qui ont vécu, de près ou de loin ces tragiques moments s’en souviendront toujours.
Nous avons droit à la vérité tant qu’il reste encore des survivants pour témoigner .
LEURS vérités ! Nuances ! Le Peuple français de Souche, lui, n’a JAMAIS pu s’exprimer librement, sur le sujet : algérie et ses coloniaux ! Les pieds noirs de 1960 à 2000 étaient la même diaspora (mafia) toxique, de secte communautariste, que les juifs et d’autres, aujourd’hui !
Ouh là là , Vous y allez fort ! Mais, effectivement, ayant eu dans ma famille des rapatriés d’Oran, bien nés par alliance, (surgis furax et « la bave aux lèvres » en juin 1962), je me suis longtemps demandée d’où provenait leurs : Snobisme; morgue; pognon retrouvé en abondance ; art de jongler avec le fric et de » faire des affaires » par la suite en ne frayant qu’avec un certain milieu choisi, de préférence ayant fonctions « diplomatico » -ministérielles assorties de logements de fonction intermittents gratos dans les quartiers chics de Paris (et autres côte d’Azur)…Diaspora protestante, en l’occurence.