[POINT DE VUE] Ces parents de gauche dont le fils vote RN…

© Jordan Florentin
© Jordan Florentin

Isabelle n'en revient toujours pas. Elle a 53 ans, est professeur de français et vit en banlieue parisienne. Elle a deux enfants. Rien ne manque à un simple et calme bonheur. Seulement voilà : depuis quelques mois, Isabelle ne dort plus. Elle semble n'avoir plus goût à rien. C'est que, depuis les dernières élections européennes, et plus encore depuis les législatives, l'état de son fils aîné la plonge dans une profonde détresse. Charles n'est pourtant pas atteint d'un cancer, il n'est pas fiché à la Banque de France ni dealer au pied d'une barre d'immeubles. C'est pire : Charles vote pour le Rassemblement national.

 

Des parents qui tournent en rond en se grattant la tête

« J’ai déjà croisé des électeurs, des connaissances lointaines et sans importance qui ont voté Le Pen, mais jamais dans la famille. Jamais, souffle Isabelle. C’est la première fois et c’est douloureux. » Voilà comment Libération raconte ce drame familial. Décidément, les journalistes de gauche sont beaucoup plus à l'aise avec la pédophilie ou les Khmers rouges qu'avec les libertés fondamentales. Malheur à l'enfant qui, issu de la caste mandarinale des profs de gauche, s'obstine pourtant à voter pour Marine le Pen. Libé compatit à la détresse d'Isabelle, pensez donc : avec elle, c'est presque tout le lectorat du journal qui souffre mille morts. Rachid Laïreche, l'auteur de l'article, le confirme d'ailleurs : « En juin, j'ai échangé avec plusieurs personnes dans la même situation. Des parents qui tournent en rond en se grattant la tête. » Un enfant facho, c'est une blessure intime. Une brûlure au cœur. Qu'est-ce qui a pu se passer ? Ils ne comprennent pas.

C'est tout de même amusant. Quand des parents de droite ont un enfant qui vote à gauche, ils continuent à l'aimer. Peut-être regrettent-ils une forme d'aveuglement, et encore. En revanche, quand ce sont des parents de gauche, des parents du camp du bien et du parti de la tolérance qui découvrent, médusés, que leur enfant ne pense pas comme eux, là, c'est pas pareil.

En réalité, le plus drôle, dans cette histoire, ce sont les dialogues. Ceux des parents d'abord, évidemment :

- Il ne faut pas se presser [dit Isabelle]. Nous avons un peu de temps devant nous, les prochaines élections se dérouleront au plus tôt l’an prochain en cas de nouvelle dissolution. Nous devons, en tant que parents, faire notre examen de conscience pour essayer de savoir les raisons qui ont poussé notre fils vers le Rassemblement national.

- Je suis d’accord [répond Paul, le mari]. On doit peut-être refaire un peu le film, tout reprendre, et essayer de trouver le moment où nous avons raté quelque chose. […]

Que de gravité ! C'est délicieux. Laissons le mot de la fin au jeune Paul, décidément très lucide :

[Question du journaliste]

- Pourquoi refuses-tu de parler de politique avec tes parents ?

- Ils ne veulent pas discuter mais me faire changer d’avis.

- Ils cherchent aussi à comprendre ton vote.

- Peut-être, mais il n’y a rien à comprendre. Depuis que je suis tout petit, mes parents me disent que je suis libre de faire ce que je veux, qu’ils m’accompagneront. Et aujourd’hui, parce que mon vote ne leur convient pas, ils se braquent.

Bravo à ce jeune homme et longue vie aux enfants qui sont plus intelligents que leurs parents !

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

43 commentaires

  1. Ce genre de scènes se passait exactement de façon identique lorsque des parents pro-Mitterrand voyaient leur enfant voter Jacques Chirac. C’était exactement les mêmes fractures et les mêmes ostracismes. Et Libé y a à mon avis déjà consacré des articles sur ces fameux enfants terribles qui votaient RPR pendant que les parents votaient PS. Pour le coup ils ne font simplement que reprendre la thèse de Terra Nova, expliquant que les électeurs traditionnels de gauche se droitisent et qu’il faut passer à l’intersectionnalité à luttes pour permettre à la gauche d’exister encore… Ce cas de figure est la parfaite illustration, c’est la gauche old-school qui ne se renouvelle plus et dont les enfants passent à droite. Le prochain bastion de gauche à tomber dans l’escarcelle du RN sera les homosexuels (gays et lesbiennes) puisque la transmania est en train de balayer la cause originelle.

  2. Peut-être que ce jeune homme se souvient de qui lui faisait des misères à l’école ! Ou peut-être a-t-il développé une opinion éclairée, en osant voir l’état de la France tel qu’il est ! Voilà une piste à creuser pour ses parents. Ou à suivre. C’est à eux de voir.

  3. Il y a malheureusement la situation inverse..j’ai toujours voté  » vraie droite  » mes enfants ont tous les 2 fait de belles études superieures et on tous les 2 ont un bon job…ma fille vote RN et je viens d’avoir la surprise de mon fils,ingénieur,qui voté nfp et qui ne veut pas » d’un pays de racistes et de fachos.. »reprenant le verbiage des incultes d’extrême gauche..visiblement les études supérieures ne portent pas sur l’histoire..

  4. Paul pourrait accepter le débat et en renverser l’objet: lui devrait essayer de convaincre ses parents, de les convaincre de voter RN, et de s’appuyer pour ce faire sur DES ARGUMENTS, et non sur des légendes urbaines, des allégations fantaisistes, des a-priori et autres égarements. Le succès n’est pas garanti, mais on ne peut que perdre les combats que l’on ne mène pas.

  5. Les parents bobos votent à gauche, les enfants trinquent : violence à l’école, insécurité tous azimuts, égalitarisme forcené qui les empêche sur parcours sup d’accéder aux places qui leur reviendraient, mais sont attribuées à d’autres au nom de la mixité sociale, matraquage woke auquel n’adhèrent pas tous les jeunes etc..

  6. On a du mal à croire que ce genre de drame familial puisse exister. On dirait une mauvaise blague. Et pourtant… Pourtant, quand on voit ce qu’il est en train de se passer en haut lieu, notamment à l’Assemblée, on réalise que c’est bien vrai. Qu’arrive-t-il à notre France ? Et que cache réellement cet acharnement contre le RN, alors que tout passe du côté de LFI. Rima Hassan déclare qu’il va falloir envahir l’ambassade d’Israël : personne ne bouge, personne ne réagit. Mais si Marine Le Pen déclare qu’il fait beau aujourd’hui, le « Chœur des esclaves » (de la bien-pensance) entier se lèvera pour dire qu’il pleut. Pathétique. Désespérant.

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