Ces professeurs preneurs d’otages : pourquoi Emmanuel Macron aurait mieux fait de se taire

macron

Ce devait être une tranquille interview foot-cause des femmes, à l'occasion de la finale de la Coupe du monde féminine. Excellente idée, consensuelle au possible, avec l'historique Jacques Vendroux. Un plan com' idéal pour sonner l'heure des vacances. Le Président au vert.

Mais voilà, Emmanuel Macron n'a pas pu s'empêcher de revenir sur les dernières fausses notes de son année scolaire : ce bac 2019 qui ne s'est pas si bien passé que cela, avec la contestation de la réforme Blanquer qui a poussé certains enseignants à briser des tabous (grève du bac le 17 juin, grève le jour de la remise des copies).

Toujours ce besoin de s'en prendre à ceux qui ne marchent pas dans l'élan macronien. Avec ce même paradoxe : ils sont ultra-minoritaires, quasiment rien, inexistants, mais, comme les gilets jaunes, ils grippent quand même la machine, montrent bien que quelque chose ne tourne pas rond dans le manège enchanté du macronisme. Emmanuel Macron a donc repris sans vergogne les éléments de langage du ministre Blanquer auquel il a apporté son soutien : « Je respecte la liberté d'opinion, la liberté syndicale, mais à la fin des fins, on ne peut pas prendre nos enfants et leurs familles en otage. Quand un examen est attendu avec angoisse, notre devoir à tous est d'être au rendez-vous. 99 % de celles et ceux qui font chaque jour l'Éducation nationale ont ce sens du devoir. »

J'aime quand Emmanuel Macron, pater patriae, dit « nos enfants », lui qui n'en a pas eu. Et je ne peux m'empêcher de méditer sur ces chefs d'État sans enfant. Au niveau synchronique, Gabrielle Cluzel l'avait un jour constaté, c'était une grande partie de l'Europe qui était dirigée par des chefs sans enfant, de Theresa May à Angela Markel. Mais au niveau diachronique (mes collègues historiens me corrigeront), il fallait remonter, pour trouver en France un chef d'État sans enfant, au maréchal Pétain.

Et puis, en poursuivant mes divagations sur ce « nos enfants » présidentiel, et son hyperbole de la « prise d'otages », j'ai songé à ces gilets jaunes qui ont perdu un œil, une main, durant cette année scolaire écoulée. Ils étaient souvent jeunes, mais eux n'ont pas eu la chance de faire partie du « nos enfants » présidentiel. Et j'ai songé à Vincent Lambert.

Ma fille a eu son bac. Et je crois qu'elle a compris qu'il y a, qu'il y a eu, en France, en 2019, des Français autrement pris en otages qu'elle, des Français blessés et des parents angoissés, au sens vrai et fort du terme.

Mais, pour eux, Emmanuel Macron n'a eu aucun mot de compassion dimanche soir.

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