César : contre les grands succès populaires, le triomphe des navets woke

La cinquantième cérémonie des César a eu lieu le 28 février dernier. Elle doit, comme on le sait, récompenser les meilleurs films, les meilleurs acteurs et actrices, les meilleurs décors et costumes et tutti quanti. Parmi les grands succès du box-office cette année, on pouvait noter, évidemment, Le Comte de Monte-Cristo, magnifique réussite, très librement adapté du roman d’Alexandre Dumas. Le film de Mathieu Delaporte et Alexandre de La Patellière est la preuve que l’on peut parier sur le goût du public pour les films longs (trois heures !), la littérature classique et les histoires intemporelles. D’ailleurs, l’Académie des César avait nommé le film dans quatorze catégories - un record, cette année. Et puis, il y avait aussi Un p’tit truc en plus, premier film d’Artus, hommage à la fois drôle et émouvant aux personnes handicapées mentales. On pouvait aussi penser que L’Amour ouf, film touchant de Gilles Lellouche sur l’évolution d’une relation amoureuse entre l’adolescence et l’âge adulte, plairait aux jurés.
Car il faut ici préciser le mode d’attribution des César : ce sont les 4.951 membres de l’académie des César à jour de cotisation (chiffre arrêté en décembre 2024) qui votent pour le film ou la personne de leur choix. Ces membres sont tous des professionnels de l’industrie cinématographique. À aucun moment le public n’est sollicité. Cela veut très concrètement dire que le public, quand il regarde la cérémonie des César, assiste passivement à la célébration des films, acteurs, réalisateurs, musiciens, etc., qui ont plu aux « professionnels de la profession ». On ne peut pas dire que ce soit une grande fête du cinéma. C’est plutôt le moment que choisit la profession pour se congratuler.
Dans de telles conditions, on ne peut pas s’étonner du résultat de l’édition 2025. Le Comte de Monte-Cristo ne rafle que deux statuettes : décors et costumes. Il était cité, on l’a dit, dans quatorze catégories. L’Amour ouf devra se contenter d’une récompense : meilleur second rôle pour Alain Chabat, alors qu’il était cité dans treize catégories. Les grands gagnants sont ailleurs. L’Histoire de Souleymane, un film qui raconte l’histoire d’un jeune Guinéen, livreur à vélo dans Paris, qui prépare son audition par l’OFPRA, obtient quatre César, dont celui de la révélation masculine pour Abou Sangaré, acteur non professionnel qui tient le rôle principal et dont l’histoire personnelle a inspiré l’écriture du film. Et puis, évidemment, le grand gagnant, c’est Emilia Pérez, l’histoire d’un narcotrafiquant qui disparaît de la circulation pour changer de sexe : sept César. Pas de surprise : toutes les cases sont cochées dans ces deux films. Le côté hors-sol des réalisateurs et de leur projet ne compte pas. Par exemple, peu importe que Jacques Audiard, dans un entretien autour du film, considère l’espagnol comme « une langue de pays émergents, de gens pauvres et de migrants » : ce snobisme très « exposition universelle » ne dérange personne entre les frontières rassurantes du périphérique.
Au fond, il s’agit, une énième fois, de la démonstration concrète de cette déconnexion totale entre le peuple et les élites. On pense à la chanson Foule sentimentale d’Alain Souchon. On pense au succès énorme du Puy du Fou. Contrairement à ce que croient les gens des métropoles, contrairement à ce que l’on pourrait se dire après des décennies de Disneyland, de télévision et de nuggets surgelées, oui, le peuple a du goût. Il en a même bien davantage que les 4.951 élus (par qui ?) chargés de donner les statuettes et les bons points. Le divorce est décidément consommé entre le bon sens et la mode. C’est vraiment la fin de l’Empire romain !

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19 commentaires
Le monde du cinéma pratiquant l’entre-soit pour d’auto-congratulé , il doit donc se financer par lui même de ce faite et sans touché un centime d’argent public (nos impôts), pour le théâtre cela doit être la même chose d’ailleur , le spectateur étant mis de coté et n’a pas sont mot a dire sur le choix des vainqueurs de cette cérémonie.