Cette nouvelle collection de la Maison 123 qui ne passe pas

Capture d'écran Instagram
Capture d'écran Instagram

Vêtu de son manteau en laine d’alpaga, l’élégant mannequin prend la pose au milieu des lamas. Les éléments de langage soigneusement pesés ont beau nous inviter au voyage - « Dans le tourbillon des danses et des rires, les légendes incas s’apprêtent à prendre vie alors que débute la route du Pérou » - la campagne de communication de Maison 123 autour de cette nouvelle collection ne semble pas du goût de tous et subit les fourches caudines de la bien-pensance habituelle.

 

 

« Comme dans Tintin ! »

La marque qui pensait peut-être simplement valoriser l’authenticité de « la chaleur des gestes, de la beauté des visages qui regardent l’âme et des sourires émanant des cœurs » se retrouve bien malgré elle accusée des pires maux de notre civilisation, c’est-à-dire d’avoir figé l’image aux temps des colonisations. « Comme dans Tintin » s'indigne Libération, c’est « comme si le Pérou n’existait pas avant la colonisation européenne ». 

Terminant de siroter sa tasse de café pur arabica, l’activiste féministe poncho sur le dos laissera sous les posts Instagram ces commentaires assassins : « Vous les avez payées combien les femmes aborigènes en arrière-plan pour ce photoshoot ? Et vous n'avez pas pensé à faire appel à des mannequins péruvien.ne.s plutôt que d'envoyer vos blancs dans nos pays ? C'est vraiment dégueu cette imagerie » ;  « appropriation culturelle », et même... « extractivisme culturel », cette improbable extension sémantique d'un mot naguère réservé aux ressources naturelles, le jargon militant semblant inépuisable, lui.

On pensait que le multiculturalisme était à la mode, mais faire poser des femmes andines autochtones relève du crime de lèse-majesté pour ces « spécialistes du pays d’Amérique du Sud » interrogées par Libé. Maison 123 aurait eu tort de vouloir valoriser les traditions et mettre en avant son folklore, cette publicité tenez-vous bien, montrerait « un village andin très mis en scène », en l’occurrence un village touristique réputé pour ses ateliers de tissage.

 

 

Si l’on imagine difficilement un shooting sans mise en scène, nous avons tenté, en vain, de joindre l’enseigne pour recueillir sa réaction. Sommée par le tribunal médiatique de se justifier, elle a tout de même communiqué auprès de Libé qui relate donc que ce shooting « a été réalisé en toute bienveillance », et se voulant rassurante, a précisé que cette campagne a été « faite en cohérence avec les valeurs de la marque ». Comme si cela ne relevait pas de l'évidence, politiquement correct oblige, l’entreprise victime de dénigrements a également précisé avoir rémunéré et « considéré avec respect » toutes les « personnes figurant sur les visuels ».

Mais pour les universitaires à la mentalité victimaire, ces images sont jugées « exotiques » et « essentialisantes », en somme, trop de clichés véhiculés. En outre, « la mannequin, grande et fine, représente « l’élégance» par opposition aux femmes andines, traditionnelles, dont les corps moins élancés sont exclus des normes de beauté occidentales ». Allez comprendre, cette campagne était trop exotique, elle est aussi trop occidentale et pas assez locale… Peut-être aurait-il fallu quelque chose de plus inattendu pour faire taire ces parangons de vertu ? Du queer, du trash, du vulgaire pour mieux les satisfaire ?

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

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