Charles III, un roi sacré au XXIe siècle

Certes, tout n'était pas tout à fait comme pour le couronnement et le sacre d'Élisabeth, en 1953...
charles III

Il faut le reconnaître, ils savent y faire. Ils ? Les Britanniques, of course ! Le royaume de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ne gouverne peut-être plus les flots de la Terre, comme le proclame orgueilleusement le chant patriotique « Rule Britannia », mais avouons qu’en ce 6 mai 2023, nos voisins d'outre-Manche nous ont offert un spectacle extraordinaire : le couronnement et le sacre d’un roi. La vieille Europe foisonne encore de monarchies : Belgique, Pays-Bas, Danemark, Suède, Norvège, Luxembourg, Espagne, Monaco, Liechtenstein. Dans ces pays, on n’y couronne plus beaucoup et on y sacre encore moins. Le roi d’Espagne – un Bourbon et, donc, un Capétien, ce qui n’est pas rien, tout de même – n’est même pas couronné. Tout juste investi comme un vulgaire président de la République.

Pas de ça, au Royaume-Uni. Charles a été sacré, comme autrefois les rois de France. Comme les rois d'Israël aux temps bibliques. « Sadoq le prêtre et Nathan le prophète oignirent Salomon pour le faire roi. Et tout le peuple se réjouissait et le disait : Dieu sauve le Roi, longue vie au Roi, que le Roi vive pour l’éternité ! Amen Alléluia ! » Ces paroles, inspirées de la Bible, sous les accents de Haendel, ont donc retenti sous les voûtes de Westminster. Comme pour la reine Élisabeth. Comme pour son père le roi George VI. Comme pour tous les souverains anglais depuis le roi George II, lors de son couronnement, en 1727.

Certes, tout n'était pas tout à fait comme pour le couronnement et le sacre d'Élisabeth, en 1953, il y a soixante-dix ans. Certes, le roi ne portait pas des bas de soie et des culottes à la française. Certes, l'épée était portée par une femme et l'Église anglicane est plus que jamais féminisée. Certes, sous les manteaux des ordres de la Jarretière, du Bain et de Victoria, il y avait moins d'aristocratie « old England » et plus de diversité, voire de diversités, issues du monde entier, et plus particulièrement des anciennes possessions de l'Empire britannique. Certes, la cérémonie religieuse prit parfois quelques airs quelque peu hétéroclites : entre gospel et opéra. L'air du temps. La concession à la modernité, à la diversité. Certes...

Mais sous ce qui pouvait parfois ressembler à un bric-à-brac insolite, l'essentiel était là : Charles III, revêtu d'une simple chemise de lin, après avoir entonné, agenouillé, le « Veni Creator », a été oint, selon la tradition, à l'abri des vues du public, comme pour marquer le caractère intemporel de ce moment. Charles a ensuite été revêtu de la chape et de l'étole dorées, réservées aux prêtres. Le roi sacré est prêtre. En cela, aucune concession à la modernité. Il faut l'avouer, la Grande-Bretagne sait encore surprendre par son attachement à la tradition. Une tradition millénaire.

Mais tout ceci, me direz-vous, c'est du cinéma, du folklore, de belles images pour faire rêver les vieilles dames qui attendent leur tour chez le coiffeur en lisant des magazines people. Peut-être. Mais en tout cas, ça avait quand même de la gueule et rappelait qu'une nation n'est pas qu'un amalgame horizontal, affublé de « valeurs », qu'on peine, du reste, à définir, et qu'elle peut être aussi un appel à plus de verticalité et de beauté.

 

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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