Chine : la fuite en avant de l’endettement des entreprises
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Le PIB de la Chine a connu une croissance de 6,9 % en 2017, fondée sur les bas coûts, l’investissement, l’exportation, la légère reprise mondiale et l’augmentation de la consommation des Chinois, mais cette croissance, qui fut de 14,2 % en 1992 ainsi qu’en 2007, s’essouffle. De plus, l’endettement des entreprises chinoises inquiète et représente une bombe à retardement, tant pour le régime du maître de Pékin Xi Jinping que pour le monde.
La priorité donnée à la croissance en Chine a été accompagnée du gel de la restructuration des 155.000 entreprises d’État, de l’émergence d’une finance de l’ombre par les banques et les gouvernements locaux de 80 % du PIB et par l’envolée de l’endettement chinois total, qui est passé de 150 % du PIB en 2007 à 260 % en 2017.
La politique de la fuite en avant avec les investissements gigantesques à venir dans « la route de la soie », afin de faire de la Chine le n° 1 mondial incontesté dans le monde (« Make China the Greatest Again »), pourrait se heurter au mur des réalités économiques et des contraintes financières.
Selon la Banque des règlements internationaux (BRI), l’endettement des entreprises chinoises, qui représentait 97 % du PIB en 2007, 121 % du PIB en 2010, a atteint 166 % du PIB en 2016 et représente, aujourd’hui, plus de 60 % de la dette chinoise totale.
Le FMI estimait déjà, en août 2017, que le danger était grand de voir des ajustements douloureux se produire, ou de connaître un brusque arrêt de la croissance en raison de la bulle de l’endettement. Selon le FMI, qui a comparé l’évolution de 43 bulles semblables dans l’histoire des économies, ce genre de situation s’achève systématiquement par un ralentissement aigu, voire une crise financière : "Tous les booms de crédit qui ont commencé alors que le ratio d’endettement dépassait les 100 %, comme c’est le cas en Chine, ont mal fini."
Le voyant de l’endettement des entreprises qui clignote au rouge est donc surveillé de très près par le parti, qui a une peur bleue et souhaite éviter à tout prix l’explosion sociale ainsi que l’instabilité dans le pays. Lors d’un séminaire à Washington en octobre 2017, le président de la banque centrale Zhou Xiaochuan a reconnu la gravité de la situation : "Le vrai problème est que la dette d’entreprise est trop élevée." On comprend mieux, ainsi, pourquoi Pékin freine les velléités d’investissements, à l’étranger, des grands groupes privés comme Fosun, propriétaire du Club Med, Wanda, HNA ou l’assureur Anbang dans des secteurs qu’il estime secondaires et non stratégiques.
Le principal danger réside dans le secteur des entreprises d’État, qui représentent plus d’un tiers du PIB chinois et dont la plupart sont de véritables droguées par le crédit facile des banques publiques. Les entreprise « zombies » les plus préoccupantes sont les entreprises publiques régionales non compétitives de l’industrie lourde en surcapacité, comme dans l’acier ou le charbon, qui sèment le désordre sur les marchés mondiaux en pratiquant le « dumping » avec des prix canon en dessous de leurs prix de revient.
15 % de ces entreprises d’État ne peuvent même plus payer les intérêts de leurs dettes sous peine de ne plus pouvoir payer leurs salariés. L’enjeu, pour le régime de Pékin, ce sont des millions d’ouvriers qui pourraient être licenciés avec des troubles sociaux, plus particulièrement dans les provinces du Nord-Est, qui ont déjà connu des affrontements violents ces dernières années, suite à des retards de paiement des salaires.
Les seuls facteurs positifs sont que les finances du pouvoir central sont en ordre et que, comme au Japon, les créances sont détenues à l’échelle nationale, ce qui met le régime de Pékin à l’abri des pressions des banquiers internationaux. Mais une guerre commerciale déclenchée par Trump pourrait être l’étincelle qui met le feu aux poudres !
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