[CHRONIQUE] Être ou ne pas être Français, voilà la question

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Le débat sur l’acquisition de la nationalité par le droit du sol, c'est-à-dire le hasard du lieu de naissance pour les étrangers, a relancé celui sur l’identité française. Qu’est-ce donc qu’être Français ? Après le désastre de 1870, les intellectuels français, à l’instar d’Ernest Renan, s’étaient beaucoup interrogés sur ce qu’est la nation ; débat très éclairant. Dans sa célèbre conférence de 1882, le philosophe considère que la nation ne se réduit ni à une dynastie, ni à une race, ni à une langue, ni à une religion, ni à une géographie.

En effet, le roi a été assassiné et la France a perduré, la race pure est une chimère, le français fut une langue universelle et est encore l’apanage de nombreuses nations, le pluralisme religieux et l’athéisme sont une réalité contemporaine française et les limites géographiques de la France ont varié sans que celle-ci ne vienne à disparaître. Néanmoins, il est clair que certains de ces éléments ont joué un rôle déterminant dans la constitution de notre pays. Pas de France sans Capétiens, sans catholicisme, sans langue française, sans frontières qui délimitent le peuple français et sans sentiment d’appartenir à un peuple déterminé.

Renan affirme alors que ce qui constitue une nation, c’est d’« avoir fait de grandes choses ensemble » et « de vouloir en faire encore » dans le futur et en déduit cette phrase fameuse : « L’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours. » Il existe donc comme une âme française, qui repose sur un passé commun, des traditions et des mœurs partagées, un héritage culturel reçu, mais aussi un principe vital de poursuivre l’aventure ensemble, d’accepter ce legs des générations passées et de continuer de le faire vivre pour les générations futures. La nation n’est pas une galerie d’archéologie mais un patrimoine vivant qui s’enrichit pour bâtir l’avenir.

La réflexion sur la nation éclaire celle sur l’identité française. Celle-ci ne se réduit pas, n’en déplaise à la gauche, à la seule notion juridique de nationalité. Ce serait confondre le paraître et l’être. Ce qu’au demeurant certains jeunes de banlieue ont bien traduit en jouant sur les mots : « Moi, M’sieur, j’suis un Français de papiers. » Lorsque l’on n’est pas héritier du patrimoine culturel et civilisationnel de la France, être Français, c’est d’abord vouloir le devenir. En cela, le droit du sol qui lie l’octroi de la nationalité au hasard du lieu de naissance est une absurdité en un temps où la France ne s’agrandit plus ni par droit de conquête, ni par alliance matrimoniale princière.

Être Français, c’est accepter un héritage civilisationnel, culturel, géographique et historique fait d’une langue, de traditions, de mode de vie, d’être, de penser et d’agir qui nous distinguent d’autres peuples et qui fait que, tout en participant de la même humanité, nous ne sommes ni Chinois, ni Britanniques, ni Turcs, ni Italiens, ni Malgaches, ni Argentins ou Congolais… Et c’est également vouloir le transmettre et l’enrichir, non y substituer un autre héritage, une autre langue, une autre culture et une autre civilisation.

Est-ce à dire qu’il faille pour cela renoncer à ses propres traditions ? Les Alsaciens n’ont pas les mêmes traditions que les Niçois ou les Normands, les Bretons ou les Basques. Mais tous n’en sont pas moins Français car ces traditions ne se combattent pas, elles s’ajoutent et s’il le faut, elles s’adaptent. Rien n’oblige personne à venir en France et à devenir Français s’il récuse l’héritage !

Être Français, c’est aussi, dans une certaine mesure, accepter d’oublier ce qui nous a divisés ou opposés. En ces temps de repentance obligée, il faut oser affirmer que réconcilier, c’est certes pardonner, mais c'est aussi accepter une part d’oubli. Le très sage Henri IV, dans le préambule de l’édit de Nantes, avait prescrit que la mémoire des troubles qui avaient ensanglanté le royaume « demeure éteinte et assoupie, comme de chose non avenue » et avait défendu « d’en renouveler la mémoire, s’attaquer, ressentir, injurier ni provoquer l’un l’autre par reproche de ce qui s’est passé ». Et, propos d’une surprenante actualité, le roi avait interdit « à tous prêcheurs, lecteurs et autres qui parlent en public d’user d’aucunes paroles, discours et propos tendant à exciter le peuple à sédition ».

C’était d’autres temps, où les gouvernants portaient la responsabilité devant Dieu d’offrir à leur peuple un gouvernement paisible, non de savoir comment ils allaient se faire élire ou réélire. Être Français, c’est vouloir jouir en paix d’un héritage partagé et le transférer enrichi à ceux qui nous suivront. En une phrase, faire fructifier ensemble notre patrimoine de civilisation commun.

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Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

34 commentaires

  1. Étant donné que le va-t-en guerre qui sévit à l’Élysée veut de la chair à canon à envoyer à son alter ego et copain Volodymyr Zelensky, nous ne sommes pas prêts de voir s’arrêter l’immigration. Mais attention, pas pour l’envoyer au casse-pipes, non, mais pour remplacer les bons petits Français qui se feront tuer pour « une affaire » qui ne les concerne en rien.

  2. Les temps changent et aujourd’hui être étranger qui veut devenir français pour une majorité de clandestins c’est pour profiter des largesses absurdes de notre pays, prise en charge, subventions, hébergement, droits que l’on n’accorde pas aux nationaux bref l’Eldorado hexagonal. Avoir le sésame identitaire est le but suprême. Alors non être français c’est pas ça. Mais il semble que nos politicards en grand nombre ne le savent pas. Il faut sortir des palais de temps en temps pour prendre contact avec les contribuables français.

  3. C’est effrayant et à la fois suspect, en 2025, et après J.-C. d’autant plus, que de devoir expliquer encore ce qu’est et ce qu’implique d’être Français. Il faut vraiment qu’une partie de la population soit aveugle ou endoctrinée pour l’accepter et que le niveau scolaire en France en soit à un niveau stratosphérique de délabrement pour en être arrivé là. Quand je me rends en Espagne, je n’ai pas besoin que l’on m’explique ce qu’est être espagnol. Je m’adapte respectueusement.

  4. … Être Français, c’est vouloir jouir en paix d’un héritage partagé et le transférer enrichi à ceux qui nous suivront …
    De biens belles et bonnes paroles, effectivement !

    Pourtant, c’est bien, semble t’il à Alésia, Sedan, Ouistreham, et en beaucoup d’autres lieux et dates que cette foutue âme de Grognard a lustré son bronze. Peu importe, je vous passe le couplet des biens faits de l’adversité et de l’épreuve révélatrice, il n’y a rien de paisible et de jouissifs en ce chapitre. Il est vrai qu’a notre époque, ce n’est pas/plus politiquement vendeur.

    Toutefois, avec son  » Français debout !  » l’ami Roland donne l’impression de vouloir nous emmener dans une direction un peu plus mouvementée que votre définition.
    À moins que cela ne soit qu’une simple, pure et saine évocation d’une Situation, en forme d’un plaidoyer de survie.
    Peu importe, là aussi …

    Et si, en définitive, être Franchouillard se résumer à étre un Souffle.
    Un • INSPIR • dans le poumon de nos amis, Boilot, La Fontaine, Peguy, Bernanos, Char, Aragon avec des parfum de rose et de réséda,… et + évidemment.
    Un °EXPIR ° dans la conformité de l’acte de la glaise.

    Non, finalement, pas un Souffle,
    Mais un Soupir •••▪︎

  5. Etre français c’est comprendre, mesurer et accepter notre héritage. C’est aussi le préserver et le faire grandir.
    Etre français c’est un engagement naturel pour assurer la prospérité de son pays.
    Les français de papier bénéficient d’une opportunité ou faiblesse de notre administration. Ce papier consiste a faire bénéficier d’un statut ou d’un avantage qu’ils n’ont acquis sur nos valeurs mais offerts pour la bonne cause humanitaire ou économique. Ce papier est une photocopie de complaisance.

    • On peut cependant accepter de voir évoluer nos usages, par la présence de populations exogènes, c’est ainsi que nos coutumes régionales se sont forgées, mais après plusieurs générations, et sans contraintes. On en est loin…

  6. Très bel ararticleon ne oeut etre franxaus que vivant comme les francais vivent..ceux que nous designons « français de papier » et qui reprennent à leur compte cette expression pour bien montrer qu’ils ne s’assimileront jamais et rejetent cette nationalité n’ont rien à faire ici..quand bien même leurs parents auraient ete des héros qui ont tout bâti et ce seraient battu pour la France.. ils considèrent avoir hérité d’une creance à présenter à la France..Moi je n’ai colonisé personne mais suis en train d’être colonisé donc je ne dois rien à personne et refuse de me soumettre à ces gens..

  7. « Les Alsaciens n’ont pas les mêmes traditions que les Niçois ou les Normands, les Bretons ou les Basques. Mais tous n’en sont pas moins Français car ces traditions ne se combattent pas, elles s’ajoutent et s’il le faut, elles s’adaptent ». Les Français ont leur propre diversité — façonnée au fil des siècles — et n’ont aucun besoin d’y ajouter celle qu’on veut à toute force leur imposer. La France est en Europe et pourtant je ne me sens pas européenne, mais seulement profondément française.

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