[CHRONIQUE] Laïcisme : un vandalisme civilisationnel

Gabrielle Cluzel a souligné, dans un récent éditorial, le ridicule de la « chasse aux crèches », forme de négationnisme culturel. Menée par une « Ligue des droits de l’homme » qui, semble-t-il, a du temps à perdre plutôt qu’à réellement défendre les droits de l’homme là où ils sont bafoués. Cette guerre déclarée aux santons de Provence, aux statues et calvaires est, évidemment, aussi grotesque que stupide et relève d’une sorte d’obsession pathologique. Les talibans destructeurs des Bouddhas de Bâmiyân étaient dans la même logique. Mais elle s’inscrit dans une déplorable tradition républicaine issue de la Révolution française, qui pratiqua le vandalisme culturel à grande échelle.
Le tour dramatique et totalitaire de la Révolution est né de la fureur anticatholique qui animait la gauche révolutionnaire. Vente des biens d’Église puis constitution civile du clergé furent le moteur de la descente aux enfers de la Révolution, qui conduisit à la Terreur et au génocide vendéen. La IIIe République continua sur la même lancée avec l’expulsion des congrégations et leur spoliation (1880), l’interdiction des aumôniers militaires (1881), la loi de 1905 qui, contrairement à la légende dorée que l’on nous sert sans cesse, n’était nullement une loi d’apaisement mais une machine de guerre contre l’Église catholique. Chacun se souvient que Mitterrand avait voulu supprimer l’enseignement catholique sous contrat. La guerre scolaire reste un vieux fantasme de la gauche française, nous l’avons vu récemment avec les attaques forcenées contre Stanislas. La lutte contre le christianisme, et tout spécialement le catholicisme, est consubstantiel aux partis de gauche français et à l’Histoire de la République française. Le wokisme, idéologie de substitution au marxisme, est le nouveau vecteur de la lutte contre le christianisme vu comme le pire aspect du « suprématisme occidental » et comme un obstacle à l’avènement de l’individu roi, quasiment déifié comme les empereurs romains.
L’acharnement des supposés « libres penseurs », qui mériterait une étude psychologique, a quelque chose de particulièrement dérisoire, dans une société largement déchristianisée du fait de la domination du consumériste libéral. Le matérialisme pratique de la société de consommation individualiste a été, à cet égard, plus efficace que les obsessions de certains porteurs de tabliers.
Mais au-delà du légitime agacement que peuvent faire naître ces combats rétrogrades, la coupure de la société de toute transcendance n’est pas sans conséquence. Il se trouve que l’homme est un « animal » religieux. Coupez-le de la religion, il reste l’animal avec ses instincts. Or, contrairement aux billevesées de Rousseau, ils ne sont pas naturellement bons.
Seule la civilisation police l’être humain et il n’est pas de haute civilisation sans aspiration religieuse. Malraux, lui, l’avait bien compris : « La nature d’une civilisation, c’est ce qui s’agrège autour d’une religion ; notre civilisation est incapable de construire un temple ou un tombeau. Elle sera contrainte de trouver sa valeur fondamentale, ou elle se décomposera » (3 juin 1956). Ce ne sont certes pas les fameuses « valeurs de la République », aussi floues qu’imprécises, et qui traduisent surtout aujourd’hui une forme d’individualisme morbide, qui pourront en tenir lieu.
Il ne faut pas, dès lors, s’étonner de l’ensauvagement de la société et du déclin des mœurs, y compris politiques. De même que couper un arbre de ses racines le fait dépérir, couper une civilisation de ses fondements la conduit à l’effondrement. Le refus de reconnaître les « racines chrétiennes de l’Europe » fut très symptomatique de l’apostasie suicidaire de l’Union européenne, et le fait que le président de la République française d’alors, Jacques Chirac, ait été à la pointe de ce stupide combat est aussi affligeant que révélateur de l’état de notre monde politique. La guéguerre contre les crèches n’est donc pas si anecdotique, elle révèle une tare profonde de l’idéologie du système qui prétend nier toute transcendance et nous conduit à la barbarie. Tous ceux qui ont annoncé la mort de Dieu on surtout annoncé celle des hommes.
Mais, comme la nature a horreur du vide, il existe un système politico-religieux qui ne demande qu’à le remplir. Malraux, dans le texte cité, avait souligné : « C’est le grand phénomène de notre époque que la violence de la poussée islamique… Aujourd’hui, le monde occidental ne semble guère préparé à affronter le problème de l’islam. » La question cruciale n’est pas la composition de tel ou tel gouvernement, mais bien celle du renversement total des paradigmes du système politique et le remplacement d’une classe politique usée par un pouvoir lucide au service de la France.
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27 commentaires
« Le tour dramatique et totalitaire de la Révolution est né de la fureur anticatholique qui animait la gauche révolutionnaire. » N’oublions pas que Babeuf, Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Danton, Robespierre, Saint-Just…etc étaient Francs-maçons. Sur les 25 Maréchaux d’Empire, 17 étaient francs-maçons, dont : Bernadotte, Brune, Kellermann, Lannes, Mac Donald, Masséna, Mortier, Murat, Ney, Oudinot… Leur « Grand Maître » était Joseph Bonaparte, le propre frère de l’Empereur.
Toutes les civilisations de tous les temps, et de partout dans le monde ont toujours été religieuses. C’est le propre de la nature humaine. La fameuse « laïcité » est donc la négation de la nature humaine. Faire ainsi le vide est mortel, car la nature a horreur du vide !
Je rejoins les commentaires de A Maury au risque de me faire censurer .
SVP arrétez avec vos religions .
Les pauvres » gueux » qui n’avaient rien a manger ( raison unique du soulévement) avant la Révolution n’avaient qu’un seul choix : se soumettre a la noblesse , et a la religion ( pour l’espoir d’une vie meilleure )
Avant la Révolution ( imparfaite car brutale ) : les Papes faisaient les Rois et les Rois faisaient les Papes , double soumission
sans remettre en cause notre passé , notre civilisation Judéo ( vous avez oublié le Judéo dans votre article) Chrétienne , nous devons nous adapter . Le monde change , la terre tourne ( comme dirait Copernic , vous vous souvenez de Copernic celui qui défia l’église )
Les valeurs humaines de : survie , charité , bienveillance , entraide , fraternité ne sont pas l’Exclusivité de la religion chrétienne .Exemple vivant avec les tribus au Brésil .
le nombre de fidéles diminuent dans les églises , et le nombre de brebis égarées augmente . Le méme message depuis 2000 ans et toujours les mémes momies au Vatican .
Ce n’est pas le consumérisme qui a diminué l’influence des religions et le nombre de fidéles mais plutot l’évolution scientifique .
Que dire des religions asiatiques ? plus libérales , moins restrictives punitives .
Vive la laicité
Ce n’est oas le consumérisme qui a diminué le nombre de fidéles dans les églises
Contrairement aux divers commentaires issus de considérations ‘laïcardes’, je souscris pleinement à celui de Josée Perlaut de ce jour à 11h48
Cessons le vandalisme civilisationnel si bien décrit par l’article de Steph. Buffetaud.
Intéressant. Mais en affirmant que l’homme est « un animal religieux » vous avez pris des risques: Susciter des fureurs anti-religieuses ! Peut être vaudrait-il mieux dire que l’homme est un animal idéologique. C’est à dire que les idéologies peuvent être religieuses ou pas, laïques comme on dit chez nous ! Ce n’est ni mieux ni plus mal. Le problème ce ne sont pas les religions, ce sont les idéologies et le fanatisme qui en découle le plus souvent.