[Chronique] Macron : le désastre diplomatique

Capture écran France 24
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La diplomatie est une discipline qui requiert la définition d’objectifs clairs, la connaissance et la compréhension de ceux de ses adversaires et de ses alliés, la liberté de pensée et d’action, l’art d’utiliser les conjonctures, le sens des opportunités et une claire conscience des intérêts de la France.

Or, avec Emmanuel Macron, tout n’est que confusion et incohérence. Pour le plus grand dommage de la nation, de sa place sur le plan international et de la défense de ses intérêts. Lord Palmerston avait exprimé, dans un discours aux Communes en 1848, la règle suivante : « Nous n’avons pas d’alliés éternels et nous n’avons pas d’ennemis perpétuels. Nos intérêts sont éternels et perpétuels, et notre devoir est de suivre ces intérêts. » Le problème est que le président de la République ne semble pas avoir une claire vision de nos intérêts. Quant à la France...

Le dernier avatar du désastre annoncé de notre politique internationale a été la petite phrase du Conseil des ministres, relative à la naissance d’Israël. La question ne réside pas dans la naissance de l’État hébreu, actée par une résolution de l’ONU, mais de l’opportunité de ce rappel dans le contexte et du temps présent et de l’ambiguïté du propos présidentiel. Alors qu’Israël doit répondre à une offensive terroriste sans précédent, alors que l’Iran menace son existence même, sembler remettre en cause la pérennité de l’acte de droit international qui lui a juridiquement donné naissance n’est pas une erreur, c’est une faute.

Chacun connaît la phrase du général de Gaulle : « Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples » (Mémoires, 1941). Or, face à un Moyen-Orient plus que jamais compliqué, M. Macron n’a ni les idées simples ni les idées claires.

Si le Président aime les références historiques, encore faudrait-il être complet dans l’approche d’une des questions les plus compliquées de l’Histoire contemporaine. À l’origine, le mouvement sioniste, dont la figure emblématique est Theodor Herzl, face à un renouveau de l’antisémitisme en Europe au XIXe siècle, voyait dans la création d’un État juif le moyen d’assurer la paix et la sécurité des Juifs du monde entier. Ce peuple, bien que privé durant deux mille ans d’une terre et d’un État, avait gardé une conscience nationale et rêvé d’un retour à Jérusalem : « l’an prochain à Jérusalem ». Mais, en deux millénaires, d’autres peuples et d’autres civilisations avaient fleuri sur ce petit territoire du Moyen-Orient.

En 1917, Lord Balfour avait promis l’établissement d’un « foyer national juif » dans la partie méridionale de la Syrie, dans l’hypothèse de l’effondrement de l’Empire ottoman. Lors de son démantèlement, le Royaume-Uni reçut mandat sur la « Palestine mandataire ». La Seconde Guerre mondiale et la Shoah rendirent la question de la création d’un État juif évidente. L’ONU proposa de partager le territoire de la Palestine « mandataire » en deux États indépendants, l’un juif et l’autre arabe, et de placer la ville de Jérusalem sous mandat international (résolution 181 (II) 1947). Ce plan raisonnable dans son principe, mais pas dans sa traduction géographique morcelée, ne fut jamais mis en œuvre à cause de la guerre qui opposa les nations arabes qui entouraient la Palestine et le jeune État d’Israël dès sa proclamation d’indépendance par Ben Gourion, le 14 mai 1948. Il s’agissait alors d’une guerre entre la Ligue arabe et le jeune État juif. La notion de peuple palestinien n’existait pas.

Le conflit se conclut par des accords d’armistice en 1949 et la création d’une « ligne verte » qui délimita les frontières d’Israël jusqu’à la guerre des Six Jours. Le jeune État israélien avait conquis 78 % de l’ancienne Palestine mandataire (l’ONU lui en accordait 55 %). C’est le succès des armes qui a créé Israël, plus qu’une résolution onusienne qui ne fut jamais mise en œuvre, même si elle avait acté le principe de la création de l’État juif. La défaite arabe entama une période de troubles chez les vaincus, mais surtout l’exil de plus de 700.000 Arabes palestiniens qui allait donner naissance à la question palestinienne, à la suite de cette Al Naqba (« catastrophe »).

La dramatique histoire du Moyen-Orient vaut mieux qu’une petite phrase. La vraie raison des atermoiements présidentiels ne réside pas dans une vision géopolitique solide, mais dans la crainte de déplaire à une partie de la population arabo-musulmane installée en France. Nous payons là le prix politique de décennies d’irresponsabilité en matière migratoire et d’octroi de la nationalité. Ce prix est celui de notre liberté de décision. Israël a le droit imprescriptible de se défendre. Il n’y aura pas de paix durable sans la reconnaissance, par le monde musulman, du droit d’Israël à exister et sans la reconnaissance d’un État palestinien, le moment venu. C’est, finalement, assez simple. Trop pour M. Macron, dont la « réflexion » géostratégique est aussi brouillonne que vaine.

Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

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