[CINEMA] Bergers, quand un néorural embrasse la vie pastorale

Publicitaire trentenaire, Mathyas a quitté sa vie bien rangée à Montréal pour venir s’installer en Provence, à Arles. Convaincu que sa vie, jusqu’à présent, manquait de sens, ce jeune romantique s’est mis en tête d’apprendre le métier de berger afin de se rapprocher de la nature. Purement livresques, ses connaissances en la matière sont bien maigres et ne lui seront, in fine, que de peu d’utilité.
Aussi, lorsque Mathyas leur propose gentiment ses services, les paysans du coin, incrédules, le raillent volontiers, touchés néanmoins par la bonne volonté de ce doux rêveur. Après une première période d’essai infructueuse, le Québécois accepte d’être embauché au noir par un tandem de bergers un poil rustauds. Une expérience tout aussi décevante que la précédente, à deux doigts de l’écœurer définitivement. La troisième tentative, enfin, sera la bonne. Épaulé par une jeune fonctionnaire ayant récemment plaqué son boulot, Mathyas va pouvoir vivre son rêve et apprendre les ficelles du métier.
La quête du sens
Adaptation du roman autobiographique D'où viens-tu, berger ?, de Mathyas Lefebure, paru en 2006, Bergers, réalisé par Sophie Deraspe, s’affiche comme un film pastoral à la narration ouvertement romanesque, à laquelle se prête allègrement son postulat de départ : l’arrivée improbable d’un « néorural » canadien au pays de Frédéric Mistral et de Marcel Pagnol. Un jeune homme plein d’espoirs et d’illusions éprouvant le besoin tout à fait légitime, en cette « époque liquide » de mouvement perpétuel, d’instabilité et de changements, de s’inscrire dans une tradition solidement ancrée. En l’occurrence, celle d’un métier paysan multimillénaire et commun à nombre de civilisations.
Bien sûr, ce désir ardent d’épouser la nature relève davantage, pour Mathyas, d’une démarche poétique et philosophique – propre à un esprit moderne, citadin, voire universitaire – que d’une approche concrète et pragmatique, qui est celle de la plupart des paysans ; lesquels, bien souvent, n’ont pas choisi leur vie.
Apprendre à la dure
Rêveur mais pas totalement naïf, notre Québécois sait pertinemment que la difficulté l’attend, bien qu’il en mesure mal la teneur. Parachuté du jour au lendemain dans cet environnement professionnel dont il a tout à apprendre, Mathyas sera confronté aussi bien aux problèmes climatiques et à leurs conséquences qu’à la perte d’une trentaine de brebis – sur un troupeau de huit-cents – égarées dans la montagne et menacées par les loups. Prenant son courage à deux mains, l’ingénu va devoir achever les blessées pour mettre fin à leurs souffrances. Un acte de bon sens, pragmatique et responsable, auquel il ne s’était pas préparé, ou si peu…
À ses côtés, heureusement, l’apprenti berger peut compter sur Élise, une fille de la ville aussi novice que lui, avec qui semble s’esquisser une relation sentimentale marquée du sceau de la promesse et de l’évidence.
Très balisé dans sa progression narrative, Bergers a pour lui le double argument d’être tiré de faits réels et de mettre en valeur une profession sur le déclin, en outre peu abordée au cinéma.
3 étoiles sur 5
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3 commentaires
Merci pour votre critique Monsieur, j’inscris ce film à mon programme, vous l’avez bien présenté.
Un bon film allez y..
« des nuages plein la tête », c’est un peu plus sportif, et…vécu