Cinéma : Emily, de Frances O’Connor, la vie romancée d’Emily Brontë. Une réussite !

film Emily

Tandis qu’à l’âge de trente ans seulement la tuberculose est sur le point de l’emporter, Emily Brontë se remémore son adolescence et les circonstances qui l’ont menée à rédiger Les Hauts de Hurlevent, son premier et unique roman considéré à travers le monde comme un chef-d’œuvre littéraire.

Emily, son frère Branwell et ses sœurs Anne et Charlotte passent une jeunesse insouciante dans un presbytère du Yorkshire, à Haworth, où leur père officie en tant que pasteur anglican. De cette famille artiste dont les trois filles publieront la même année leur premier roman, Jane Eyre pour Charlotte, Agnes Grey pour Anne et Les Hauts de Hurlevent pour Emily, cette dernière se montre la plus effacée, pour ne pas dire la plus asociale, celle qui cultive à loisir sa marginalité. Pendant que Charlotte brille dans ses études et fait la fierté du père, Emily se réfugie avec Anne dans des mondes imaginaires qu’elles mettent en scène dans toutes sortes de récits et de poèmes. Très proche, également, de son frère Branwell, qui fut jadis l’espoir de la famille avant de la décevoir, Emily le suit volontiers dans ses frasques. Seule la présence au quotidien du vicaire William Weightman, qui aide la jeune femme à parfaire son français – des séquences donnant lieu à des dialogues magnifiques dans notre langue –, quand il n’assiste pas le révérend Brontë, lui rappelle les limites à ne pas franchir. Une position d’autorité qui ne laisse pas l’élève indifférente et dont il abusera malgré lui en succombant à son charme.

Avec Emily, son premier long-métrage en tant que réalisatrice, la comédienne australienne Frances O’Connor s’inspire des éléments biographiques officiels de la vie d’Emily Brontë ainsi que de son roman Les Hauts de Hurlevent pour livrer un portrait romancé de ce célèbre auteur dont on ne sait pratiquement rien. Si la relation sentimentale avec le vicaire semble sujette à caution, le récit paraît néanmoins vraisemblable dans ses propositions au regard du peu qui nous est connu. On ne s’offusquera donc pas des libertés que prend la cinéaste pour qui l’essentiel, de toute évidence, est à chercher dans la caractérisation et dans l’intériorité tumultueuse de son héroïne. Car la réussite de ce film éminemment romantique aux paysages magnifiques du Yorkshire doit beaucoup à Emma Mackey, son actrice principale, à son jeu sauvage et tout en nuances et à l’intelligence qui transparaît dans son regard. La jeune femme porte le film sur ses épaules. Quant à Frances O’Connor, la réalisatrice, elle montre pour un premier film un réel savoir-faire et une belle créativité de mise en scène. La séquence du masque, empreinte de romantisme noir, saura à coup sûr marquer les esprits. Le tout, accompagné d’une bande originale puissante signée Abel Korzeniowski, aboutit à une composition tout à fait satisfaisante autour des sœurs Brontë.

4 étoiles sur 5

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

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