[CINÉMA] Le portrait biographique de Niki de Saint Phalle par Céline Sallette

Capture d'écran
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Les coïncidences sont parfois troublantes. Nous évoquions, la semaine dernière, le film biographique sur Lee Miller, cette ancienne mannequin de Vogue Magazine devenue photographe de guerre en 1942. La même semaine sortait en salle un film biographique sur Niki de Saint Phalle, également mannequin pour Vogue Magazine, avant de devenir l’artiste que nous connaissons.

Le récit de Niki se déroule entre 1952 et 1961, période durant laquelle la jeune Catherine Mathews – épouse de l’écrivain et poète Harry Mathews – traverse une grave dépression, liée notamment aux viols qu’elle aurait subis dans son enfance de la part d’un père incestueux.

Internée en hôpital psychiatrique, où les médecins la traitent aux électrochocs, Niki découvre la peinture, qui lui sert d’exutoire et lui permet de coucher sur le papier ses pensées tumultueuses, ses peurs, ses joies et ses espoirs. Quelque temps plus tard, la jeune femme s’installe à Paris, fait la connaissance des milieux artistiques de l’époque, et notamment de son futur époux, le sculpteur et peintre suisse Jean Tinguely, avec qui elle entamera par la suite une fructueuse collaboration.

 

Une personnalité poignante

Premier film écrit et réalisé par la talentueuse comédienne Céline Sallette (Mon âme par toi guérieLes Algues vertes), Niki retrace avec intérêt une décennie charnière de la vie de Niki de Saint Phalle, artiste conceptuelle, apparentée aux Nouveaux Réalistes, très largement surestimée – comme beaucoup de ses pairs de l’époque – mais à la personnalité fascinante. Passionnée, jusqu’au-boutiste, mue essentiellement par ses tourments émotionnels et cultivant le coup d’éclat, Niki nous apparaît tout au long du récit comme un volcan prêt, à tout moment, à entrer en effusion. Souvent difficile à suivre, mais diablement attachante, la jeune femme se révèle peut-être plus intéressante que l’œuvre qu’elle laisse derrière elle. C’est pourquoi il n’est pas si gênant, en fin de compte, que Céline Sallette n’ait pu obtenir la permission d’utiliser dans son film les peintures et sculptures de l’artiste – les amateurs de Niki de Saint Phalle, en revanche, auront de bonnes raisons d’être frustrés.

Une cinéaste inspirée

Finaude, la réalisatrice compense ce lourd handicap par la mise en scène, sobre mais efficace, des moments de créativité du personnage. Contrainte de travailler en équipe réduite pour des raisons budgétaires, la cinéaste n’en est pas moins ambitieuse, on salue son jeu sur les couleurs chaudes, à mesure que progresse la narration, et son utilisation judicieuse du « split screen ».

Surtout, la plus grande idée de Céline Sallette est d’avoir confié le rôle principal à la Canadienne Charlotte Le Bon, qui non seulement partage la double culture franco-américaine avec Niki de Saint Phalle, mais lui ressemble étrangement, autant sur le plan physique qu’à travers son parcours professionnel – Le Bon a également commencé sa carrière dans le mannequinat et pratique aussi bien la peinture que la sculpture (!)

Le seul véritable point noir du film concerne les rôles masculins, trop peu élaborés (mention spéciale aux personnages de Harry Mathews et Jean Tinguely). On sait que Céline Sallette est membre du collectif 50/50 ; peut-être ceci explique-t-il cela…

 

3 étoiles sur 5

 

 

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

3 commentaires

  1. Je ne connais rien d’elle dans sa vie privée. Peu me chaud quand je vois les horreur qu’elle a parsemées dans les villes. Si vous trouvez cela beau, il serait bon de faire un sondage pour savoir si l’art est tombé aussi bas.

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