[Cinéma] Le Règne animal, un drame touchant qui flirte avec l’antispécisme

film le règne animal

Dans une réalité alternative, mais néanmoins similaire à la nôtre, la société est confrontée à une vague de mutations sans précédent des humains en animaux. Bouleversé par la transformation progressive de son épouse Lana, François emménage avec son fils Émile dans les landes de Gascogne où une place s’est libérée pour elle dans un centre spécialisé. Sur place, le véhicule chargé de son transport est pris dans un accident de la route, si bien que Lana disparait dans la nature. François se met alors en tête de la retrouver mais ne réalise pas que son fils commence à son tour à muter…

Révélé en 2014 avec Les Combattants, film original et cocasse à la fois qui, à l’époque, fut sélectionné à Cannes pour la Quinzaine des réalisateurs, Thomas Cailley nous propose, avec Le Règne animal, un nouvel objet filmique non identifié, un « OFNI » qui risque bien de faire parler de lui. Lorgnant du côté d’X-Men et de L’Île du Docteur Moreau, le réalisateur réussit haut la main sa première incursion dans le fantastique avec un récit pour le moins touchant sur les relations père-fils. Un drame familial, en somme, dans lequel on retrouve d’emblée la patte du cinéaste, son intérêt pour les paysages magnifiques des landes et son goût particulier pour les dialogues incongrus et parfois loufoques.

Le film est cependant discutable sur le plan idéologique. En se faisant l’écho des préoccupations du moment et de l’éco-anxiété de nos contemporains, Le Règne animal martèle l’idée d’une frontière ténue entre l’homme et l’animal. Postulat archi-convenu, peu étayé, qui cache bien mal une tentation inconsciente du cinéaste de céder à l’anthropomorphisme : volonté d’attribuer aux animaux un mode de pensée humain. Anthropomorphisme qui, bien compris, ne peut déboucher que sur les conceptions fumeuses de « droit des animaux » et « d’antispécisme ».

Or, si les animaux ne reconnaissent aucun droit ni devoir aux autres espèces, qu’ils considèrent au mieux comme des proies ou des menaces à leur existence, ils n’ont pas non plus la capacité pour eux-mêmes de prétendre aux droits. L’empathie réelle que ressent l’homme pour les bêtes, et son désir éventuel de les protéger, impliquent de facto une différence de nature entre l’humanité et le monde animal. Tenter de nier cette altérité relève du pur délire, « l’antispécisme » n’a aucune pertinence. En cela, le désir de Thomas Cailley de brouiller les frontières à travers son récit nous semble un peu vain.

Plus grave, son message sur le « vivre ensemble » - qui renvoie directement, dans notre imaginaire collectif, aux thématiques migratoires que connaissent nos sociétés occidentales depuis les années 70 - revient indirectement à faire un parallèle douteux entre les immigrés et les animaux (!).

On mettra cela sur le compte de la maladresse, le cinéaste n’ayant évidemment pas intellectualisé la chose de cette façon-là.

Son récit, en soi, fonctionne, on passe un bon moment, et c’est bien tout ce qui compte.

3 étoiles sur 5

 

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

13 commentaires

  1. Bon, on connaît déjà la vraie raison d’un tel pamphlet, le steak.

    En dehors du problème de l’auteur de l’article qui oublie quelques bases de la SVT, il ne semble pas se rendre compte qu’en refusant le droit à l’animal, il se prive de la réflexion qui fait l’homme, et devient l’animal qui l’abhorre tant.

    J’aime à prendre comme l’exemple le droit des enfants, le CIDE créé par des adultes parce qu’il lui est impossible de se défendre seul, l’enfant possède 12 droits fondamentaux et ne soyons sérieux aucun vrais devoirs en contre-partie.
    leur droit n’est pas politique, mais d’être considéré comme vulnérables et requérir une protection de ceux qui le peuvent.
    Je trouve que la parallèle est intéressante surtout que l’animal n’en demande qu’un seul, La VIE. Le droit de vivre, de droit de vivre en paix et d’être protégé ….
    On peut se plaindre de la pénurie moral de nos sociétés sans commencer par le bas.

  2. L’homme est le seul animal qui tue pour tuer tous les autres animaux tuent pour manger ou se défendre .

  3. Il n’y a pas d’éco-anxiété dans notre société, arrêtez de dire ça, c’est ridicule.
    L’anxiété n’est pas par rapport à l’écologie, mais par rapport au politiquement correct.
    Regardez la consommation des gens sur les produits où ils ne sont pas encore contraints par la loi de jouer dans cette barrière douanière estampillée « écologique ».
    Les français s’en foutent de l’écologie, ils ne sont pas dupes!
    Par contre, dans cette société ou la compétence et l’intelligence ne valent plus rien et que le formatage vous ouvre toutes les portes (on crée carrément des emplois de cadres pour faire respecter la doxa dans les entreprises!), chacun cherche à afficher ses médailles de bien-pensance et de démagogie.
    Quand à l’antispécisme, il n’y a rien d’étonnant à voir fleurir cette idéologie à une époque où on refuse de reconnaître que certains monstres ont renoncé d’eux-mêmes à leur humanité.

  4. Je ne comprends pas le « parallèle douteux » évoqué dans cet article. Il est pourtant flagrant. Les migrations invasives des moustiques-tigres et des frelons asiatiques sont similaires à ce qui se passe en Europe chez les humains. Les frelons massacrent nos abeilles, détériorent nos vergers et n’ont pas de prédateurs en Europe. Le parallèle n’est pas douteux, il est patent !

  5. Je n’ai pas vu ce film et n’en ai pas envie.
    Néanmoins, une phrase de cet article me pose questions : « les animaux ne reconnaissent aucun droit ni devoir aux autres espèces », parce qu’elle est fausse. Tous les possesseurs de chiens,chats, chevaux, savent que ces animaux s’entraident mais aident aussi d’autres espèces dont les humains.
    Nous connaissons tous, je l’espère, les cas où des femelles animales prennent en charge des bébés d’une autre espèce lorsqu’ils sont orphelins, sous la garde paternelle des mâles.
    Et reconnaître cela n’est pas « antispéciste » , mais objectif.

  6. Les oiseaux migrateurs retournent chez eux à la saison de amours …Y a plus de saison , mon brave monsieur !

  7. Ben, si je me réfère aux travaux d’éminents savants, nous ne serions que des animaux un peu plus « évolués » que les autres, certains fait de l’actualité, me rend dubitatif sur la pertinence de cette affirmation.

    • Tout dépend de ce que vous entendez par « nous ».
      Nos « zélites » qui n’ont de cesse de parler des « lumières » oublient que d’après ces dernières, l’humanité n’était pas un état inné, mais quelque-chose qui venait avec l’instruction, les arts et la réflexion.
      Ils étaient parfaitement conscient que certains étaient homo sapiens sans être humains pour autant.
      C’est un point commun avec l’ancien testament, car dans la genèse, si la punition des premiers humains est d’être chassés du paradis, c’est pour aller vivre parmi les « autres ».
      Et bien voilà, c’est l’œuvre de ces « autres » qui fait l’actualité. Je ne leur reconnaît pas la moindre humanité, ni les droits ou la compassion qui vont avec.

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