[CINEMA] Le Roman de Jim, une ode à la paternité
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Cantonné aux petits boulots peu qualifiés, Aymeric (Karim Leklou) vivote paisiblement dans son Jura natal sans nourrir d’attente particulière à l’égard de l’existence. Un jour, pourtant, son chemin croise celui de Florence (Laetitia Dosch), une ancienne collègue de travail, enceinte et célibataire. Épris d’elle, Aymeric accepte sans la moindre hésitation d’assumer la paternité de l’enfant et de s’occuper de lui comme s’il s’agissait du sien. Aussitôt, le jeune couple emménage dans une maison perchée en montagne, un ancien gîte touristique épargné par le tumulte citadin.
Chargées de tendres souvenirs immortalisés par la passion d’Aymeric pour la photographie, les années défilent dans l’insouciance la plus totale. Jim a déjà sept ans lorsqu’un inconnu, Christophe, vient perturber la quiétude du foyer. En effet, cet ancien amant de Florence se montre désireux de faire connaissance avec l’enfant, son fils biologique… Réticent, craintif, mais néanmoins délicat, Aymeric laisse ce second père s’immiscer dans la vie familiale, puis finit par comprendre qu’il n’a plus sa place dans l’équation. S’ensuit alors une période douloureuse pour lui et pour Jim, séparés pour de bon le jour où Florence et Christophe décident de se remettre ensemble et de refaire leur vie au Canada avec l’enfant. Des années durant, Aymeric et Jim souffriront en silence de cette séparation, espérant chacun le retour de l’autre.
Prendre ses responsabilités
Adaptation du livre éponyme de Pierric Bailly, publié en mars 2021, Le Roman de Jim, réalisé par les frères Arnaud et Jean-Marie Larrieu, nous propose sur deux décennies une ode mélancolique et ouatée sur la paternité et l’amour filial. Débutant dans la légèreté et l’insouciance des années 90, le récit se fait plus grave à mesure que vieillissent et se responsabilisent les personnages, et prend le contrepied total des postulats idéologiques actuels selon lesquels la figure paternelle – voulue inopérante voire obsolète – ne serait qu’une variable d’ajustement dans l’éducation de l’enfant. Les auteurs, bien au contraire, célèbrent l’altérité parentale et expriment, à travers leur film, la difficulté d’être père, biologique ou non. Un père aimant, responsable, présent dans les moments-clés et qui jamais ne se dérobe à son devoir.
N’en déplaise à bon nombre de nos contemporains imprégnés de discours misandres véhiculés ad nauseam par les médias et l’université, Le Roman de Jim nous rappelle, accessoirement, que le père peut parfois se révéler plus fiable et plus scrupuleux que la mère. Un constat lucide, honnête, qui le rapproche de l’excellent Libero, réalisé par Kim Rossi Stuart en 2006. La séquence où, des années plus tard, la mère justifie auprès d’Aymeric les mensonges dont elle a abreuvé Jim durant son adolescence pour lui faire avaler la pilule du déménagement au Canada et la coupure de ponts définitive avec son père est un bijou d’écriture et de monstruosité morale.
Émouvant de bout en bout, quelquefois amusant, le film des frères Larrieu présente, il est vrai, quelques aspérités, notamment dans sa direction d’acteurs qui peut manquer de rigueur. Cependant, la force du propos et le jeu intériorisé de Karim Leklou, révélé au grand public avec BAC Nord, Pour la France et Vincent doit mourir, valent le détour.
4 étoiles sur 5
Un commentaire
Un beau film, je confirme.
J’ai hésité à le voir, craignant les poncifs habituels sur l’inclusion, les principes gnangnan de l’acceptation de l’autre et autres leçons de morale.
Un film lumineux avec des acteurs que je ne connaissais pas et qui brillent par leur naturel.
Sara Giraudeau apporte sa touche légère et peine de compréhension.