[Cinéma] Les Algues vertes, retour sur un scandale sanitaire

les algues vertes

Les gens de gauche font feu de tout bois en matière d’écologie. De leur côté, les gens de droite ont un peu trop tendance à dédaigner les questions liées à la préservation de la nature. Il y a ceux, parmi eux, qui réfutent en bloc l’existence d’un réchauffement climatique, et le font souvent sur un ton bravache, puis d’autres qui reconnaissent volontiers ce phénomène mais relèvent – à juste titre – que l’ensemble de la communauté scientifique, de par le monde, est loin d’être unanime sur ses causes. L’implication humaine n’ayant clairement pas été démontrée, ceux-là ont l’air de considérer finalement que c’est toute l’écologie qui est à mettre de côté. Si bien que lorsque des scandales sanitaires éclatent, la droite est pratiquement inaudible, tandis que la gauche, elle, n’hésite pas à s’exprimer, à produire des œuvres culturelles, livres, chansons et films, et convainc, in fine de nouveaux électeurs…

Après Rouge, sur les scandales liés à la gestion des déchets, et Goliath, sur les dangers des pesticides dans l’agriculture, Les Algues vertes aborde aujourd’hui le sujet de la pollution des eaux aux nitrates agricoles qui font proliférer chaque année sur les plages du Finistère-Nord des algues produisant naturellement de l’hydrogène sulfuré, lequel provoque régulièrement des accidents mortels. Au moins deux hommes, en effet, quatre potentiellement, auraient trouvé la mort depuis une trentaine d’années en respirant ces gaz, ainsi que plusieurs dizaines de bestiaux.

Tiré d’une enquête homonyme parue chez Delcourt sous forme de bande dessinée – écrite par la journaliste Inès Léraud et dessinée par Pierre Van Hove –, le film de Pierre Jolivet revient longuement sur ce phénomène préoccupant apparu au courant des années 1970, concomitamment à l’essor de l’agriculture intensive promue par nos élites politiques. Celles-ci désiraient hisser la France en tête du marché mondial de l’agroalimentaire et, pour ce faire, doper nos exploitations agricoles en termes de surfaces, d’équipements et d’engrais. Les mêmes engrais qui, entraînant une surproduction de nitrates aussitôt rejetés dans la mer avec les déjections animales, expliquent la prolifération d’algues marines au large de la Bretagne et les dangers que nous évoquions précédemment…

Autant dire que l’enquête menée par Inès Léraud – devenue pour les besoins de la fiction le personnage principal du récit – ne lui attire pas la sympathie des agriculteurs ni de la FNSEA, déjà pressurés par le marché mondial, qui voient en elle une ennemie à abattre. L’omerta, par ailleurs, ne s’arrête pas au monde paysan et concerne aussi bien nos élus, toujours prompts à faire de grandes déclarations publiques lorsque la presse s’empare du sujet à chaque nouveau décès, mais bien trop pusillanimes – François Fillon, Bruno Le Maire et Jean-Yves Le Drian semblent directement visés par le film. En vérité, à moins de renoncer définitivement au marché mondial et à l’agriculture intensive que celui-ci implique, on voit mal comment l’État pourrait efficacement endiguer le problème des algues vertes. La question qui se pose alors n’est-elle pas simplement celle de la poursuite (ou non) de la mondialisation et de la libre circulation des marchandises sur l’ensemble du globe ?

Malgré la présence au casting de Céline Sallette, le film de Jolivet n’a pas grand-chose à défendre sur le plan cinématographique, avec sa mise en scène minimaliste et ses dialogues souvent manichéens, mais reconnaissons-lui néanmoins le mérite de sensibiliser le public sur le dépérissement de notre belle Bretagne.

3 étoiles sur 5

 

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Ce problème des algues vertes est une des résultantes de la politique agricole menée par Edgar Pisani lorsu’il était ministre de l’agriculture ( 1961-1966 ) lorsque sommé par la PAC ( politique Agricole Commune ) il fallait augmenter à tous prix les rendements. Et maintenant que fait l’Europe? au nom des traités internationaux elle démantèle notre élevage, notre agriculture , réduisant nos paysans ( je ne parle pas des gros céréaliers entre autres ) à la misère quand ce n’est pas au suicide.

  2. Les algues vertes, il y en a toujours eu. Voilà encore un sujet de panique après l’eau, la couche d’ozone, les particules fines, leCO2, etc. STOP !

  3. les algues vertes de bretagne : un marronnier des journalistes depuis des années …….et bien sûr, rien n’a été fait malgré les promesses…… à l’époque on disait que c’était dû aux élevages intensifs de porcs

  4. 1- les algues vertes sont vraiment un problème ;
    2-le modèle agricole intensif a ses excès ;
    3-la réglementation des installations classées s’applique aux élevages industriels et les sanctions sont très lourdes ;
    4-tous les agriculteurs apprennent pendant leurs études( depuis au moins 50 ans) autant qu’en formation continue à faire des bilans de fumure et à vérifier la justification financière de leurs choix technico-économiques ;
    5-la pression indécente des donneurs d’ordre , Etat , acheteurs et consommateurs , ne permet pas à de nombreux agriculteurs de vivre normalement de leur métier ;
    6-quelle est la réalité du traitement des eaux des stations d’épuration ?
    7- en guise de conclusion le consommateur-citoyen peut positivement compter ses jours d’auto-production alimentaire plutôt que de s’indigner de l’épuisement des ressources et du comportement scandaleux de ces salauds de paysans dont je suis depuis 44 ans ! merci , y ‘a pas de quoi…

    • Ne vous faites pas de soucis, ceux qui débarquent en nombre dans notre pays ont un grand sens de l’écologie.
      Lorsqu’ils seront au pouvoir tout cela changera. Fini l’écologie et je sais de quoi je parle pour en subir les conséquences.
      Les guerres tribales, seront probablement de retour etc., et nous sommes plus de 8 milliards sur cette planète et le chiffre ne cesse d’augmenter, alors il faudra choisir, et je pense que le choix sera vite fait. Alors parlez comme le font les politiques sur des sujet qu’ils ne maitrisent nullement, qui le maitrise d’ailleurs actuellement dans ce pays ?
      Bon courage, et continuez votre travail comme vous le faites sérieusement, et n’écoutez pas ces idiots inutiles d’écolos !

  5. Il n’y a pas que le Finistère Nord : les sites les plus atteints se trouvent dans les Côtes d’Armor, là où il y a eu mort d’hommes et d’animaux.

  6. Pour permettre à des algues de se developper il faut une quantité equivalente de Ntrate de Phosphate et de Potasse .D’ou viennent ces 2 élements indispensables ???? .Des stations d’épuration tout simplement et il y a aussi du nitrate à la sortie .Si vous ne me croyez pas ,ayez le courage de publier les analyses minérales à la sortie de ces usines à CO2 et d’Amoniac .évidement les urbains sont plus nombreux que les paysants qui les nourrissent et la raison du plus fort est forcément la meilleure.Au fait il y a quoi dans les arrosoirs de fleurs qui dégueulent sur les trottoirs.

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