[CINÉMA] Maria, le déclin de la Callas : décevant

Capture d'écran
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Nous sommes en septembre 1977, à Paris. La cantatrice Maria Callas vient de s’éteindre dans son riche appartement de l’avenue Georges-Mandel, à proximité du Trocadéro. D’emblée, les choses sont posées : le récit dont nous allons être témoins connaîtra une issue tragique…

Sobrement intitulé Maria, le dernier film en date de Pablo Larraín, scénarisé par le prolifique Steven Knight (les feuilletons Peaky Blinders et Taboo), retrace les derniers jours d’une artiste sur son déclin. Une chanteuse de renommée internationale, qui a perdu sa voix au fil des ans, s’est murée dans la solitude quasi complète et ressasse désespérément, entre prises d’alcool et médicaments, ses souvenirs de gloire ainsi que sa relation sentimentale avec l’armateur Aristote Onassis… Consciente qu’elle ne remontera jamais sur scène, dépressive au dernier degré, sautant la plupart des repas, la Callas peut heureusement prendre appui sur ses domestiques, véritable famille de substitution : son majordome Ferrucio et sa cuisinière Bruna s’inquiètent tous deux de son état de santé et demeureront à ses côtés jusqu’à la fin.

Une prouesse pour Angelina Jolie

Après Neruda (2016), sur le célèbre poète chilien, Jackie (2017), sur la veuve du président Kennedy, et Spencer (2021), sur la princesse de Galles Diana, le réalisateur Pablo Larraín se lance, pour la quatrième fois, dans un film biographique et clôt, selon ses dires, son triptyque de « femmes qui ont bouleversé le XXe siècle ». Admettons…

Pour l’occasion, Larraín offre à Angelina Jolie un rôle particulièrement risqué dans la mesure où l’actrice américaine, non seulement n’a pas les traits typés de la beauté grecque Maria Callas, mais a pour lourde tâche de donner de la voix, parfois même devant un parterre de cinq cents figurants aux yeux rivés sur sa prestation. Courageuse, Angelina Jolie a accepté de relever le défi et travaillé, sept mois durant, avec plusieurs professeurs pour apprendre le chant, mais aussi l’histoire de l’opéra. Ces professionnels lui ont, entre autres, expliqué comment adopter une posture adéquate et maîtriser sa respiration et son accent.

Comme sur le récent Aznavour, les passages chantés ont nécessité l’usage d’un procédé ingénieux consistant à mixer la voix de la comédienne avec celle de Maria Callas ; pour un résultat confondant !

Une esthétique de papier glacé

Si l’investissement et la performance d’Angelina Jolie sont indéniables, les défauts du film tiennent principalement de l’admiration excessive qu’éprouve le cinéaste pour la cantatrice, et pour la célébrité en règle générale. Larrain se laisse complètement impressionner par son sujet. En atteste sa mise en scène pompière, qui semble à la fois inspirée des photos de Vogue, Gala, des publicités pour parfums ou du cinéma contemplatif de Terrence Malick. En somme, Pablo Larraín soigne une esthétique de papier glacé, froide, pour un récit un tantinet cafardeux nous vantant la nostalgie « de la grande époque » et des soirées mondaines où propos flagorneurs et superlatifs s’échangeaient lourdement autour d’une coupe de champagne. Maria Callas, tout au long du récit, répète à l’envi qu’elle veut être adulée ; on se contentera peut-être de réécouter ses enregistrements…

2,5 étoiles sur 5

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Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

8 commentaires

  1. j’ai vu et aimé : particulièrement la dimension de la Solitude des personnes qui ont été célèbres ; la richesse ne remplace pas cet état ( Coco Chanel) et il vous reste, en définitive, la fidélité de personnes humbles , au-delà des amitiés de salon, superficielles et intéressées ( dont la Famille n’est pas exempte).

  2. Merci pour ce compte-rendu cinématographique Monsieur Marcellesi. S’attaquer à la grande Maria Callas ce n’est pas tout à fait la même chose que s’attaquer à la Môme Piaf. Le choix est donc hautement périlleux. Le bel canto, porté par les divas, arbore une toute autre tenue par rapport au naturel que demande la simple variété. Ceci dit, cela n’enlève rien à l’interprétation de Marion Cotillard dans le rôle de la chanteuse française. Le chant classique dépasse largement celui ou celle qui pratique l’art lyrique. Il imprègne d’un souffle subtil et poétique tout artiste qui embrasse une carrière dans ce domaine que des années de travail viennent consolider. C’est pourquoi, je n’aurais pas choisi Angélina Jolie pour représenter Maria Callas. Celle-ci possédait un charisme que peu de personnes peuvent atteindre. Maintenant comme certains le diront, il est vrai que si la critique est aisée, l’art, lui, est difficile. Ce qui n’empêche pas, pour autant, de donner son avis surtout quand, en plus, on a quelques connaissances sur le sujet.

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