[Cinéma] The Alto Knights, une grande histoire de mafia traitée artificiellement

Robert De Niro dans un nouveau film sur la mafia… Un choix de casting évident ; trop, peut-être.
Car si l’on ajoute le nombre de gangsters fictifs qu’il a incarnés à l’écran au nombre de truands ayant réellement existé, tels Al Capone dans Les Incorruptibles, James Burke (Jimmy Conway) dans Les Affranchis et Frank Sheeran dans The Irishman, on peut dire que De Niro détient le record des rôles de mafieux au cinéma.
Et voilà qu’à plus de quatre-vingt ans, le comédien revient au genre avec The Alto Knights, de Barry Levinson, et se voit offrir pour l’occasion non pas un mais deux rôles de gangsters : ceux de Vito Genovese et de Frank Costello.
Deux pontes de la famille Luciano
Tiré de faits réels, le film nous montre comment ces deux anciens séides de Lucky Luciano, ayant fait leurs armes sous la prohibition, dans les années 1920, se déchirèrent, trente ans plus tard. En effet, lorsque Luciano fut incarcéré en 1936, le pouvoir aurait du normalement revenir à Vito Genovese, mais celui-ci s’enfuit en Italie en 1937 après avoir été dénoncé pour meurtre aux autorités. Frank Costello prit donc les rênes de la famille Luciano et renforça ses liens avec les institutions politiques, judiciaires et financières. Son règne pacifique, d’une vingtaine d’années, fut alors marqué par la prospérité et la tranquillité – Mario Puzo, auteur du Parrain, se serait d’ailleurs grandement inspiré de Frank Costello pour le personnage fictif de Vito Corleone (que Robert De Niro a incarné dans Le Parrain 2).
À son retour d’Italie, en 1946, Vito Genovese, écœuré par la prise de pouvoir de Frank Costello, fit des pieds et des mains pour récupérer la place qui lui revenait de droit, se lança dans le trafic d’héroïne contre l’avis de Luciano et de Costello et tenta de faire assassiner ce dernier, en 1957.
Le film de Barry Levinson prend précisément pour point de départ cette tentative ratée d’assassinat contre Costello et nous raconte comment ce dernier voulut fuir le conflit avec Genovese au point de lui laisser le pouvoir…
Intéressant d’un point de vue historique, The Alto Knights – du nom du bar que fréquentaient les deux gangsters dans leur jeunesse – bénéficie de l’expérience de son scénariste Nicholas Pileggi sur les thématiques mafieuses. Ce dernier fut notamment l’auteur de Wiseguy: Life in a Mafia Family et de Casino: Love and Honor in Las Vegas, deux bouquins que Martin Scorsese porta à l’écran au début des années 90, donnant respectivement Les Affranchis et Casino.
Un rendu artificiel malgré de sérieux atouts
Loin d’être aussi flamboyant que ses prédécesseurs dans sa mise en scène, le film de Levinson, hélas, manque singulièrement de souffle. Pourtant, le réalisateur a du talent, il nous l’a prouvé à maintes reprises avec Rain Man, Des hommes d’influence, Bandits et surtout avec son chef-d’œuvre Sleepers, dans lequel jouait déjà Robert De Niro.
Outre son échec à nous plonger véritablement dans l’univers des « Cinq familles » et à rendre compte de leur capacité de nuisance, la plus grande erreur de Barry Levinson est, sans conteste, d’avoir confié les deux rôles au même acteur, réduisant cet affrontement historique entre deux pontes de la mafia à un exercice de style lourdement excentrique dont la seule finalité est de rendre hommage au talent de De Niro. Désabusé, le spectateur passe son temps à traquer les nuances de maquillage, de prothèses nasales et de retouches numériques sur le physique du comédien – ce qui était déjà le défaut de The Irishman…
Le sujet du film méritait mieux que ce genre d’artifices.
2 étoiles sur 5
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Un commentaire
» Frank Costello prit donc les rênes de la famille Luciano et renforça ses liens avec les institutions politiques, judiciaires et financières. » Date historique où la mafia internationale a investi le pouvoir politique, d’abord aux USA, puis en Europe, et où elle sévit toujours.