[L’ÉTÉ BV] [CINÉMA] Une lumière crue sur le régime génocidaire des Khmers rouges

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À l'occasion de l'été, BV vous propose de redécouvrir des films mis en avant lors de leur sortie au cinéma. Aujourd'hui, Rendez-vous avec Pol Pot de Rithy Pan.

Révélé au grand public en 2003 avec son documentaire S21, la machine de mort khmère rouge, le cinéaste Rithy Panh a poursuivi tout au long de sa filmographie sa dénonciation du régime communiste cambodgien. On pense, notamment, à Duch, le maître des forges de l'enfer, en 2012, et à L’Image manquante, en 2013. Aujourd’hui, le réalisateur nous propose sur le même thème une fiction originale interrogeant le rôle des journalistes occidentaux et le traitement de l’information durant cette période trouble de l’Histoire du Cambodge.

Inspiré de When The War Was Over: Cambodia and the Khmer Rouge Revolution, ouvrage de la journaliste et correspondante de guerre américaine Elizabeth Becker, Rendez-vous avec Pol Pot revient sur les conséquences tragiques de la prise de pouvoir du dictateur en 1975. En effet, sur les 7 millions d’habitants que comptait, à l’époque, le Cambodge – rebaptisé « Kampuchéa démocratique » –, on estime que plus de 3.300.000 ont disparu ou ont été exécutés par les Khmers rouges dans les quatre ans qui ont suivi. Un bilan dramatique causé en grande partie par la collectivisation des rizières, laquelle a entraîné une chute drastique de la production et une famine générale…

Les journalistes enamourés de révolution

À l’époque, la presse française avait les yeux de Chimène pour Pol Pot. Lorsque Phnom Penh fut prise, le 17 avril 1975, et vidée de ses habitants (2 à 3 millions de personnes…), Patrice Beer célébra, dans Le Monde, « l’enthousiasme populaire » ; « la ville est libérée », écrivit-il alors. Le Nouvel Observateur, quant à lui, évoqua une « audacieuse transfusion de peuple » dans les campagnes… Si la plupart de ces journalistes, des années plus tard, finirent par faire leur mea culpa, les grands médias auxquels ils participèrent continuent néanmoins, de nos jours, de dispenser leurs leçons de morale sur à peu près tous les sujets, alors même que l’Histoire les a condamnés.

Le film de Rithy Panh, précisément, se concentre sur ces journalistes et intellectuels qui faisaient la pluie et le beau temps dans la presse française. Le récit suit une reporter, un photographe et un universitaire soixante-huitard d’obédience maoïste et sympathisant de la révolution, venus s’entretenir avec Pol Pot. Sur place, nos trois compatriotes sont surveillés de près, enfermés le soir dans leurs chambres et baladés d’un « village Potemkine » à un autre par leur guide. Peu à peu, ceux qui se montraient plein d’indulgence envers les « avancées » du régime et sa culture de la table rase – la « cancel culture » ne date pas d’aujourd’hui mais trouve directement sa source dans l’idéologie révolutionnaire – prennent conscience que l’environnement idyllique qu’on leur présente cache des réalités moins reluisantes. Et lorsqu’ils cherchent à en savoir davantage, nos trois personnages se heurtent à un mur, voient leurs guides (geôliers ?) hausser le ton et devenir soudainement menaçants… Certains paieront cher leur quête de la vérité.

Glaçant, jusque dans son face-à-face final entre Pol Pot et l’intellectuel universitaire, le film de Rithy Panh bénéficie, comme à l’accoutumée, d’une mise en scène inventive, héritière du cinéma de Chris Marker, à base de surimpressions, d’images d’archives, de maquettes et de collages. Une approche adéquate pour illustrer l’idée de l’indicible et de l’inmontrable. La violence du régime reste hors champ, tout comme la vérité, ce qui ne la rend que plus saisissante.

4 étoiles sur 5

https://www.youtube.com/watch?v=LzJCnxiMEFQ

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 22/07/2024 à 12:43.
Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

10 commentaires

  1. Inutile de convier Mélenchon à le voir, il connaît par cœur, d’autant qu’il reflète exactement son programme de gouvernement. A cela près qu’il n’a pas prévu que les Islamistes ne sont pas cambodgiens et qu’il sera un des premiers égorgés dès leur accession au pouvoir.

  2. Le thuriféraire de ce massacre ? Le quotidien Le Monde. Relire ses articles dithyrambiques meme si André Fontaine, son directeur à l’époque a reconnu mais un peu tard que « nous nous étions trompés ».

  3. Pol Pot… Ce monstre fut hébergé et formé en France où il devint membre du PCF et ami de Jacques Duclos et de Jacques Vergès. La France dont une des spécialités est d’héberger des dictateurs et dont l’aile gauche n’a pas honte de donner des leçons à la terre entière contre le « danger de la montée de l’extrême droite »… À vomir…

    • on peut faire bonne mesure dans l Hébergement amical :
      -Amin El Hussein adresse Villa Marguerite à St Maur exfiltré au Liban après avoir échappé grâce à Bidault !!! au Procès de Nuremberg ou l attendait TITO!
      -Mohamed El Maadi Cagoulard antijuif patron de la BNA
      bien connue des Habitants de Mussidan juin 44 ! parti rejoindre Husseini !
      Khomeini dans son Château de Neaufle , protégé par Valéry Destaing de Giscariaote !
      Batistti protegé Miterrandien qui s est bien foutu de l Aristocratie intellectuelle pleonasme !! en revendiquant ses assassinats et sa duplicité !!
      Melanchon devrait se poser des questions sur son avenir avec des Alliés !

  4. J’ai vu le film. Mon épouse est d’origine cambodgienne et me dit que c’est assez proche de la réalité.

  5. Je ne vois dans l’histoire aucun massacre comparable perpétré par la droite attendu que Hitler était d’une gauche non collectiviste

    • Qu’en pense monsieur Roussel et son PCF obligé de pactiser avec le diable LFI pour exister.

  6. Le nouveau front populaire qui comme autrefois avec les mêmes glorifiaient le régime des Khmers rouges .
    Ne vous trompez pas avec ces gens si ils arrivent au pouvoir en France demain ils reproduiront le même massacre .

Commentaires fermés.

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