CNews face à l’Arcom : vers un contrôle de la « variété des sujets » ?

CNEWS

Cinq mois se sont écoulés depuis la décision historique du Conseil d’État sur le respect du pluralisme dans les médias. À l’époque, suite à un recours de l’association Reporters sans frontières qui dénonçait l’inaction de l’Arcom vis-à-vis de CNews, les sages du Palais-Royal demandaient au gendarme de l’audiovisuel de mieux contrôler le respect des exigences de pluralisme sur les chaînes de télévision et sur les stations de radio. Le Conseil d’État ne limitait alors plus le respect du pluralisme au décompte des temps de parole des personnalités politiques, mais entendait élargir le contrôle en prenant en compte « l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités ». Une décision qui avait suscité un tollé au sein de nombreuses rédactions françaises… Cinq mois plus tard, donc, dans le délai imparti par le Conseil d’État, l’Arcom vient de rendre publique, ce 17 juillet, sa délibération « relative au respect du pluralisme des courants de pensée et d’opinion par les éditeurs de service ». Un guide pour mettre en pratique cette nouvelle interprétation de la loi de 1986 sur la liberté de communication, au regard des exigences du Conseil d’État.

Prendre en compte la « variété des sujets »

En préambule, le gendarme de l’audiovisuel rappelle que « les éditeurs sont seuls responsables du choix des thèmes abordés sur les antennes et des intervenants » et « que les dispositions de la présente délibération ne sauraient être considérées comme conduisant à la qualification ou au classement de l'ensemble des intervenants à l'antenne au regard des courants de pensée ou des différentes sensibilités ». Pourtant, s’il « n’est pas question de ficher ni d’étiqueter les intervenants en télé ou radio », les quatre articles de la délibération laissent tout de même entendre que l’Arcom pourrait avoir un droit de regard sur la ligne éditoriale des chaînes et stations de l’audiovisuel. En effet, désormais, dans son appréciation du respect du pluralisme de l'expression des courants de pensée et d’opinion, l’autorité de régulation tiendra compte a posteriori « de la variété des sujets ou thématiques abordés à l’antenne », de « la diversité des intervenants dans les programmes » et de « l’expression d’une pluralité de points de vue dans l’évocation des sujets abordés ». Autrement dit, pas de fichage mais bel et bien un contrôle sur la « diversité » des profils des chroniqueurs et journalistes invités à l’antenne. Ce contrôle se fera, sur saisine, de manière trimestrielle pour les chaînes et stations généralistes et tous les mois pour les chaînes d’information. L’objectif : sanctionner les chaînes et stations sur lesquelles l’Arcom constate « un déséquilibre manifeste et durable ».

Reporters sans frontières, à l’origine de cette décision, a salué une « délibération salutaire bien que tardive et lacunaire ». L’ONG se réjouit que, désormais, l’Arcom « regarde non seulement qui parle mais de quel sujet on parle et comment on en parle à l’antenne ». « Cette délibération devra, à l’avenir, permettre de sanctionner les éditeurs qui contournent leurs obligations de pluralisme […], réduisent leurs programmes à une succession de commentaires à l’unisson sur des thèmes ressassés », ajoute l'organisation.

Un contrôle éditorial ?

Roch-Olivier Maistre assure que « cette délibération affirme d’emblée la volonté du régulateur de préserver la liberté éditoriale des chaînes ». Mais au contraire, certains voient dans la décision de l’Arcom une volonté de s’immiscer dans le contrôle éditorial des chaînes ou stations. Éric Revel, journaliste, ancien directeur général de LCI et de France Bleu, commente ainsi : « L’Arcom annonce qu'elle pourra désormais sanctionner tout "déséquilibre manifeste et durable" dans les opinions en se basant sur "le choix des sujets", par exemple… Cela signifie que l’Arcom choisira la ligne éditoriale d’un média ! »

En cas de contrôle, les chaînes pourront se défendre en fournissant aux sages des données sur la diversité des intervenants, des sujets abordés et des points de vue. En réalité, comme l’avait d’ailleurs indiqué Roch-Olivier Maistre, CNews respecte déjà, malgré le boycott d’une partie de la gauche et de l’extrême gauche, ces exigences de pluralité. La décision pourrait finalement se retourner contre d’autres chaînes et stations où le pluralisme des points de vue n’est pas toujours respecté…

Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

62 commentaires

  1. Comme pour la consommation d’alcool ils devraient mettre une ligne signifiant que l’absence de diversité nuit gravement à la liberté d’expression.

  2. BFM-TV, LCI, France télévisions peuvent dormir sur leurs deux oreilles, car ces chaînes ne risquent rien : place à la dictature du mensonge, de la déstructuration de la société, de l’incompétence et de la soumission aux élites (soi-disant) mal pensantes.

  3. voilà encore bien un  » machin » qui coûte un pognon de dingue, et je refuse pour ma part d’y associer le mot de  » sages » qui la compose, quand on fait un sale boulot qui ne sert que la propagande alentour, à mes yeux il n’y a qu’une insupportable perversité.

  4. Mais pourquoi donc obliger des chaînes privées à doser ces sujets de façon obligatoire pour toutes ?
    Elles doivent pouvoir présenter les sujets qu’elles veulent. Par exemple, il y a des librairies spécialisées, c’est parfaitement normal, personne n’aurait l’idée d’imposer à toutes les librairies de présenter une vitrine diversifiée. Le peuple, en choisissant les chaînes qu’il regarde, décidera de leur prospérité ou de leur déclin. Ca s’appelle la démocratie.
    Une seule chaîne publique (pas la peine qu’il y en ait plus) assurera une répartition de principe, ça suffira largement.

  5. C’est reporters sans frontières qui dictera les textes des intervenants sur CNews sous les indications de l’Arcom encore la démocratie à la Française. Vue le nombre actuel de téléspectateurs qui suivent cette chaine étonnant que l’Arcom garde cette attitude antidémocratique.

  6. Nous ne sommes plus dans les années de l’ORTF. Les auditeurs ont à leur disposition une myriade de chaînes de télévision et de radios. Je regarde souvent C News, mais il m’arrive aussi de regarder LCI ou BFM, et même La Cinq, et d’autres pour leur programmation à certains moments. Il n’y a rien qui empêche les gens de changer de chaîne s’ils ne sont pas contents de ce qu’ils entendent ou voient, sauf s’ils sont masochistes ou s’ils veulent nous conduire vers un avenir totalitaire, ce qui semble être de plus en plus le cas. La même information, la même tenue, la même nourriture, et surtout la même idéologie, en contradiction, une de plus, avec cette diversité d’opinions qu’ils prônent, le tout avec passivité, voire une complicité mortifère de certains Français. Cela est affligeant !

  7. arcom la nouvelle stasi bienvenue dans la dictature stalinienne , attendez de voir de quoi les gauchistes sont capable , leurs pouvoirs de nuisance de sectarisme de mauvaise foi et de totalitarisme sont infini

  8. Autant recréer une télévision d’Etat. Une sorte de Pravda, où chaque sujet devrait avoir l’assentiment d’un polit bureau pour être débattu. L’idée fait son chemin.

  9. Le Conseil d’État a bien fière allure, lui qui prône le pluralisme dans les médias, il est bien silencieux pour ce qui est du pluralisme à l’assemblée nationale.

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