CNews, immigration, Génération identitaire : le Conseil d’État en pleine dérive

Pascal Praud

« L’Arcom doit veiller à ce que les chaînes assurent […] l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinions en tenant compte des interventions de l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités. » Depuis maintenant 48 heures, la décision historique du Conseil d’État, saisi par Reporters sans frontières, qui intime au régulateur des médias de mieux contrôler CNews est sous le feu des critiques. Si certains, notamment à gauche du spectre politique, se réjouissent de voir la liberté du canal 16 de la TNT menacée, d’autres, plus nombreux, s’inquiètent des possibles dérives d’une telle jurisprudence. Journalistes, chroniqueurs de télévision, juristes, politiques et simples anonymes élèvent la voix pour dénoncer une restriction de la liberté d’expression, et notamment de la liberté de la presse.

Vers une censure ?

En réclamant le décompte des temps de parole des politiques, mais également celui des journalistes et invités de CNews, le Conseil d’État remet ainsi en cause la loi de 1986 sur la liberté de communication. En effet, comme le souligne avec justesse Jean-Éric Schoettl, ancien directeur général du CSA (devenu l’Arcom), dans les colonnes du Figaro, jusqu’à ce 13 février, « il a toujours été admis que chaque antenne privée a sa couleur propre ». C’est d’ailleurs au nom de cette ligne éditoriale propre que Roch-Olivier Maistre, patron de l’Arcom, avait considéré, en février 2023, que CNews « respectait strictement le pluralisme politique ». En décembre encore, devant les députés, il répétait : « La loi ne prévoit en aucune façon la comptabilisation du temps de parole des éditorialistes. Je ne connais pas une seule démocratie qui demande aux médias de communiquer à un régulateur la liste de leurs éditorialistes. » Mais deux mois plus tard, le Conseil d’État donne une tout autre interprétation de la loi qui inquiète de nombreuses rédactions. « Sommes-nous en train de réinventer une forme de ministère de la Vérité ? » s’alarme le directeur du Point. « Chaque invité ou journaliste devra-t-il produire son bulletin de vote avant de rentrer sur le plateau de CNews ? » s’interroge Gabrielle Cluzel, directrice de la rédaction de BV.

Un Ouzbek radicalisé rapatrié 

Cette décision inédite du Conseil d’État sur CNews révèle surtout la dérive de l’institution. Au-delà de la question des médias, la plus haute juridiction administrative du pays déserte sa mission première dans de nombreux domaines. Sur les questions migratoires tout d’abord, les sages du Palais-Royal défendent une vision très immigrationniste, parfois même aux dépens de la sécurité des Français. Récemment, ainsi, le Conseil d’État a contraint la France à rapatrier un Ouzbek radicalisé, expulsé par le ministère de l’Intérieur quelques jours plus tôt. Cet homme, âgé de 39 ans, considéré comme « dangereux » par les services de renseignement et visé par une interdiction administrative du territoire français pour menaces graves à l’ordre public, avait été débouté du droit d’asile. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), saisie sur son dossier, avait alors demandé à la France de suspendre son expulsion car il risquerait des « traitements inhumains et dégradants » dans son pays d’origine. Un risque non avéré, comme l’ont montré de nombreux experts, mais qui motive tout de même le Conseil d’État à enjoindre la France à « prendre dans les meilleurs délais toutes les mesures utiles afin de permettre le retour, aux frais de l’État, de l’intéressé en France ».

Inutile d’aller chercher bien loin les causes de cette dérive. Au sein du Conseil d’État, outre Didier-Roland Tabuteau, vice-président, marqué très à gauche du fait de son parcours au sein de cabinets politiques sous Mitterrand puis Jospin, on trouve également Thierry Tuot, nommé en mars, un immigrationniste notoire.

On peut ajouter à ces dérives la dissolution manquée des Soulèvements de la Terre. Après les violences contre les forces de l’ordre et les dégradations infligées aux agriculteurs, Gérald Darmanin avait promis la dissolution du mouvement écologiste. Mais le Conseil d’État, après l’avoir suspendu, a finalement annulé cette dissolution, considérant que « si des provocations sont imputables aux Soulèvements de la Terre et ont pu effectivement conduire à des dégradations matérielles, il apparaît toutefois que la dissolution ne peut être regardée comme une mesure adaptée ». Une mansuétude dont n’a pas bénéficié Génération identitaire…. Et que dire des déboulonnages des statues de saint Michel aux Sables-d’Olonne et de la Vierge à l’île de Ré ? Contre l’Histoire et l’âme de la France, et surtout contre l’avis des populations locales, le Conseil d’État avait pris le parti des laïcards pour demander le déplacement de ces statues hors de l’espace public. Cette liste (non exhaustive) des dérives du Conseil d’État suggère bel et bien que la plus haute juridiction administrative du pays, malgré quelques avis lucides (notamment sur la question des abayas), est noyautée par l’idéologie progressiste.

Picture of Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Noyauté, le Conseil d’Etat, certes mais comme la plupart des institutions de notre pays par une gauche qui se moque éperdument de l’opinion publique ! Minoritaire, mais intouchable! Cherchons l’erreur…

  2. En référence au titre de cet article, il n’est pas certain que le Conseil d’Etat soit en pleine dérive lorsqu’il outrepasse ses fonctions de la façon que l’on voit.
    Il est même probable qu’il sache précisément ce qu’il fait, pour le compte de qui il le fait, et quel intérêt il a à le faire.
    D’ où une question qui ne va pas tarder à se poser avec acuité aux lecteurs : Comment assurer la protection des journalistes et la pérennité des médias qui mettent encore un point d’honneur à respecter le pluralisme de l’information ?
    Avec mes compliments à madame de Longraye.

  3. Le Conseil d’Etat, comme son nom l’indique, est un conseil, pas un pouvoir ni une autorité. Rien n’oblige le pouvoir exécutif (seul en charge) à suivre ses conseils.

  4. Il n’est de peuple plus aveugle donc dangereux que celui maintenu dans l’ignorance.
    Merci donc à C News pour son travail d’information basé sur des faits, rien que des faits.
    Les faits ne sont ni de droite ni de gauche, ils sont des faits un point c’est tout.
    Que le Conseil d’État retourne à sa mission première dont il semble vouloir s’éloigner.

  5. Par pitié, s’il vous plaît, arrêtez d’appeler ces ramassis de gauchistes des « sages » (souvent en plus avec S majuscule). Ça fait vraiment mal.

    • D’ailleurs, comme ils ne font que se mettre au niveau d’autres pays qu’ils nous présentent comme des dictatures, il me semble qu’il y a une erreur dans la première voyelle du mot « sages »

    • Ils n’ont de « sages » que le nom, ce sont des traîtres sans honneur à la solde d’un dictateur qui les a placé là pour obtenir leur aval à chaque fois qu’il en a besoin.

  6. Le problème du conseil d’état c’est leur âge cannonique, débranchés de la réalité . Ils n’ont aucun jugement propre. Tous sont redevables de leur nomination à un politique qui leur dicte ce qu’ils sont censés dire c’est tout et c’est lamentable.

  7. Conseil d’ETAT, Cour des Comptes , Conseil Constitutionnel dirigés par qui ? Le parti socialiste !qui aux dernières élections 1,75%. Bravo ! Elle est belle la FRANCE !

  8. Ne conviendrait-il pas de contrôler au sein de l’ARCOM et du Conseil d’Etat la totale parité politique de ses membres?
    Après tout, tant qu’on est dans le soupçon…

  9. Et le plus amusant dans l’histoire c’est que les journaux et les chaines de gauche vont étre obliger d’avoir des interlocuteurs de droite,j’ai lu ils racolent et demandent à certains journalistes dont vous connaissaient les noms,des sommes folles pour une heures ou un papier dans leur canards ou leur chaines pour étre dans les clous,incroyable.

  10. « Le Conseil d’Etat noyauté par l’idéologie progressiste «  Un fois lâché tout ça qu’est ce qu’on fait ? Un référendum d’initiative populaire pour refondre le Conseil d’Etat via une réforme de la constitution ? Une chose est sûre on ne peut pas laisser les choses à ce point compte tenu des autres prises de position de cet organisme qui s’affranchit de la souveraineté du peuple français.

  11. Le conseil d’état dirigé par une clique de gauchistes faut donc pas s’étonner de toutes ces décisions par ces d’illumines

  12. Quelle est donc cette folie auto-mutilatrice qui a atteint tous ces soi-disant « sages » ?
    Ces gens-là ont-ils des enfants, voire petits-enfants si turbulents pour vouloir leur laisser une dictature en héritage ?
    Les mêmes décideront-ils qu’il faut reporter sine die les prochaines élections, arguant que l’UE fait bien le job elle-même ?
    Au fous !

  13. On pourrait suggérer à Darmanin d’engager une procédure de dissolution du conseil d’état aux motifs:
    – atteinte a la sécurité des Français
    – entrisme d’extreme gauche
    – non respect de la loi
    – atteinte manifeste a la liberté d’expression
    – …

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