Colonisation : la faute d’Emmanuel Macron
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Sans doute M. Macron ne mesure pas le ridicule qui consiste, pour un dirigeant politique né en 1977, c’est-à-dire après la fin de la décolonisation, à porter un jugement sur un phénomène historique constant et universel. C’est une illusion rétrospective que d’utiliser une machine imaginaire à remonter le temps pour juger le passé avec les préjugés du présent. Cette posture est intellectuellement malhonnête, ce qui n’est pas étonnant venant de ce personnage, mais elle est aussi stupide et odieuse.
Personne ne peut réécrire l’Histoire. Il faut tenter de la comprendre, et parfois de condamner les actes commis par des dirigeants lorsque ceux-ci sont précis et identifiables. Les génocides les plus récents, ceux des Juifs par le nazisme, des Arméniens par les Jeunes Turcs, ou encore l’Holodomor des Ukrainiens par Staline appartiennent à ces faits qui auraient pu ne pas se produire parce qu’on ne les aurait pas décidés. De même le génocide des Vendéens par la Révolution a été plus qu’une faute : un crime ! Lorsque notre fanfaron national dit que le colonialisme a été une faute, il vise, au contraire, un phénomène historique qui n’a nullement été limité à la France du XIXe siècle en Afrique. Faut-il rappeler que notre pays doit beaucoup à la colonisation de la Gaule par Rome, qui nous a apporté la plus grande part de notre civilisation ? Des colonies grecques comme Marseille jusqu’aux États-Unis, une colonie et le plus puissant État du monde, la colonisation et l’invasion ont été les grands moteurs de l’Histoire avec leurs aspects positifs ou négatifs pour les peuples concernés.
Il est absurde ou hypocrite de faire de la morale sur le sujet. Dès que les nations européennes eurent conquis les moyens intellectuels, techniques, militaires, et bien sûr maritimes, de dominer le monde, elles ont entrepris cette grande aventure. Venise se contentait de coloniser les côtes de l’Adriatique. Le Portugal et l’Espagne se sont lancés à la conquête du monde et, faut-il le rappeler, parce que ces deux nations s’étaient libérées de la « colonisation » musulmane débutée, elle, par une invasion. Ensuite, les autres ont suivi, l’Angleterre, les Pays-Bas, la France. Puis d’autres encore, plus tardivement et plus modestement.
Des fautes ont sans doute été commises durant ce vaste mouvement, imputables à la rapacité et à la cruauté de certains des hommes qui y ont concouru, mais on ne peut pas plus condamner un phénomène de cette ampleur qu’un phénomène naturel. Nous subissons depuis quelques décennies, en Occident, le culte de la repentance et le devoir de l’autoflagellation. Que le président de « notre » République s’y adonne est une trahison de sa fonction. La France a connu deux vagues de colonisation, la première sous la monarchie, stoppée par la Révolution et l’Empire, en raison de la faiblesse de leurs moyens maritimes et non pour des motifs moraux, puis la seconde au XIXe siècle. Face au gigantesque Empire britannique, et à sa cohérence, notre pays a collectionné des territoires dont la plupart ne possédaient de celui-ci ni la richesse, ni la population, ni les capacités d’accueil d’un excédent démographique que la France ne possédait plus d’ailleurs. On peut donc penser que la colonisation française n’a pas été une bonne affaire, comme Jacques Marseille l’a démontré. Mais ce jugement n’a rien de moral. Jules Ferry ou Léon Blum justifiaient l’entreprise par l’impératif de civiliser les peuples qui l’étaient moins. Cet objectif généreux a en partie été atteint. Le meilleur exemple en est l’épopée médicale des Français, de l’Algérie à l’Indochine en passant par Madagascar et le golfe de Guinée. Il est insultant et odieux pour les médecins français qui ont voué leur vie à la lutte contre les maladies endémiques d’employer le mot de « faute ».
C’est une faute lourde pour un chef d’État que de faire d’un motif de fierté de la nation qui l’a placé à sa tête un objet de réprobation.
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