Comment évoquer l’Ukraine sans l’Holodomor ? Non, le communisme n’est pas « sympa », même quand il aime la viande

Peut-être parce que la gauche et ses médias préfèrent que l'on reste discret sur le sujet, on fait l’impasse sur l’Holodomor - « extermination par la faim », en ukrainien -, décidée en 1932 et 1933 par Staline
Mémorial d'Holodomor
Mémorial d'Holodomor

Depuis des jours, sur les plateaux télé, on disserte à l’infini de l'Ukraine et des velléités bellicistes russes. On évoque la façon dont ces deux peuples sont mêlés, tant par le sang que par l’Histoire. Soljenytsine, qui en savait quelque chose par ses origines, l’a lui même souvent rappelé. Et lorsque, pour la première fois, Emmanuel Macron et Vladimir Poutine se sont rencontrés dans la galerie des Batailles du château de Versailles, en 2017, ils ont fait assaut de civilité pour montrer les liens qui unissent la Russie à la France. Emmanuel Macron a évoqué la visite de Pierre le Grand au petit Louis XV, quand Vladimir Poutine a rendu hommage à… Anne de Kiev, épouse du roi des Francs Henri Ier.

Dans cette analyse, curieusement - peut-être parce que la gauche et ses médias préfèrent que l'on reste discret sur le sujet -, on fait l’impasse sur l’Holodomor - « extermination par la faim », en ukrainien -, décidée en 1932 et 1933 par Staline. Le souvenir terrible de ses 2,5 à 5 millions de morts (selon les historiens) déchire les peuples russe et ukrainien, et les sépare bien plus sûrement qu’une frontière.

Réputée grenier de l’Europe, l’Ukraine, essentiellement peuplée de paysans, était plutôt prospère. Mais pour s’industrialiser, l’URSS devait importer des machines-outils. Pour financer cette importation, Staline décida d’exporter massivement des céréales d’Ukraine. Et durant l’hiver 1932-1933 - glacial -, la famine fit rage. « On mangeait les chevaux, les chiens, les chats, les racines des plantes, puis les enfants […] L’Ukraine devint un mouroir à ciel ouvert » (GEO). Les paysans se rebellèrent et la répression fut sanglante. On leur prit jusqu’aux semences, tuant tout espoir de récolte l’année suivante. « Pendant tout ce temps, l’URSS, elle, n’a jamais cessé d’exporter par millions de tonnes les céréales ukrainiennes… »

L’Ombre de Staline (2019), film polonais assez méconnu, a tenté de rendre justice à un lanceur d’alerte, le journaliste britannique Gareth Jones. Arrêté, menacé puis chassé d'URSS, il rapporta ce qu’il avait vu à Londres. Le moins que l’on puisse dire est qu’il fut accueilli tièdement. Il fut même accusé d’affabulation - on dirait aujourd’hui de « fake news » - par le correspondant du New York Times à Moscou. Côté français, le président (radical) du Conseil, Édouard Herriot, visita l’Ukraine en août 1933 comme un village Potemkine. Il n’y vit que du feu : « J’ai traversé l’Ukraine. Eh bien je vous affirme que je l’ai vue tel un jardin en plein rendement. On assure, dites-vous, que cette contrée vit à cette heure une époque attristée […] Or je n’ai constaté que la prospérité » (Entretien dans Le Nouvelliste).

Les journaux de gauche, pendant ce temps, niaient en bloc avec indignation. Ainsi, selon L’Humanité, « la presse blanche […] est pleine de ses “abominations bolcheviques” reprises par les journaux bourgeois de tous les pays. […] Mais sur la terre soviétique, les faits répondent d'eux-mêmes à ces ignobles attaques conjuguées contre l'État ouvrier. La “famine” n'existe nulle part et les conditions de la population entière vont encore être améliorées à la suite de l'admirable récolte de blé qui s'engrange en ce moment dans les camps socialiste (sic). » Des médias de l'autre camp, comme L'Action française, tentèrent de monter au créneau mais ne furent pas entendus. Quarante ans plus tard, la publication de L’Archipel du Goulag, d’Alexandre Soljenitsyne, mettait en lumière l’Holodomor, qui sera reconnu en 2008 comme crime contre l’humanité par le Parlement européen.

De ce triste rappel, tirons trois leçons, franco-françaises celles-là : on ne devrait pas croire sur parole la gauche quand elle nous accable de son magister moral qui prétend traquer les « fake news ». Certains médias comme L’Humanité, toujours subventionnés, devraient se cacher de honte. Quant au candidat Fabien Roussel, qu’il semble plus raisonnable que ses comparses ne fait pas de lui un communiste sympa car, disons-le tout de go, le communisme n’est pas sympa.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

51 commentaires

  1. De l’Espagne de Franco au Chili de Pinochet, en passant par votre ami Petain et les « détails de l’histoire », l’extrême-droite non plus n’est pas « sympa »

  2. Excellent et merci Mme Cluzel de nous rappeler cette ignoble horreur du communisme. Et l’héritier du communisme en France (Roussel) et du pacte Hitler-Staline voudrait interdire la candidature de Zemmour alors que c’est la sienne qui devrait l’être. Comment accepte-t-on cela après Mao et Pol Pot ?

    • L’endoctrinement couplé à un effondrement du niveau intellectuel pourrait peut-être figurer au tableau des acceptations.

      • Pas faux, un peu comme les zélateurs du « vax » (qui n’en est pas un, de vaccin), mais pour certains un comportement hypnotique quasi religieux. Un Endoctrinement largement dû à l’abandon du culturel et surtout de (l’éducation nationale) aux mains de la Gauche et de l’extrême gauche par le pouvoir Gaulliste. j’en suis désolé, mais c’est la vérité. Cordialement.

  3. Le Communisme n’est pas sympa ? Heureusement qu’il a été défendu par la presse française unanyme depuis les années 30, avant même qu’elle soit stipendiée par la politique mitterrandienne . Sans elle, aurait-il vécu ?

  4. Et dire que dans ce 21ème siècle qui commence nous avons encore, en France, des Fabien Roussel, ou encore Nathalie Artaud qui se présentent à la présidentielle avec l’utopie de nous faire revivre « les jours heureux staliniens !!

    • Et ces gens là ont facilement leurs parrainages (Artaud en à le double que Zemmour et même plus que Mélenchon à ce jour)

  5. Vous savez tous pourquoi à l’époque l’Humanité était vendue plus cher que la Pravda: les droits de traduction.

  6. La vraie question est aussi celle de se demander pourquoi il y a autant de communistes en France. C’était déjà un problème de migrants quand après la dernière guerre quelques pays Européens ont « viré » les communistes de leur pays pour aller ou ? devinez en France..
    Au fil des années de nombreux communistes Français sont partis au PS pour ne pas payer ce que le PC réclamait parmi lesquels beaucoup de politiques, la politique qui a toujours été un des refuge des fainéants et de l’argent facile.

  7. Vous avez bien raison de l’écrire Madame Cluzel  » le communisme n’est pas sympa !  »
    Il est fou de penser que dans les années 50/60 des instituteurs de l’école républicaine faisaient dans le sud-ouest l’apologie des bienfaits de l’URSS et forcément du modèle politique Stalinien, incroyable d’expliquer aujourd’hui cette dérive sectaire.

    • Le communisme pas sympa ! Mais le capitalisme lui ??? C’est en gros Un milliard de capitalistes,Sept milliards d’exploités, dont cinq dans une misère sans espoir !

      • La force du capitalisme ,c’est qu’il fait rêver .Je me souviendrais toujours de ce Groupe de Rock Polonais autorisé à venir faire une tournée en FRANCE ,et qui avait une bande pare soleil de cigarettes Américaine . L’effondrement du Communisme en URSS et dans les pays satellites, doit beaucoup à cette impossibilité d’un ailleurs que symbolise le système capitaliste .Monstrueuse idéologie qui il est vrai n’a aucun respect de la vie comme l’idéologie communiste .

  8. « L’ombre de Staline », un chef-d’œuvre, pas si méconnu que cela (Mr Jones, en VO).

    On y saisit toute l’ampleur de ce génocide orchestré et la volonté de ce journaliste d’en faire état, au péril même de sa vie.

    Le communisme ? Il n’y a plus que des pantins comme Roussel ou Mélanchon pour y croire encore. Plus exactement pour y faire croire.

    • Il faut se méfier des morts vivants, l’immonde fait partie de l’être humain et ce que nous vivons actuellement n’en est peut-être que le funeste rappel.

    • La doctrine communiste à la base est humaniste tout comme le christianisme est humaniste, est pourtant tant de crimes ont été commis à leurs noms. Ce ne sont pas les doctrines qui sont mauvaises ce sont les homme! Et nous ne parlerons pas ici des joies du Capitalisme tout prêt à faire « crever » la moitié de l’humanité pour se distribuer des dividendes!

  9. En effet, par exemple , je n’ai pas l’impression que le régime communiste chinois tout comme le régime islamiste soient des régimes « des jours heureux »

  10. Chère madame Cluzel, ce que vous décrivez est le parfait reflet de ce qu’est le communisme et ces mutants, (référence au tout dernier livre de Bernard Anthony.) et assurément il n’est pas du tout sympa, c’est LE système politique le plus monstrueux de tous les temps connus, de l’avis même du grand SOLJENYTSINE. Cordialement.

  11. Merci Gabrielle de nous rappeler ces faits, il peut être précisé également que staline était géorgien et non pas russe mais dans ces temps d’abomination Staline ne s’en prenait pas qu’aux seuls ukrainiens mais à tous les peules de l’URSS. Il est aussi révoltant qu’en occident des idiots utiles manipulaient l’information comme ils continuent de le faire à présent.

    •  » staline était géorgien et non pas russe » Il n’était ni l’un ni l’autre, mais internationaliste. Exactement comme nos dirigeants actuels. Coïncidence, sans doute.

  12. Une salutaire mise au point! Bravo à vous Gabrielle de nous avoir rappelé cette effroyable tragédie que beaucoup nient encore aujourd’hui.

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