Complaisance(s) française(s) à l’égard d’un dénigrement américain de l’EPR
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Les réacteurs EPR chinois de Taishan 1 et Taishan 2 sont les frères jumeaux de l’EPR de Flamanville. Le 14 juin dernier, s’empressant de faire fuiter par la chaîne CNN l’information d’un dysfonctionnement anodin sur Taishan 1 – cinq crayons combustibles « fuitards » sur 64.000 ! –, l’administration Biden visait sans conteste à dénigrer publiquement la technologie française et à nuire à l’achèvement de notre EPR.
Le 12 juin, une ASN (Autorité de sûreté nucléaire française) aussi zélée qu’orfèvre en communication et en diplomatie n’avait pas attendu la publicité d’une aussi inquiétante fragilisation de la sûreté EPR pour se montrer intraitable en principe de précaution, invitant son homologue chinoise à ouvrir un dialogue technique « sur les conditions d’exploitation actuelles du réacteur 1 de la centrale de Taishan » et ameutant l’Internationale de la censure nucléaire à considérer avec attention la « déposition » de CGN, la société chinoise exploitant l'EPR incriminé. But : « examiner dans quelle mesure le retour d’expérience de la situation d’exploitation actuelle à Taishan peut être pris en compte dans le cadre de l’instruction en cours de la demande de mise en service de l’EPR de Flamanville ».
On doit à l’impérialisme juridique américain cette servile transparence d’exploitation en Chine, imposée par la présence d’ingénieurs américains chez Framatome. Quand on se remémore un Georges Vendryes, père du surgénérateur français Superphénix, applaudi debout par un parterre d’ingénieurs et de scientifiques américains, quand on observe à quel point 25 années d’écolo-socialisme ont tari le gisement de formation de nos ingénieurs en nucléaire et en technologies nucléaires, quand tous les classements PISA soulignent un naufrage de la connaissance et de la compétence techniques françaises servant nos principaux concurrents de l’OCDE, il y a de quoi céder à la colère !
De vitrine de l’expertise en ingénierie et en pédagogie nucléaires, la France s’est muée en servile vassal de ses émules, en quelques années, ne se voulant désormais que le grotesque chef de file planétaire d’une rigueur procédurière à laquelle la CGN chinoise pourrait bien faire un bras d’honneur largement mérité !
Caciques de notre ASN, croyez-vous sincèrement que la France aurait pu se doter de la soixantaine de réacteurs qui ont fait la gloire de sa technologie et l’essentiel de sa richesse, en un temps record, dans l’intégriste contexte normatif que vous imposez aujourd’hui… et dilapidant ladite richesse ?
Vous ne ferez pas croire à ceux qui ont participé à cette épopée que, à travers la « prise en compte envisagée du retour d’expérience de l’exploitation de Taishan, dans le cadre de l’instruction en cours de la demande de mise en service de l’EPR de Flamanville », vous ne préparez pas à notre infortuné chantier une embûche au moins aussi infranchissable que celle concernant les soudures de traversées vapeur… si, toutefois, elle n’a pas tué ce chantier avant.
Hélas, selon des spécialistes que vous sous-estimez imprudemment, une telle occurrence pend bel et bien au nez de notre pays. Car ils savent à quel point votre jusqu’au-boutisme réglementaire se révèle suicidaire, en regard d’alternatives techniques qu’on aurait dû raisonnablement préférer à votre prescription.
Quoi qu’il en soit, vous n’êtes pas des exploitants et votre responsabilité de base n’est que la pédagogie en sûreté nucléaire et la police de la contravention. Notre ASN doit donc commencer par dire aux Français que, avec 100 % de ruptures des gaines, 1 % des gaz rares, 0,5 % des iodes et 0,5 % des césiums seulement de tout l’inventaire du cœur seraient libérés dans l’enceinte d’un réacteur où, par-dessus le marché, on fait l’hypothèse d’une aspersion hors service. Or, 0,3 % à peine de la masse totale de ces produits se retrouverait à l’extérieur du site, au pic d’une pression réputée évoluer, par hypothèse, comme dans le scénario accidentel enveloppe APRP (accident de perte de réfrigérant primaire), en cheminant par la fuite dite normale, une moitié directement, l’autre moitié filtrée par les filtres absolus et par les pièges à iode, après avoir été collectée.
Dans de telles conditions, je vous laisse découvrir et laisse découvrir à nos compatriotes les conséquences sanitaires d’un tel rejet, à l’extérieur du site, ici.
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