[Tribune 2] Construire une action diplomatique indépendante : à quel prix ?

Poutine Macron

Suite de l'article, publié le 3 février.

L’action diplomatique indépendante se construit d’abord avec des hommes qui font vocation de servir la nation sur tous les continents. La politique du président de la République de vouloir fondre le corps diplomatique dans un corps d’administrateurs non spécialisés est une ineptie qui démontre l’incompétence de Jupiter-Macron en politique étrangère - incompétence qu’il illustre en faisant la cour à Donald Trump ou à Joe Biden dont il veut se faire des « copains ». « Les États n’ont pas d’amis », affirmait Charles de Gaulle.

L’action diplomatique indépendante se construit par la défense et la promotion de notre langue en tout lieu et dans le cadre de la francophonie ; notre langue est notre pensée. Comme le rappelait Jean d'Ormesson, « la langue est le ciment d’une nation ».

L’action diplomatique indépendante se construit aussi par des moyens budgétaires pour que des diplomates envoyés dans le monde entier informent avec objectivité le gouvernement de la situation du pays où il réside. Ce n’est pas un travail de journaliste mais celui d’un analyste qui dépasse le scoop et inscrit son action dans la durée.

Il est regrettable que depuis des décennies le budget des affaires étrangères ait été diminué, nos implantations diplomatiques réduites. C’est la présence de la France qui, ainsi, s’efface dans de nombreux pays.

L’action diplomatique indépendante se construit dans l’unité de l’action. Il n’est pas acceptable que les régions entretiennent de véritables ambassades à Bruxelles, en conduisant avec moult moyens budgétaires une politique quasi rivale du gouvernement, satisfaisant ainsi le désir inavoué de l’Union européenne de briser les États-nations et de les remplacer par des régions sur le modèle de l’empire des Habsbourg.

L’action diplomatique indépendante se construit dans la nécessaire confiance entre l’outil diplomatique et le président de la République. Or, depuis plusieurs décennies, les Présidents croyant tout savoir, après avoir reçu le soir quelques intellectuels idéologues, court-circuitent le ministre des Affaires étrangères, les ambassadeurs, méprisés, pratiquent une diplomatie directe, oubliant qu’en cas d’échec, c’est la crise, car le Président est le dernier recours, l’ultima ratio.

L’action diplomatique indépendante se construit surtout loin des utopies, des projets artificiels, des plans sur la comète. À ce titre, les envolées pétries d’euro-béatitude du Président Macron irritent tous nos partenaires et sont vouées à l’échec. L’idée d’une Europe fédérale est rejetée par tous les pays de l’Union européenne ; en revanche, ils souhaitent tous une Union européenne de coopération - une Europe des Nations - qui s’en tienne à l’essentiel et applique la subsidiarité.

L’action diplomatique indépendante se construit en veillant à ne pas tomber dans le piège de l’engrenage des alliances. À cet égard se pose la question de notre appartenance à l’OTAN, dont la gouvernance est une organisation politico-militaire américaine qui poursuit des objectifs permanents en Europe : maintenir sous tutelle les pays européens tout en désignant l’ennemi parfait : la Russie.

La Russie a le droit de dire et redire que l’entrée de l’Ukraine et la Géorgie dans l’OTAN est une provocation, un casus belli ! Il est heureux que la France et l’Allemagne jugent que cette adhésion serait une faute géostratégique, n’en déplaise à de vieux alliés comme nos amis polonais qui ont connu avec l’URSS une Histoire tragique.

De plus, l’engrenage des alliances conduit à édicter des sanctions multilatérales dont il est très difficile de s’émanciper. Dans le cas des sanctions contre la Russie, les mesures de rétorsion de l’OTAN et de l’Union européenne ne font pas plier Moscou, mais ce sont des sanctions contre nos intérêts politiques, économiques, culturels et diplomatiques en Russie. C’est l’arroseur arrosé !

L’action diplomatique indépendante se construit sur les réalités internationales. Notre sécurité n’est pas mise en cause par la Russie. En revanche, l’Afrique est une bombe démographique à notre porte, traversée par des mouvements djihadistes de plus en plus agressifs qui déstabilisent les pays africains les uns après les autres. Face aux coups d’État de militaires qui accusent la France et font appel à des Russes – la milice Wagner -, les salonnards parisiens estiment que l’opération Barkhane doit cesser, nos militaires rapatriés. Une telle attitude est une ineptie dont la mise en œuvre nous coûterait très cher, signifiant une victoire sans appel pour les terroristes. En revanche, la France a les moyens de ramener fermement certaines juntes à la raison, y compris par la force ! Il y va de notre crédibilité, les 53 soldats français tombés au champ d’honneur nous y exhortent !

L’action diplomatique indépendante se construit, enfin, par le soutien des forces armées nationales à la politique étrangère : le monde des Bisounours n’existe pas !

Jacques Myard
Jacques Myard
Homme politique - Maire de Maisons-Laffitte

Vos commentaires

11 commentaires

  1. On ne peut pas construire une action diplomatique indépendante si nos élus politiques doivent composer avec des éhéances électorales et quand notre pays a cédé des pans de son autonomie à des structures internationales (CE, Otan etc.). Les élections permettent aux forces extérieures d’influencer ($) les électeurs pour changer de gouvernement et de stratégie diplomatique. Les USA le font régulièrement.

  2. M. Myard, vous savez comme moi que les pantins ignares et grotesques qui nous gouvernent n’ont aucune culture géopolitique. Aussi leur parler d’action diplomatique revient à parler de la théorie de la relativité à des enfants de CE1. Et encore, en CE1, il y a des surdoués…….

  3. Un grand président aimant son pays et les gens ,et à côté un petit homme dénigrant et cassant tout sur son passage .vivement le changement .

  4. « L’engrenage «  des alliances fonctionne contre la Russie mais pas au Sahel ! Monsieur Myard j’aimerais connaître votre point de vue à travers ce prisme sur la politique extérieure commune de l’Europe qui semble être découplée des attentes des peuples européens . Du moins on est loin de l’unanimité…Idem pour les questions d’immigration,de fiscalité ….Votre point de vue engage t il le parti auquel vous appartenez ?

  5.  » ce sont des sanctions contre nos intérêts politiques, économiques, culturels et diplomatiques en Russie. C’est l’arroseur arrosé !  »

    Demandez donc ce qu’en pensent les producteurs bretons de porcs et de fruits des sanctions prises contre la Russie par Hollande (pas le fromage) pendant son quinquennaze.

  6. « n’en déplaise à de vieux alliés comme nos amis polonais qui ont connu avec l’URSS une Histoire tragique »
    Les Polonais n’ont certainement pas oublié que compter sur leurs « alliés » français et anglais avait été une erreur en 39. Aujourd’hui, ils préfèrent s’en remettre à un pays qui a de gros moyens militaires et qui adore provoquer des guerres, bien qu’il n’en ait gagné aucune depuis 1945.

  7. Deux bémols : 1) les états n’ont certes pas d’amis mais les nations ont des ennemis, et donc des amis. 2) Nous avons eu quelques ambassadeurs de métier nuls ou nocifs
    Deux accords : sur l’OTAN et sur le Sahel quoique, sur ce dernier point, je crois qu’il faut appuyer le Burkina mais plus le Mali. Et suspendre l’instruction de toutes les demandes de visas, cartes de séjours ou naturalisation des Maliens, ou d’intervention sur le terrain : nous sommes dans une situation d’hostilité avec le Mali.

  8. Il faut avoir les moyens de ses ambitions. Les avons- nous?
    Il faut se donner les moyens de ses ambitions, le pouvons -nous?
    Si nous voulons gagner contre l’ islamisation de l’ Afrique, commençons par la chasser de France, le reste se fera naturellement . Chasser l’ islamisme d’ un continent et l’ accepter dans son pays est une aberration de nos politique. Du quartier islamisé, nous avons passé aux cités, maintenant aux villes et toujours aucune réaction des Macron et Cie

  9. Si Macron pense intérieurement faire plier Poutine, non seulement il a tort, pour rester poli, mais il devrait se souvenir de la manière dont Poutine l’a traité à plusieurs reprises.
    La diplomatie française est de nos jours au même niveau que celle d’un pays sous-développé.
    Tout est à reconstruire !

  10. Quelle est la crédibilité pour ne pas dire la légitimité d’un intermédiaire souhaitant désamorcer un éventuel conflit entre la Russie et l’OTAN, qui est lui-même membre cette organisation. C’est comme faire arbitrer PSG-OM par Antoine Gaudin.

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