Contre Bruxelles, Carlos Tavares annonce le chaos social. Et s’il avait raison ?

@Alexander Migl/Wikimedia commons
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Ce 18 janvier, le patron du jeune groupe automobile Stellantis n’a pas mâché ses mots à l’encontre de la politique industrielle imposée de la Commission européenne. Il lui adresse – par le biais d’une interview faite à Paris et publiée simultanément par quatre journaux européens (Les Échos, Handelsblatt, Corriere della Sera, El Mundo) - une sévère mise en garde quant aux conséquences sociales graves que risque d’entraîner son plan de décarbonation de l’industrie automobile par le tout électrique.

Déjà, en décembre 2021, le grand patron avertissait en ces termes, lors d’une visioconférence mondialisée du sommet Reuters Next : « Ce qui a été décidé, c'est d'imposer à l'industrie automobile une électrification qui ajoute 50 % de coûts additionnels à un véhicule conventionnel. Il est impossible que nous répercutions 50 % de coûts additionnels au consommateur final, parce que la majeure partie de la classe moyenne ne sera pas capable de payer. »

Carlos Tavares n'a pas changé d'avis. Il pointe divers écueils que les technocrates idéologisés ne semblent pourtant pas redouter.

Le risque environnemental, d’abord, puisque, dit-il, « un véhicule électrique doit rouler 70.000 km pour compenser la mauvaise empreinte carbone de fabrication de la batterie et commencer à creuser l'écart avec un véhicule hybride léger ».

La casse industrielle, ensuite, devant la difficulté constatée des constructeurs pour limiter les surcoûts de la production électrique et celle des sous-traitants pour s’adapter rapidement dans un secteur déjà sinistré au profit des fournisseurs asiatiques. « Nous verrons dans quelques années les constructeurs qui auront survécu et les autres », prédit le patron de Stellantis.

La fronde sociale, enfin, qui viendra, selon lui, de l’incapacité des classes moyenne à s’équiper, faute de budget conséquent. Et de poser cette question : « Faut-il des véhicules 100 % électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux États de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner ? »

En défendant sa vision de la liberté de l’entreprise, en voulant la soustraire aux contraintes de la politique de « commissaires » hors-sol, le patron de Stellantis n’entend pas seulement protéger le groupe qu'il préside. En 2019, déjà, il fustigeait la « pensée unique » et son nouveau bréviaire : « Jusqu’à quand les citoyens européens se laisseront-ils dicter par la pensée unique ce qui est bien ou mal ? » Et il avertissait que les objectifs climatiques de l’Union européenne porteraient atteinte à la « liberté de mouvement » prétendument universelle.

Aujourd’hui, en industriel raisonnable, Carlos Tavares nous alerte et prévient : « C'est la brutalité du changement qui crée le risque social. » Nos « censeurs » de l’Union européenne n’ont à la bouche que les valeurs de la Déclaration des libertés fondamentales de 1789 ou de son expansion humaniste de 1948. Ils s'en drapent pour mieux les fouler allègrement et imposer aux peuples d’Europe leur « meilleur des mondes ». Un monde idéal, fondé sur la ruine de la liberté de choix par la dépossession économique des individus et l’asservissement politique des nations. Quand le chaos viendra, semble nous dire Tavares, pourront-ils s’excuser en disant qu’ils ne savaient pas ?

Pierre Arette
Pierre Arette
DEA d'histoire à l'Université de Pau, cultivateur dans les Pyrénées atlantiques

Vos commentaires

57 commentaires

  1. Voila ce qu’est l’écologie : la dictature des normes stupides d’ignorants patentés qui condamnent les emballages plastiques sans distinguer ceux dont la combustion n’émet que de l’eau et du gaz carbonique et pas d’acide chlorhydrique ou cyanhydrique. Ils ont poussé à l’abandon de Fessenheim avec le résultat que l’on voit. Ils sont incohérents et dangereux.

  2. Il ne faut pas espérer se rendre de Paris à Marseille en un jour. C’est donc un moyen détourné de réduire les libertés aux familles qui n’auront pas les moyens de prendre l’avion ou le train. Quant à l’hybride, un simple calcul permet de voir que la consommation sera de facto plus importante, le véhicule transportant le poids des batteries et devant en outre recharger les batteries. Ce n’est qu’en se détournant de cette offre que d’autres choix seront trouvés.

  3. Malheureusement le brillant m. Tavares plaide pour sa paroisse. Il n’est pas capable de produire des voitures électriques à des prix compétitifs, il dénonce donc le rythme de la transition. L’argument n’est pas neuf, c’est celui généralement utilisé par les perdants dans une révolution industrielle. Il est impossible d’accepter comme impartial le jugement d’une personne qui est partie de l’équation, cela s’appelle un conflit d’intérêt.

  4. Il ne faut pas non plus occulter le problème des recettes de l’Etat. Comment remplacer les taxes perçues sur les carburants ? L’électricité augment, mais je crains fort que nous n’ayons encore rien vu…

  5. Que chaque acheteur de voiture électrique se rappelle que 40 000 enfants travaillent dans les mines pour extraire les terres rares nécessaires à ses batteries !

  6. La voiture électrique est un leurre. L’hiver, il faut dégivrer le pare-brise, réchauffer l’ habitacle. il faudra fournir de l’ électricité à une résistance puisqu’aucune chaleur du moteur! + la ventialtion, les essuis-glaces et les feux allumés très tôt (17h, en novembre, fait nuit) combien durera la batterie? Combien de surconsommation EDF dans des mois très froids par rechargements? Le prix de l’ abonnement? Réflécissez

  7. Tavares à raison,Et c’est pareil pour le remplacement des chaudières de chauffage fioul par des pompes à chaleurs dont l’efficacité et la fiabilité sont très souvent discutable et que la majorité des foyers concernés sont dans l’incapacité de financer .

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