Contre la droite « strogneugneu », Baroin singe le coucou 

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Il est difficile, pour les candidats Les Républicains (LR), de faire campagne pour convaincre les électeurs que leur programme diffère de celui de La République en marche (LREM). Les sigles mêmes de leurs partis respectifs, à deux lettres près, se ressemblent : il suffit aux Républicains de se mettre « En Marche » pour parfaire l’assimilation.

Les déclarations de leur chef de file contribuent à semer le trouble et à entretenir la confusion. Après avoir nourri le rêve d’une « cohabitation », en cas d’une victoire – très improbable – aux législatives, François Baroin évoque, dans Le Parisien du 28 janvier, "un partage des responsabilités", formule qu’il préfère au "covoiturage", employé par certains de ses amis.

Voilà qui risque d’embarrasser les militants qui, sur les marchés ou à la sortie des métros, s’efforcent de persuader que voter LR et voter LREM, ce n’est pas la même chose.

Comme si cette confusion ne suffisait pas, le juppéiste Gilles Boyer a plaidé, lundi sur CNews, pour "une stratégie de désistement réciproque" entre LR et LREM, dans toutes les circonscriptions où le Front national serait en mesure de l’emporter au second tour. Que croyez-vous que François Baroin répondit ?

Interrogé lors d’un déplacement à La Baule, il assure que "cette question est tranchée depuis très longtemps", ajoutant : "Je souhaite d'ailleurs que la réciproque soit vraie du côté d'En Marche ! comme du Parti socialiste. Les désistements devront faire partie de l'entre-deux-tours des législatives." Plus question du « ni… ni » : le premier adversaire, c’est le FN, l’incarnation du mal absolu.

Il n’est pas certain que tous les électeurs de droite s’y retrouvent. Ils avaient déjà moyennement apprécié l’appel précipité à voter pour Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle. Si, maintenant, on vient leur dire, avant même le résultat des législatives, qu’ils vont faire du covoiturage avec La République en marche, pas sûr qu’ils soient enthousiasmés par cette perspective.

François Baroin ne veut pas d’"une droite scrogneugneu". Mais beaucoup d’électeurs de droite ne se résignent pas à être cocus, battus et contents.

Sa stratégie électorale est à l’image de son parti : divisé entre les macronistes de la première heure, qui ont déjà rejoint le gouvernement ou le soutiennent, les attentistes qui, ayant manqué le départ, sont à l’affût de l’occasion favorable pour combler leur retard, et les opportunistes, qui voudraient, jusqu’au bout, se préserver plusieurs râteliers.

Répétons-le : en matière économique et européenne, point de différences majeures entre les positions LR et LREM. La droite aurait pu marquer sa spécificité en mettant l’accent sur les thèmes du terrorisme, du communautarisme, de la délinquance, de l’intégration… Mais, sur tous ces sujets, elle est curieusement timide. Craint-elle qu’on ne lui reproche de copier le Front national ?

La droite, minée par ses contradictions, hésitant à s’émanciper de la pensée unique qu’elle a contribué à répandre, tente de survivre. Comme le coucou, elle dépose ses œufs dans le nid du voisin, incapable de construire un mouvement qui défende, sans faiblesse ni compromission, des valeurs où une majorité de Français se reconnaîtraient.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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