COP28 : les non-dits du grand cirque

COP28

Mêmes causes, mêmes effets. Huit ans après Paris, on a assisté à Dubaï à un copier-coller de la COP21. Coup de marteau suivi de scènes de liesse, à une différence près : Laurent Fabius était remplacé par le sultan Al-Jaber.

Lors de la COP21, les grands de ce monde s’étaient engagés à « maintenir l'augmentation de la température en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de préférence la limiter à 1,5 °C ». Accord qualifié, à l’époque, d’« historique ». Et pourtant… 2023 aura été l’année la plus chaude depuis l'ère préindustrielle, mais aussi celle des records de consommation de charbon, de pétrole et de gaz. Tout le monde sait, aujourd’hui, que les accords de Paris sont inaccessibles et que la trajectoire actuelle nous conduit vers un monde où l'augmentation de la température atteindra +2,7 C° : il faudra s’adapter.

Un réchauffement inéluctable

Cependant, huit ans après et avec la même hargne, on continue d’enfoncer le clou plié en appelant, cette fois, les États à « opérer une transition hors des combustibles fossiles d’une manière juste, ordonnée et équitable… afin d’atteindre le niveau zéro d’ici 2050 ». Après avoir établi, il y a près d’une décennie, que la Terre se réchauffait à cause des gaz à effet de serre, on s’accorde maintenant sur le fait qu’il faut réduire la consommation des énergies fossiles. Une grande découverte… qui n’avait échappé à personne. Mais, comme il y a dix ans, il n’y a pas d’échéancier et la résolution n’est pas juridiquement contraignante. De retour à la maison, chacun reviendra au réel, interprétera la résolution à sa guise et oubliera vite promesses et engagements. Tous les scénarios sérieux prédisent qu’en 2050, il y aura encore entre 40 % et 60 % de fossiles (contre 83 % en 2022).

Huit ans après les accords de Paris, l’humanité persiste ainsi dans sa schizophrénie climato-fossile. Nous sommes conscients de la menace, mais nous restons fidèles aux hydrocarbures. Il suffit que le prix de l’essence augmente de dix centimes pour que les gilets jaunes descendent dans la rue et qu’en réponse, l’État distribue en un clic plusieurs dizaines de milliards d’euros. À qui la faute ?

Contrairement aux explications simplistes de ceux qui pointent du doigt la responsabilité de quelques lobbies industriels dont l’OPEP, le blocage réside dans la forte corrélation entre énergies fossiles et le développement humain auquel, légitimement, nous tenons au plus haut point.

Aucun renoncement en vue

Le citoyen des pays de l'OCDE est prêt à s’impliquer pour le climat, mais sans pour autant renoncer à son niveau de vie. Le citoyen des pays émergents est prêt à s’impliquer pour le climat, mais souhaite d’abord accroître son niveau de vie. En dehors de l’autorité (incompatible avec nos régimes démocratiques), il y a deux moyens de sortir des énergies fossiles : l’offre ou la demande.

Arrêter tout investissement dans le développement de nouveaux champs, comme le réclament certaines ONG, assécherait rapidement l’offre (la production des champs existants décline de 4 à 6 % par an) et conduirait à des prix stratosphériques. Quand on connaît la réaction épidermique de nos concitoyens aux augmentations des prix à la pompe, on ose à peine imaginer les troubles sociaux qu’une telle situation engendrerait. Face à une population révoltée, quel gouvernement assumerait un litre d’essence à 4 ou 5 euros ? Sans parler des instabilités géopolitiques sous-jacentes dans un monde qui n’a jamais été aussi fracturé.

La baisse de la consommation ne pourra se faire que par la demande, c’est-à-dire par le changement de comportement du consommateur. Et celui-ci changera quand on lui fournira un substitut énergétique crédible, abondant et suffisamment économique. Pour l’instant, tel n’est pas le cas. Historiques ou pas, les accords de Dubaï ne conduiront pas à moyen terme à une réduction de la consommation d’hydrocarbures, particulièrement dans les pays émergents dont le principal objectif reste le développement.

Dans un an, les militants écologistes se désoleront de l’impuissance des politiques, de l’égoïsme des industriels, et larmoieront autour d’objectifs irréalisés car irréalisables. Les compagnies du pétrole et les pays pétroliers seront montrés du doigt et assignés comme responsables climaticides d’un échec annoncé.

Déjà complexe dans le monde multilatéral qui prévalait lors de la COP21, l’équation climato-énergétique devient pratiquement insoluble dans une nouvelle logique de blocs. Les récentes victoires électorales de Javier Milei en Argentine et de Geert Wilders aux Pays-Bas, tous deux réputés climato-sceptiques, confirment cet effondrement du multilatéralisme au sein des démocraties occidentales. Comme Milei, Wilders appelle à davantage d’extraction de pétrole et de gaz en mer du Nord et souhaite le maintien des centrales au charbon.

Pour qui sonne le glas pour la prochaine COP29

Les élections européennes et américaines de juin et novembre 2024 représentent à cet égard deux rendez-vous clés pour le climat. Une victoire des nationalistes en Europe et des républicains aux Etats-Unis sonnerait le glas de la COP29 prévue en Azerbaïdjan. Un pied de nez à l’Histoire, sur le lieu même du premier forfait. Bakou n’est-il pas le berceau de l’industrie pétrolière dont Marco Polo avait, dès le XIVe siècle, vanté les abondants gisements ?

Philippe Charlez
Philippe Charlez
Chroniqueur à BV, ingénieur des Mines de l'École polytechnique de Mons (Belgique), docteur en physique de l'Institut de physique du globe de Paris, enseignant, expert énergies à l’institut Sapiens

Vos commentaires

51 commentaires

  1. Tant qu’on acceptera pas de prendre en compte ce que disent de vrais spécialistes, même quand ils appartiennent ou ont appartenu au GIEC, on ne pourra rien faire. Oui il fait plus chaud, mais moins de 1° depuis les années 90. Non le CO2 n’est pour rien dans ce petit réchauffement. Oui il faut faire confiance aux innovations qui permettront d’avoir une énergie plus stable, plus évolutive et moins couteuse, mais pour le moment il y a beaucoup de chantiers, laissons-les déboucher.

  2. Il est inutile de vouloir « lutter » contre le réchauffement climatique car nous n’y intervenons que pour une part vraiment infime. J’entame mon 4ème mois sous la pluie, c’est le réchauffement climatique. Sécheresse, réchauffement climatique. Neige en octobre, idem. 40° à Agen idem, mais je connais cela depuis 30 ans…Et nous avons battu le record de truc ou machin par rapport à 1920 ou30 si pas 1800 et quelques.
    Conseiller en mobilité, je puis en parler, j’estime que prendre sa voiture ou le bus n’est pas un choix ou ne devrait pas l’être à partir du moment où le trajet se fait en une heure en voiture au prix connu, et 20 minutes en bus ou autre au prix connu soit en ce qui me concerne 12€ par…an, abonnement normal au réseau public de Wallonie. Malheureusement c’est trop souvent le contraire, je compte 10 minutes en voiture pour aller chez ma fille, et….30 minutes en train, qui me dépose trop loin de chez elle. Un choix ?

  3. Personne ne doute de la nécessité d’économiser les énergies fossiles. En revanche le débat pourrait tourner autour des moyens de cette économie. Par exemple multiplier les éoliennes augmente la consommation de gaz et de charbon (cf nos voisins allemands). Pareillement les panneaux solaires seront incapables de satisfaire les besoins aux heures de consommation maximale. Au lieu d’investir dans ces renouvelables aux performances douteuses mais fort coûteuses, il vaudrait bien mieux améliorer l’isolation de l’habitat. Toutes ces dizaines de milliards qui enrichissent Siemens et les chinois seraient bien mieux employés

    • J’ai dans l’oreille que le manque de vent empêche le moulin de tourner et le recours se fait avec la centrale charbon pour l’alimenter. Ce qui est dans mes yeux par contre et sans conteste, c’est la pollution visuelle.
      Je viens de lire dans un média autorisé que la solution est trouvée, une tour de 200m de haut, alimentée par des vapeurs d’eau qui produisent de l’énergie, et un exemplaire serait « modélisé » dans un « désert ». Il faut juste de l’eau mais c’est en Arabie et il n’y a pas d’eau ( ahahah) on s »en doute mais les ingénieurs ont un souci manifestement. Je suppose qu’on va creuser un canal ou un réseau de tuyaux, on ne sait plus quoi faire est la conclusion. Excellent résumé de l’article avec les gens qui sont OK mais ne veulent rien changer et les gens qui sont OK mais veulent vivre comme les gens qui ne veulent rien changer. On est mal barre…

  4. Bien faire et laisser dire… je vais racheter une bonne Volvo break XC 70 , 4 roues motrices, intérieur cuir…. d’occasion récente, et que je laisserai dans la grange, avec ma 2CV de 1963, en réserve, pour quand ma Volvo break XC 70 actuelle (de 2006 / 228.000 kms) sera hors service, c’est à dire normalement dans 15 ans… et encore ??? Elles seront pour mes enfants… qui sont aussi à la campagne… les gens de la ville auront changé 7 fois, au moins, de batteries ou de petites voitures électriques de m… incapables de tracter la moindre remorque à chevaux sur 1.000 kms !!! C’est ça la vie !!! Le reste est de la littérature écolo…

  5. Notre civilisation est en chute libre , mais on focalise les populations sur le réchauffement climatique et on culpabilise évidemment l’Occident .

  6. Bien peu de gens savent que le GIEC n’est pas peuplé d’experts, mais d’un entre-soi à la pensée unique.
    Vous nous avez gonflé, toute l’année 2023, avec la sécheresse dûe au soi-disant réchauffement climatique. Maintenant que les inondations ont sévi et que les nappes phréatiques sont reconstituées, c’est aussi le réchauffement climatique ?
    Les variations climatiques ont toujours existé, et dans des proportions bien plus importantes. Et le Groenland, baptisé terre verte par les vikings ?Et les réserves pétrolières sous l’Arctique proviennent bien de la décomposition des végétaux ? sous l’Arctique.
    Et la variation de l’ inclinaison de la Terre de quelques dixièmes de degrés, qui influe sur le climat, bien connu des vrais scientifiques, vous
    l’occultez ?
    Je pourrai continuer longtemps avec de tas d’exemples très concrets.
    Le réchauffement climatique, c’est la nouvelle doxa du moment.
    Et puis, avec votre raisonnement, on supprime le pétrole, le gaz, donc plus d’essence, plus de chauffage (on voit les limites du dieu électricité), et on retourne à l’âge de pierre.
    Vous oubliez totalement le plus efficace des remèdes, la pilule contraceptive pour les pays en voie de développement !

    • Excellent l’affaire du Groenland et de la fossilisation. Je savais pour le pays vert des Vikings mais ne n’avais pas lié cela aux forages de produits fossiles dans les glaces polaires. Il est bon de ne pas lire uniquement les médias autorisés qui n’évoqueront jamais cette relation. Merci.

  7. Une irruption volcanique envois dans l’atmosphère combien de gaz à effet de serre par rapport à celle des énergies fossiles ?

    • Vous mettez le doigt sur la réalité. C’est en effet les volcans qui envoient le plus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et il y en a beaucoup en éruption permanente, et les humains ne sont qu’une petite poussière à côté de ces derniers. Avec des centrales nucléaires nous pourrions fournir beaucoup d’électricité pour tous nos besoins et éviter les autres énergies polluantes. Mais ça, c’est mon avis.

  8. Il est indéniable que le réchauffement de la planète est une réalité mais pour les écologistes une belle opportunité. De simple recherches qui foisonnent montre fort bien que ce réchauffement est antérieur à la société industriel et ceux qui encore en douteraient n’ont qu’a faire l’effort comme ceux qui veulent savoir ils découvrons les recherches que des spécialistes (des vrais pas les prétendus du GIEC) ont trouvés comme preuves alors il serait plus logique de rechercher les moyens de s’en préserver que de tenter vainement de lutter contre la nature où n’y pourront jamais rien étant des milliers de fois plus forte que nous.

    • Vous avez raison. La terre suit son cycle naturel, réchauffements, glaciations et l’homme n’y es absolument pour rien. Lire le livre « L’obscurantisme vert » d’d’Yves Roucaut.

  9. La COP, une parodie festive de bien pensants tous ayant beaucoup d’intérêts financiers dans les énergies fossiles, un gaspillage financier pour le commun, pour un problème qui n’en est pas un. Le climat se rit de nous qui n’avons qu’à nous adapter comme nos ancêtres. Quant aux énergies fossiles, le jour où il y en n’aura plus, forcés seront nous de nous adapter, toujours et encore.

  10. « Tout le monde sait, aujourd’hui, que les accords de Paris sont inaccessibles et que la trajectoire actuelle nous conduit vers un monde où l’augmentation de la température atteindra +2,7 C° : il faudra s’adapter. »
    Tout le monde devrait savoir que le CO2 est la vie et que, de toute façon, s’il y a réchauffement (ce dont je doute, mais il paraît que j’ai un micro climat dans mon jardin) il n’est pas anthropique! Baratin, baratin, baratin!

    • Des VRAIS scientifiques disent que nous entrons dans une nouvelle ère glaciaire avec fonte des calottes glaciaires et donc arrivée des eaux douces dans les océans etc…etc…(trop long à décrire ici) Cela prendra des milliers d’années mais c’est le cycle de notre planète et nous ne pourrons rien changer!

  11. « maintenir l’augmentation de la température en dessous de 2 °C » ! Comme si l’homme était en capacité de museler dame nature !! Quand les polititocards qui nous gouvernent cesseront d’écouter les sirènes hurlantes des escrologistes du GIEC et d’ailleurs, peut-être prendront-ils conscience que ce ne sont pas les pets de vaches ni les petites fumées que nous envoyons dans l’atmosphère aussi grand que l’univers qui influent sur le réchauffement de la terre. Cette terre qui a 4,5 milliards d’année d’existence n’en a pas fini de se réchauffer et de se refroidir au gré de son ellipse autour du soleil. Et depuis tout ce temps, l’homme qui est tout jeune, à peine quelques dizaines de milliers d’années à toujours su s’adapter au changement climatique. Le seule chose à faire c’est d’accepter, enfin, cet état de choses et de faire comme nos ancêtres : NOUS ADAPTER.

  12. « Tout le monde sait, aujourd’hui, que les accords de Paris sont inaccessibles et que la trajectoire actuelle nous conduit vers un monde où l’augmentation de la température atteindra +2,7 C° : »
    Tout le monde ? Vraiment ?
    Ah ben, non !
    Moi, je ne sais pas.
    Les vrais scientifiques non plus, d’ailleurs : eux, ils doutent…
    Contrairement aux idéologues qui ne doutent de rien, « c’est même à cela qu’on les reconnaît » aurait pu rajouter le grand Michel Audiard…

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