Coronavirus et toxicomanies, impérities au sommet

fumeur cannabis

N’étant pas sortis de cette inquiétante coronavirose, il est prématuré d’évoquer les changements qui s’imposeront dans sa suite. Néanmoins, une analyse « à chaud » pourra inspirer de nécessaires aggiornamentos.

Si de deux maux il faut choisir le moindre, cela n’apparaît pas évident dans l’arbitrage opéré par le gouvernement entre la coronavirose et les toxicomanies.

Rappelons qu’en France, et depuis longtemps, tabac et alcool sont responsables, quotidiennement, de plus de 300 décès ; un chiffre de l’ordre de grandeur de la létalité du Covid-19 en sa phase aiguë.

Pour rendre plus supportable le confinement imposé à nos concitoyens, le gouvernement l’a assorti d’un libre accès au tabac (civettes restant ouvertes) et à l’alcool (les magasins qui en vendent restant également ouverts). Schématisant, le message est clair : « Fumez, alcoolisez-vous, le temps passera plus vite. » Pourtant, qui peut ignorer que l’oisiveté et l’ennui aggravent les addictions ? Cette tolérance peut conduire à la rupture d’une abstinence difficilement obtenue, à l’intensification de consommations qui restaient modérées et même, pour l’alcool, à l’entrée dans sa consommation. Le tabac, en milieu confiné, menace les commensaux de tabagisme passif. En l’absence d’activité physique, les calories apportées par l’éthanol font prendre du poids. L’alcool peut majorer les troubles psychologiques induits par le confinement ; il peut susciter ou exacerber une agressivité dirigée contre le/la conjoint(e) et/ou les enfants.

Le tabac, malgré des allégations d’effets protecteurs de la nicotine sur l’infection par le Covid-19, ne peut qu’aggraver le cours de la maladie, de par ses goudrons, son oxyde de carbone et les altérations broncho-pulmonaires constituées.

Le cannabis a été le grand oublié des recommandations du ministre de la Santé (fervent défenseur, jusqu’il y a peu, du « cannabis thérapeutique ») et du directeur général de la Santé. Alors qu’ils avaient très opportunément déconseillé les anti-inflammatoires non stéroïdiens et les corticoïdes qui, en déprimant l’immunité, peuvent faire flamber l’infection, ils sont demeurés muets sur la consommation de cannabis. Son tétrahydrocannabinol/THC a pourtant des effets immunodépresseurs avérés, diminuant les défenses que l’organisme peut opposer au virus. De plus, les goudrons, irritants pour l’arbre respiratoire, et l’oxyde de carbone (CO), produits par la combustion de la résine de cannabis, sont sept fois plus abondants que ceux issus de la combustion du tabac. Cet oxyde de carbone ampute l’hémoglobine sanguine de son pouvoir de transporter l’oxygène, depuis les poumons qui le captent jusqu’aux tissu qui le consomment. Cet effet est particulièrement délétère dans une infection où dominent les troubles respiratoires. Ce « Passez, il n’y a rien à voir » est particulièrement dommageable, Monsieur le Ministre, dans notre nation qui compte 1.500.000 usagers réguliers de cannabis, dont 900.000 sont des consommateurs quotidiens et multi-quotidiens. S’il s’agit d’une omission, réparez-la vite ; si, par contre, ce mutisme est délibéré, il faudra l’expliquer. On ne veut pas imaginer que dans l’inconfort du confinement, ce soit conçu pour majorer le « réconfort » du duo tabac-alcool, en y ajoutant le cannabis.

En cette période de grande confusion, certains, en toute impudence, avancent leurs pions et tendent leur sébile. Sans aucune preuve, d’aucuns prétendent que le cannabidiol pourrait être souverain sur l’agression pulmonaire du virus… N’avez-vous pas été sollicité, Monsieur le Ministre, avec des trémolos compassionnels débridés, pour autoriser dans les EHPAD la dispensation de cannabis à nos anciens ?

Notre nation a plongé, sans y opposer de réactions appropriées (législatives, policières, éducatives…) dans la fosse des drogues et des toxicomanies. De puissants lobbies, de l’alcool, du tabac, du cannabis, et même des industries pharmaceutiques, mus par de sordides intérêts (sordides car aux antipodes de tout humanisme), ont subverti une part de l’opinion, des médias, des décideurs qui, ensemble, ont installé cette situation désastreuse. Ils agissent pour l’entretenir et même s’appliquent à l’aggraver. La France, pour améliorer la santé physique ainsi que psychique de ses citoyens et pour redresser son économie, devra brûler tout ce que ceux-là lui ont fait adorer.

Jean Costentin
Jean Costentin
Docteur en médecine

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