Coronavirus : il faudra bien une contribution des assurances aux pertes des PME

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Le coronavirus a percuté leurs comptes comme les avions du 11 septembre 2001. Pour nos restaurateurs, nos fleuristes, nos artisans et commerçants, cette catastrophe se double d’assureurs aux abonnés absents. En 2001 aussi, les sinistrés se sont tournés vers leur compagnie d’assurance. Après les dénégations face aux cris vint le temps des plaintes devant les tribunaux. Finalement, devant le chaos juridique, l’industrie de l’assurance s’était résolue à indemniser en partie les conséquences de cet acte terroriste : entre 30 et 60 milliards de dollars[1] dont la moité payée par le secteur en Europe. Le plus grand sinistre jamais encaissé par l'industrie de l'assurance[2] ! Malgré ces paiements considérables, il n’y a pas eu de faillite de grande ampleur dans le secteur de l’assurance.

En 2020, certains assureurs sont de nouveau fragilisés par le niveau des taux d’intérêt et la chute de la valeur des marchés. Leurs ratios de solvabilité imposés par Bruxelles sont menacés, tandis qu’une deuxième avalanche les menace : celle des réclamations de clients pour perte d’exploitation. Au niveau européen, l’agence EIOPA a, d’ailleurs, insisté sur la suspension des versements des dividendes et bonus. Certains assureurs se cachent encore derrière les exceptions écrites en petits caractères dans les contrats : « sauf en cas de pandémie ». Alors, faut-il indemniser les pertes sans dommages à partir du confinement : les pertes d’exploitation, voire les stocks ? Qui devrait le faire ? Jusqu’à présent, le secteur de l’assurance s’y refusait. Est-ce à l’État et donc à l’impôt de s’en porter garant ? Le secteur de l’assurance et de la réassurance doit-il être mis à contribution ?

Faut-il permettre de mobiliser des fonds liés à l’assurance des catastrophes naturelles ou contre le terrorisme ? Qu’en est-il de ces obligations catastrophes « cat bonds (CAT) »[3], fonds privés jouant justement sur les probabilités des catastrophes naturelles ? Faut-il jouer sur l’accès aux liquidités ? Toutes les portes doivent être ouvertes pour sauver nos PME. 1,2 million d’emplois seraient concernés. En attendant, Marine Le Pen propose que la Banque de France verse directement 1.500 euros par entreprise et 1.000 euros par salarié.

La Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) s’est engagée, le 23 mars, à soutenir la trésorerie des PME avec une enveloppe de 200 millions d’euros et nous la félicitons. Tout en respectant l’avenir du secteur de l’assurance, le devoir de solidarité en temps de crise devrait pousser le gouvernement à demander une contribution bien supérieure. Ce risque devrait être reconnu comme une catastrophe sanitaire.

Depuis longtemps, l’industrie pharmaceutique a été mise à contribution pour rétablir les comptes de la Sécurité sociale. En cinq ans, c’est près de dix milliards d’euros qui auraient été prélevés (chiffres 2014-2018, leem[4]).

La discussion gouvernementale, ce mercredi, sur la mise en place d’un dispositif pour la prochaine pandémie ne doit pas détourner l’attention du cœur nucléaire du problème. Le gouvernement doit se montrer plus audacieux pour aider nos entreprises et cesser d’avoir un discours différent à Bruxelles.

Au Parlement européen, les députés européens de la majorité ont voté, le 26 mars, contre notre amendement de soutien financier aux entreprises ayant perdu une part importante de leur chiffre d’affaires.

Les assureurs doivent, aujourd’hui, mettre la main au porte-monnaie pour sauver ces entreprises. Le coronavirus est une catastrophe sanitaire, soit une catastrophe imprévisible comme celle de la socité AZF, avec un État coresponsable de la situation. Un État qui aurait dû fermer les frontières, un État qui aurait dû commander des masques, un État qui aurait dû commander des tests et prendre toutes les autres mesures qui s’imposaient pour limiter les dégâts.

[1] https://www.cairn.info/revue-perspectives-economiques-de-l-ocde-2002-1-page-147.htm

[2]https://www.lesechos.fr/2002/01/wtc-le-plus-grand-sinistre-jamais-encaisse-par-lindustrie-de-lassurance-682252

[3] Les obligations « catastrophes » sont des instruments obligataires qui comportent une prime correspondant au fait que si une catastrophe déterminée se produit, les investisseurs renonceront au remboursement d’une partie du principal et/ou au paiement d’une partie des intérêts.

[4]https://www.leem.org/resultats-et-fiscalite-des-entreprises ; https://en.calameo.com/read/002049284b301048ac62b?page=1

Virginie Joron
Virginie Joron
Virginie Joron est député français au Parlement européen, membre de la délégation pour les relations avec l’Afghanistan

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