Corse, Bretagne, Pays basque : en marche vers la fin de la nation française ?

drapeau français

C’était à prévoir. Après la visite express de Gérald Darmanin en Corse sous la pression de la rue et des violences autonomistes, après avoir, dans la foulée, lâché le mot autonomie avec, dans le viseur, l’achat de la paix sociale à trois semaines du scrutin présidentiel, tout ce que la France compte d’indépendantistes et d’autonomistes sort du bois.

Le 21 mars dernier, dans un communiqué envoyé à la rédaction de Ouest-France, le FLB (Front de libération de la Bretagne) et l’ARB (Armée républicaine bretonne) affirmaient prendre « acte que le peuple n’est écouté par le gouvernement qu’à la suite d’actions violentes ». L’affaire corse, plus que la révolte des gilets jaunes, est effectivement l’une des expressions d’un État affaibli, en débandade.

Folklore ? Peut-être. La formulation sommaire peut le laisser penser, même si la réunification administrative de la Bretagne (mais pas son autonomie), avec le rattachement de la Loire-Atlantique à la région, a été demandée expressément par près de 200 élus, dont le député LR Marc Le Fur, le maire PS de Paimpol Fanny Chappé, la conseillère régionale EELV Claire Desmares, le député LREM Yannick Kerlogot ou le président LR du conseil départemental du Morbihan David Lappartient (20 Minutes). À cet effet, le plus grand drapeau breton du monde a été déployé, le 20 février dernier, à Nantes.

De leur côté, les Basques ne sont pas en reste. Ils se sont, comme les Bretons, saisis de cette « fenêtre de tir » obligeamment ouverte par le ministre de l’Intérieur. Selon Jean Chichizola, du Figaro, « si des négociations s’ouvrent sur la Corse, elles motiveront les militants du côté de Bayonne. Bake Bidea et les Artisans de la paix veulent déjà mettre la pression sur Paris en menant un mouvement de « désobéissance civile », avec une prochaine action annoncée pour le 2 avril. » Les revendications basques ressemblent à celles des Corses : si l’organisation terroriste ETA a été dissoute en 2018, la question des prisonniers reste le point de cristallisation. Le rapprochement géographique a été accordé (ils sont détenus dans des prisons du Sud-Ouest) mais les organisations indépendantistes réclament la levée du statut de « détenu particulièrement signalé » pour quatre d’entre eux. Ce qui avait été accordé à la hâte aux Corses après l’agression d’Yvan Colonna.

La question de l’autonomie est particulièrement délicate : si l’on accordait à la Corse ou au Pays basque le statut de la Polynésie, par exemple, celui-ci devrait être inscrit dans la Constitution, comme l’article 74 pour les communautés d’outre-mer. Anne-Marie Le Pourhiet, professeur de droit constitutionnel à l’université de Rennes, soupire : « Si nous touchons à la Constitution pour la Corse, toutes les minorités vont arriver en embuscade… D’une certaine façon, il suffirait d’enlever le qualificatif d’outre-mer à l’article 74 pour que demain, non seulement la Corse mais Belfort, les Bretons ou les Basques puissent accéder à un statut comparable. » En effet, explique-t-elle au Figaro, « aujourd’hui, en ayant mis les doigts dans l’engrenage corse, on ne voit pas comment le gouvernement pourrait ne pas concéder demain à l’Alsace ou à la Bretagne ce qu’elles exigeraient ».

Cette contagion de revendications autonomistes – qui sont bien différentes d’un légitime régionalisme – à l’heure où la France, traversée par de multiples fractures, est fortement déstabilisée, est le signe, explique, dans Le Figaro, le géographe Laurent Chalard, « d’une fatigue de France. Les dirigeants eux-mêmes n'ont plus vraiment de certitudes sur ce qui constitue l'identité de leur État-nation. Ils ont tendance à voir leur pays comme un objet mouvant dans la mondialisation anglo-saxonne, mais qui n'est plus culturellement identifié. » Car, explique-t-il, « face à une identité nationale qui a tendance à être de plus en plus multiculturelle, beaucoup de Français ne s'y reconnaissent plus, tout en ressentant toujours le besoin d'un ancrage, d'une identité. Si l'ancrage national faillit, reste l'ancrage régional. »

Aujourd’hui, Emmanuel Macron, tout occupé à défendre l’intégrité et la souveraineté de la nation ukrainienne, n’est même plus capable de voir le danger mortel que court son propre pays. Aussi, on peut douter des promesses grandiloquentes faites aux Français : « Je vous protégerai » !

Marie d'Armagnac
Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

30 commentaires

  1. Il y a deux stratégies pour affaiblir les Etats nations: subvertir le gouvernement et l’administration, favoriser des autonomies régionales qui seront ensuite directement rattachées à Bruxelles…

  2. L’indépendance devrait s’accompagner de la fermeture du robinet d’aides, allocations et subventions. L’autonomie veut le beurre et l’argent du beurre !

  3. Il ne saurait être question de sa capacité mais bien de sa volonté délibérée de casser la France dont tout lui fait horreur. Cet homme est un traître et devrait non pas être réélisible mais traductible immédiatement devant les juges de la CJR.

  4. Dans le fond.. affaiblir la nation , affaiblir le mot France au profit des grandes régions, les « landers » en quelque sorte serait tout à fait dans la ligne Macron pour une nation Europe dans le cadre se sa mondialisation chérie.
    Il a de très compétents cabinets de conseil… n’est-ce pas..!

  5. Les vieux peuples antérieurs à la France ne veulent pas disparaître alors que les gouvernements français de gauche et de droite les dirigent vers un suicide collectif par en bas (immigration de masse), et par en haut (euro-mondialisme). Les régions ont raison et le système bruxello-parisien a tort (haute trahison). Changeons ce système et les régions reconstruiront notre pays : de bas en haut. Virons Macron !

  6. C’est tellement plus facile de faire des discours à l’Europe entière sans se soucier des conséquences de paroles inconsidérées dans son propre pays

  7. Évidemment, le projet européen découlant de celui de Soros, et donc celui de Micron, c’est que chaque région, rebaptisée « territoire », devienne indépendante. Comment s’en étonner lorsque le but est d’affaiblir et déconstruire, ouvrant en grand la porte aux nouvelles féodalités, et donc à tous les trafics?

  8. L’europe souhaite renforcer l’influence des régions pour affaiblir les états. Plis on est faible, plus on est soumis. J’aurais aimé voir un De Gaulle dans la situation. Dans l’intérêt de la France, j’ai décidé….

    • C’est exactement ce que je pense et tout le monde connait cette petite histoire du père de famille saisissant, devant ses enfants, une poignée de brins de paille, les séparant pour les briser l’un après l’autre et reprenant une autre poignée et s’efforçant, vainement de détruire l’ensemble.
      Voila ce qui attend ces régions ,parfois factices, si elles se présentent les unes après les autres à Bruxelles.

    • Les rois n’avaient pas peur des provinces qui sont l’histoire et la sève de la nation. Le catoblépas est un animal qui se mange les pieds…L’Europe ne veut pas des régions mais des eurorégions trans-frontières. Rien à voir.

  9. Voila ce que c’est que d’avoir laissé filer l’identité française. Après le grand remplacement, le grand éclatement !!
    Il a été vu, aux obsèques d’Yvan Colonna, un drapeau basque et un breton !! Signe des temps.

  10. C’est un phénomène naturel :l’âme de l’Europe est dans ses provinces, pas dans les « Hauts de France » et autres « PACA »! Cette volonté pour les provinces est complémentaire de l’attachement à la patrie et non antagoniste.

  11. Venant d’anglet, certes je suis fier du pays basque, mais je peux vous assurer que les « indépendantistes  » basques sont une très faible minorité, bruyante mais insignifiante.

  12. Macron se débat pour l’intégrité et la souveraineté de l’Ukraine alors qu’il fait tout pour que la France perde son identité, son histoire, sa culture, sa souveraineté. Que Dieu puisse m’entendre pour qu’il dégage.

  13. La mondialisation et le multiculturalisme déconstruisent l’identité culturelle et nationale. Le Premier Ministre du Canada M. Justin Trudeau se fait le promoteur de ce nouvel ordre en déclarant que  »le Canada est le premier pays post national sur la terre ». Nos élites économiques et politiques le souhaitent. Et nous?

  14. Il fallait s’en douter .Déclarer pour calmer le jeu que la corse allait accéder à l’autonomie c’est une idiotie. Toutes les revendications d’autonomie exprimées par ces territoires ont été réveillées , alors que depuis des années elles semblaient les avoir abandonnées. La Corse , ce n’est ni Tahiti ou la Réunion, il y a une proximité géographique. N’oublions pas que la Corse a déjà un statut particulier. Qu’on organise un référendum pour que les choses soient claires.

    •  » Qu’on organise un référendum pour que les choses soient claires. » Et qu’on le recommence jusqu’au bon résultat.

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