Courroux à Kourou : nous sommes tous des Guyanais !
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Dire qu’en Guyane, Emmanuel Macron était attendu de pied ferme relève de l’euphémisme délicat, tant il avait promis à cette « île » qui n’en est pas une, a-t-il appris depuis. De l’argent, bien sûr… Mais la vie d’un pays ne se résume pas qu’à l’économie, tel qu’il ne l’a manifestement pas encore bien admis, au contraire de nos compatriotes ultramarins.
Ainsi, les revendications du collectif dit des Grands Frères, qui tente là-bas de pallier l’absence d’ordre public. À Cayenne, alors que l’avion présidentiel n’a pas encore atterri, ce n’est pas aux guichets de la CAF que ces solides gaillards s’invitent, mais à ceux de l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) et de l’OFIL (Office français de l’immigration et de l’intégration). Après avoir prié le personnel de ces deux officines de se mettre en congé, Mikael Mancée, Grand Frère en chef, prévient que "ces lieux seront fermés jusqu’à nouvel ordre". Voilà qui a le mérite de la clarté, et plus « identitaire », on ne fait pas ; « humaniste », en revanche…
Et Mikael Mancée de déclarer au journal France Guyane : "Il faut que le Président comprenne que si l’on veut, on peut gérer le pays nous-mêmes. Il n’a pas envie de ça, on n’a pas envie de ça non plus. Soit on trouve les solutions ensemble, soit on fait nous-mêmes…" Là encore, les « solutions » aux « problèmes » évoqués ne relèvent pas que des trois milliards d’euros promis à la Guyane. Cela, Emmanuel Macron, après avoir assuré qu’il n’était pas "le père Noël", le reconnaît à mi-mot : "Je saurai aussi assurer les éléments d’autorité indispensables sur ce territoire."
Citée par Le Monde, une manifestante traduit cette novlangue en français intelligible : "La Guyane souffre de l’insécurité, de l’immigration clandestine massive." Voilà qui est dit. De manière lapidaire, mais bien dit. En effet, il faut savoir – et Emmanuel Macron le sait mieux que personnne – que ces maux frappant la métropole sont là-bas surmultipliés, la Guyane étant limitrophe du Brésil et du Surinam. Soit deux pays exportant, en sus des leurs, nombre de miséreux, souvent haïtiens, pour qui cette terre de France enclavée sur le continent latin fait figure d’eldorado. Parce qu’il suffit d’y faire naître un enfant pour que ce dernier et ses parents se trouvent automatiquement bénéficiaires de nos largesses, en attendant le sésame de la nationalisation. Bingo ! La France demeure le seul casino dans lequel le casinotier est assuré de perdre trente-six fois la mise à tous les coups.
En France, il est encore possible de remiser la poussière sous le tapis. La croissance semble revenir pour les gagnants de la mondialisation, ceux qui ont voté pour Emmanuel lors de la dernière élection présidentielle. Les perdants de cette même mondialisation, eux, survivent grâce aux aides sociales, se réfugient dans l’abstention et n’ont pas de « Grands Frères » assez vigoureux pour foutre le feu à la baraque. Voilà qui lui convient finalement assez bien. N’est-ce pas le monde qu’il appelle de ses vœux ? Lui qui, même se rendant au Puy du Fou, n’y voit somme toute que la meilleure de nos start-up hexagonales, une sorte de Disneyland chouan, au même titre qu’une autre start-up, celle de l’Aérospatiale, à Kourou.
Cette arrogance tranquille de premier de la classe ayant tout réussi en attendant de tout foirer vient néanmoins d’éclater au grand jour, tel qu’en témoigne cette note sanitaire élyséenne, recommandant aux membres de la délégation présidentielle de s’abstenir de boire l’eau du robinet guyanais. "Macron, venez boire de l’eau !", ont aussitôt rétorqué ceux qui, ayant le sentiment, pas vraiment infondé, d’être pris pour indigènes en leur propre patrie, ont signifié au premier d’entre eux qu’il avait peut-être fini de manger son pain blanc.
En attendant, c’est le grand courroux à Kourou. Et tout homme de bien ne peut se sentir aujourd’hui que guyanais de chair et de sang, d’âme et de cœur.
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