Crise agricole : un conseiller élyséen viré, un aveu d’échec

macron salon de l'agiculture

On se souvient encore de ce samedi 24 février et d’Emmanuel Macron inaugurant le Salon de l’agriculture sous les huées paysannes. On se rappelle surtout son escorte : il se serait rendu à Gaza en pleine offensive de l’armée israélienne qu’il n’aurait pas été mieux protégé. Certes, il n’était pas exactement le bienvenu et il aura suffi d’une simple étincelle pour mettre le feu aux poudres : l’annonce de l’invitation de l’association Les Soulèvements de la Terre au Salon. Et là, ce fut plus qu’un simple feu de paille.

Qui avait pris une initiative aussi incongrue ? Deux de ses proches : Mathias Ginet, son « conseiller agriculture », et Benoît Faraco, le chef du « Pôle écologie, agriculture, énergie, transports et logement » de l’Élysée. Pas précisément de simples stagiaires, donc. D’autant que la veille, ils avaient claironné la nouvelle devant… cent-cinquante journalistes. Bref, ce n’était pas tout à fait du « off ».

Se défausser sur le petit personnel…

Résultat ? Au Château, on plaide la bourde, l’incompréhension, le dysfonctionnement, le manque de communication interne, la bévue ancillaire ou la « connerie de la bonniche », comme dit par Jean Gabin dans Le cave se rebiffe (1962). Mieux : le Président humilié traite la polémique avec toute la hauteur nécessaire : « L’Élysée n’est pas un parti politique, c’est une maison au service du président de la République et de son projet. Il y a un patron qui prend des engagements, prend des risques, prend des décisions et s’assure de leur mise en œuvre. […] Le jeu qui consiste à cibler des conseillers de l’Élysée est insupportable. […] Quand les choses viennent de l’Élysée, il y a un responsable : c’est moi ! »

La réponse est mâle ; logique, pour un homme de bien. Seulement voilà, les duettistes n’étaient qu’en sursis. Ainsi, Mathias Ginet, le premier, vient-il de se faire discrètement pousser dehors. Selon toute vraisemblance, le second ne devrait pas tarder à le suivre dans sa disgrâce. Il est vrai que leurs pedigrees respectifs avaient de quoi laisser dubitatif. Tous deux viennent de la galaxie des ONG et ont longtemps travaillé avec Pascal Canfin, ancien directeur général de WWF France, ministre de l’Écologie sous François Hollande et actuellement eurodéputé macroniste, dont le tour viendra bien un de ces jours…

Ce qui fait dire au premier des Français, en plein tourbillon médiatique : « Je suis heureux d’avoir des conseillers qui ont des profils très riches. » Si « riches » qu’il a donc cru bon de s’appauvrir en les envoyant paître ailleurs voir si l’herbe y est plus verte. Comme quoi il peut arriver, de temps à autre, à Jupiter d’incidemment connaître un petit coup de mou.

Jupiter ou Colargol ?

En ce moment, ce n’est pas véritablement la forme des grands jours, tel qu’en témoigne cette virile sortie présidentielle à propos des Soulèvements de la Terre : « Je suis le président de la République qui a décidé de les dissoudre ; c’est rare. Depuis le premier jour, je suis intraitable sur la violence envers les paysans. »

Pour un peu, on y croirait presque. À ce menu détail près que la dissolution de ce mouvement, annoncée le 21 juin 2023 par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a été annulée par le Conseil d’État le 9 novembre 2023. Là, ce n’est plus Jupiter mais Colargol. Ou Garcimore qui se prendrait pour Machiavel.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

26 commentaires

  1. À force de « virer » ses conseillers et autres responsables à tour de bras, il risque bien de se faire « virer » lui-même, par les Français, cette fois. « On l’a élu, on va le désélire ! » diront peut-être les plus courageux. Ou les plus lucides. On peut imaginer que les différents docteurs en Droit constitutionnel sont déjà commencé à éplucher leurs petits manuels, en s’arrêtant à la page « destitution ». Au fait, Louis Aliot, le maire RN de Perpignan, est lui aussi docteur en Droit constitutionnel. Il faudrait lui poser la question.

  2. Nous avons vraiment un grand chef qui assume: rien n’est jamais de sa faute. Avec un chef comme ça, pas sur qu’il y ait beaucoup de volontaires pour aller au front.

  3. et je suis sûr que ces 2-là ont la conviction (comme les arabes qui traquent les mécréants) de faire le bien et d’être des « chevaliers héros incompris ». Il faudra peut-être les mettre au boulot dans la vraie vie.

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