Crise de l’hôpital : la prise en charge des AVC nettement dégradée, notamment en Île-de-France

hôpital

Ces derniers jours, la presse a abondamment parlé des fermetures de lits qui touchent les services de neurologie et plus généralement l’ensemble des hôpitaux publics, malgré la crise du Covid et les sombres prédictions des autorités concernant l'évolution de l'épidémie. Un article du Monde du 24 décembre présente un tableau particulièrement inquiétant de la situation pour la prise en charge des AVC, notamment en Île-de-France.

Cette crise a mis en évidence les défauts du système, connus depuis longtemps mais qui n'apparaissaient pas avec autant d'acuité qu'aujourd'hui. On aurait pu espérer que les autorités, devant les événements récents, mettent en place un programme visant à redynamiser le système de santé publique. Il n’en a rien été. Et, l'an dernier, on notait encore 5 700 suppressions de lits. Si l'on ajoute à cela le manque dramatique de médecins (pourtant facile à prévoir depuis la création du numerus clausus il y a 45 ans, chef-d'œuvre d'experts aussi incompétents qu'irresponsables), auquel vient maintenant s'ajouter la pénurie d’infirmiers, on comprend qu'Olivier Véran se dise très préoccupé par « une situation compliquée ». Mais qu'a-t-il fait depuis qu'il est aux commandes du ministère de la Santé ? S’est-il inquiété vraiment de l'état de fragilité extrême dans lequel se trouvent la plupart des services hospitaliers, constamment sur la corde raide et obligés de fermer des lits par manque de personnel ou par suppression programmée ?

Cette diminution des capacités d'accueil pèse maintenant de manière dramatique sur la prise en charge de certains patients qui présentent des pathologies aiguës telles que des AVC (accidents vasculaires cérébraux) nécessitant une prise en charge rapide par des équipes spécialisées pour aller revasculariser, si possible, la partie du cerveau touchée par l'accident vasculaire. Cette rapidité dans la prise en charge conditionne bien souvent la lourdeur des séquelles. En région parisienne, les neurologues ont prévenu les autorités qu'ils ne pouvaient plus prendre en charge directement les patients qui leur étaient adressés, par manque de lits et faute de personnel soignant. La direction de l'AP-HP a déclaré « poursuivre des pistes de travail » pour améliorer cet état de fait. Il serait temps qu’elle s’en préoccupe et suive la bonne piste.

La situation en province n’est guère plus brillante, bien que très hétérogène selon les CHU. À Bordeaux, ce sont surtout les lits de post-AVC qui sont touchés par cette crise. À Strasbourg, l'article du Monde nous apprend que 30 % des 93 lits de neurologie sont fermés. Lorsque le malade ne peut pas être directement admis en neurologie, ce sont les services d’urgences qui le prennent en charge. Il est alors orienté vers des services non spécialisés ce qui peut être considéré comme une perte de chance. L'exemple de la neurologie est significatif des conséquences pour le malade qu'entraîne la fermeture de lits observée depuis plusieurs années et que la crise du Covid a révélée au public. Mais la neurologie n'est pas la seule spécialité touchée par ces mesures. Elles sont une des conséquences d'une politique de santé qui veut gérer de manière rentable les hôpitaux publics. Va-t-on bientôt demander à l'Éducation nationale ou à l'armée d'être rentable ?

Dr. Jacques Michel Lacroix
Dr. Jacques Michel Lacroix
Médecin - Médecin urgentiste et généraliste

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