[Culture] Le peintre Giovanni Bellini, une découverte au musée Jacquemart-André

bellini

Le musée Jacquemart-André consacre, jusqu'au 17 juillet, une exposition sur le peintre Giovanni Bellini. Elle présente les influences diverses d’un artiste emblématique des débuts de l’âge d’or de la peinture vénitienne. L'occasion de le découvrir. Maître de cette école vénitienne, Giovanni Bellini reste en effet méconnu aux yeux du grand public français. L’exposition organisée par le musée Jacquemart-André, à travers cinquante tableaux, présente un parcours chronologique qui explique les différentes influences du peintre.

Le maître des madones

Giovanni est le fils illégitime du peintre Jacopo Bellini. Ce dernier travaille selon le style gothique international, qu’il a appris auprès du peintre Gentile da Fabriano. Jacopo donne à son fils légitime le prénom de son maître, et le jeune Giovanni apprend à peindre dans l’atelier de son père, aux côtés de son frère Gentile, devenant maître en copie des œuvres gothiques.

Puis il s’émancipe de la tutelle paternelle grâce au hasard du mariage de sa sœur avec le peintre de Padoue, Andrea Mantegna. Ce dernier lui donne l’envie de redécouvrir la sculpture antique et Giovanni se met à transposer des sculptures de madones en peintures en deux dimensions. Son atelier se spécialise dans la production de madones pour des commanditaires privés, qui sont de plus en plus nombreux à accroître sa renommée. À noter : la belle Vierge à l’Enfant, une huile sur bois aujourd’hui exposée à la Gemäldegalerie de Berlin, qui a prêté plusieurs œuvres. Vêtue d’un manteau bleu roi qui contraste avec la draperie rouge du fond du tableau, le regard mélancolique, peut-être éclairé par sa connaissance de la destinée de son fils, la Vierge Marie tient un attendrissant Enfant Jésus dans les bras.

Les influences byzantine et flamande

Après avoir été une colonie de Byzance, Venise devient un partenaire commercial de l’Empire romain d’Orient… jusqu’à la chute de Constantinople, en 1453, qui provoque l’arrivée sur le sol vénitien de milliers de réfugiés. Ils apportent les biens qu’ils ont pu conserver, dont des icônes et des reliques. Le style des icônes byzantines intéresse Bellini. Il en tire l’inspiration pour créer des tableaux qui s’en rapprochent.

Plus au nord, c’est le travail de l’Allemand Hans Memling et du Flamand Jan van Eyck qui trouve grâce aux yeux de Bellini, notamment sur le plan technique : en faisant sa propre « cuisine picturale » (car il ne connaît pas leur recette), Bellini s’approprie la technique de la peinture à l’huile, qui lui paraît plus propice à créer des tableaux réalistes. L’artiste a ainsi réalisé cinq allégories à l’huile sur des panneaux de bois, dont une, La Prudence, accompagnée de trois putti (ces enfants nus dans la peinture), est exposée au musée Jacquemart-André.

L’alter ego : Antonello de Messine

En 1475, à l’âge de quarante ans, Bellini fait une rencontre décisive. Antonello de Messine, peintre sicilien de cinq ans son aîné, s’installe à Venise après avoir beaucoup voyagé dans toute l’Italie et dans le nord de l’Europe. Il apporte un perfectionnement de la technique de la peinture à l’huile qui ravit Bellini. Ce dernier produit dès lors des peintures aux couleurs plus travaillées et plus affirmées. Les deux hommes s’influencent l’un l’autre, mais leur fréquentation est de courte durée puisque Antonello quitte Venise un an plus tard et meurt en 1479.

Des tableaux aux couleurs maîtrisées

Il ne faut pas manquer Le Christ mort soutenu par deux anges, au visage marqué par la douleur à la descente de la croix, encadré par deux anges enfants, l’un qui regarde le Christ et l’autre le ciel. À la fin de l’exposition, une représentation de Dieu le Père, habituellement exposée à Pesaro en Italie, interpelle le visiteur par sa sérénité. Ce tableau, qui devait constituer la partie supérieure d’un retable démantelé, présente l’Éternel sous les traits d’un vieillard barbu, les bras tendus, sur fond de nuages traversés par la lumière du crépuscule. Il contraste avec un autre tableau de la dernière salle, peint à la fin de la vie de Bellini, Dérision de Noé. Propriété du musée de Besançon, il représente une scène de l’Ancien Testament dans laquelle Noé, enivré, est découvert par ses trois fils endormi et dénudé. On admirera le travail sur les expressions des personnages et sur les lueurs automnales.

Ce tableau original conclut une exposition courte mais bien menée sur la carrière d’un peintre qui mourut à Venise en 1516 à l’âge de 86 ans.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/05/2023 à 11:08.
Eléonore de Vulpillières
Eléonore de Vulpillières
Journaliste indépendante

Vos commentaires

3 commentaires

  1. Merci pour l’information, je tâcherai de me rendre une nouvelle fois à cet excellent et très beau musée.

  2. Et n’oublions pas l’excellent cocktail du Harry’s Bar de Venise : le Bellini : prosecco et nectar de pêches blanches…

Commentaires fermés.

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