Darmanin parle d’or : « Un représentant de l’État doit être inattaquable et respectable »

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« Un représentant de l’État doit être inattaquable et respectable. » Richelieu, Colbert, Michel Debré ? Non, Gérald Darmanin. Le ministre de l’Intérieur parle d’or. Et il ajoute même : « Lorsque ce n’est pas le cas, je prends mes responsabilités en tant que chef de l’administration. » Allusion au limogeage de Marie Lajus, préfète d’Indre-et-Loire, le 7 décembre dernier. Une affaire qui aura fait couler beaucoup d’encre, après la publication d’une tribune dans Le Monde, le 26 décembre, intitulée « Nous affirmons notre soutien à la préfète Marie Lajus et, à travers elle, à celles et ceux qui œuvrent au respect de la loi » et signée par une cinquantaine d’« acteurs de la société civile, fonctionnaires et élus des territoires ».

Selon Le Monde, ce haut fonctionnaire « n’aurait voulu que faire primer le droit de l’urbanisme dans une affaire immobilière en Indre-et-Loire, gênant des élus locaux ». La préfète se serait opposée à un projet de création d’un incubateur de start-up dans le parc du château Louise de La Vallière, à Reugny. Sans connaître le fond du dossier, avouons que le raccourci historique entre ce lieu si charmant et si cher à la douce maîtresse de Louis XIV et la start-up nation est plutôt saisissant. Notons que cette démarche d’une tribune pour défendre un préfet n’est pas courante. C’est peut-être même une première. C’est en tout cas le signe que quelque chose ne va pas très bien dans ce pays pourtant habitué depuis des siècles à ce que l’État relève, sans délai et sans avoir à se justifier, son représentant, qu’il soit intendant du roi, préfet de l’Empire ou de la République.

Notons aussi que parmi les signataires, on compte un grand nombre d’« acteurs de la vie locale » qui n’ont rien à voir avec l’Indre-et-Loire. En vrac et au hasard : des élus de gauche d’Ariège et de Charente, départements dans lesquels Lajus fut préfète, le sénateur socialiste du Nord Patrick Kanner, ancien ministre de Hollande, ou encore la directrice du théâtre national d’Angoulême, personnalités qui, on l’imagine, doivent être au fait du dossier comme vous et moi. Il est vrai que cette ancienne commissaire de police, nommée en 2012 préfet délégué à l’égalité des chances à Marseille, avait codirigé, en 2011, avec le député PS Jean-Jacques Urvoas, un rapport du think tank Terra Nova intitulé « Changer de politique de sécurité ». On comprend peut-être mieux alors.

Donc Lajus serait une victime. Il paraîtrait, cependant, que les choses ne seraient pas si simples que cela, que ce serviteur de l'État, au professionnalisme certes irréprochable, avait réussi à se mettre à dos un grand nombre d’élus, notamment ruraux, sur plusieurs dossiers. Le média local 37°, l’information de la Touraine à bonne température, cite en particulier la « question des gens du voyage où l’approche de Marie Lajus était jugée pas assez ferme par une partie des maires, celle des éoliennes qu’une grande partie des maires d’Indre-et-Loire refuse toujours de voir dans les paysages du département ». Il est vrai qu’on demande à un préfet d’accomplir la quadrature du cercle, autrement dit d’« être souple et ferme à la fois », pour reprendre la publicité bien connue des Inconnus ! On comprend peut-être mieux, alors, les propos un peu sibyllins de Darmanin, prononcés à Mayotte, sur la nécessité pour les représentants de l’État d’être « inattaquables ». En revanche, on peut s’étonner que le ministre de l’Intérieur ait employé le qualificatif « respectable ». Faut-il, en creux, comprendre que cette préfète ne le serait pas ? Ce serait grave. Il est vrai que ce ne serait pas la première fois que Darmanin userait de façon approximative de l’arsenal linguistique mis à sa disposition par ses excellentes études.

En tout cas, une remarque qui, à bien y réfléchir, ne manque pas de sel, ni de poivre d'ailleurs, quand on sait que son Janus de la place Vendôme, Éric Dupond-Moretti, a toujours la garde des Sceaux de l’État alors qu’il est mis en examen pour prise illégale d’intérêts. Encore une première dans notre belle République ! Il paraît que la femme de César ne doit pas être soupçonnée…

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

40 commentaires

  1. un bi national ne devrait jamais être à ce poste !! Comment peut il visiter les pays du Maghreb et favoriser La France et débattre des problèmes de l’immigration ?? La France est un des rares pays à accepter les binationaux dans le domaine politique, à revoir ???Quant à DM inexistant, le grand défenseur de Mohamed Mera, est il aussi à la bonne place ?

  2. le président réélu a reconduit son gouvernement godillot en mai 2022, et force est de reconnaitre qu’on ne fait pas d’un cul de jatte un champion sur les haies.
    reconduit avec la médiocrité qu’ils avaient 1 mois auparavant Borne, Le maire, Darmanin, Dupont moretti, Lecornu, Dussopt, Pannier runacher, Véran, Attal, Riester, Beaune, on ajoutera Kholer conseiller.
    Il ne peut y avoir de changement même si Borne dit à ses ministres « affrontez les vents contraires » avec des personnes qui ressemblent plus à des ventilateurs qu’à des gens d’action ça va être dur.

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