Les déclarations magiques de Gérard Collomb
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Les déclarations de Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, peuvent être magiques. Elles sont tout à la fois source d’inspiration et d’angoisse, selon que l’on est humoriste ou communicant au service du gouvernement. D’ailleurs, son compatriote Laurent Gerra ne s’y est pas trompé, puisqu’il a eu vite fait d’ajouter à sa collection d’imitations celle de l’ancien maire de Lyon.
Le 17 mai dernier, alors qu’il était en réunion publique à Rungis pour expliquer, sur le terrain, la politique du gouvernement aux Français, comme une trentaine d’autres ministres à travers la France, et interrogé par un citoyen sur la mesure très controversée de la limitation de vitesse à 80 km/h, Gérard Collomb ne trouva pas mieux de répondre, sourire aux lèvres : "Je prends un joker sur la question suivante et je passe directement aux radars embarqués." Et l’assistance, qui devait être globalement acquise à la macronie, de sourire avec le ministre… Pourquoi se gêner si, en plus, les gens aiment ça lorsqu’on les prend pour des imbéciles, pour ne pas dire plus !
C’est un truc, d’ailleurs, qu’il faudrait creuser, cette histoire de joker. Par exemple, en début de législature, le gouvernement pourrait disposer d’un certain nombre pour ne pas répondre aux questions des parlementaires.
- "Monsieur le Ministre, je voudrais vous interpeller sur le nombre de migrants illégaux raccompagnés l’an passé à la frontière..."
- La parole est à Monsieur le Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur.
- Joker !
- Monsieur le Ministre, le nombre d’agressions avec armes de guerre ne cesse d’augmenter dans nos banlieues. Quelle réponse comptez-vous apporter à ce phénomène particulièrement inquiétant ?
- La parole est à Monsieur le Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur."
- "Joker !"
Etc.
On gagnerait un temps fou. Et l’Assemblée prendrait une tournure de salle de jeux qui dépoussiérerait le concept. Le tout serait de bien gérer les jokers, le pire n’étant jamais certain.
Samedi, Gérard Collomb, faut l’avouer, s’est surpassé. Interviewé à l’issue de la manifestation qui devait être une marée humaine et interrogé sur les incidents qui éclatent souvent en marge de ces manifestions, le ministre a déclaré : "Ce qui est très étonnant, c’est que des Black Blocs puissent intervenir au milieu d’une foule qui, finalement, ne réagit pas." Pas faux. Et de poursuivre : "Si on veut garder le droit de manifester […], il faut que les participants puissent s’opposer aux casseurs et ne pas, par leur passivité, être d’un certain point de vue complices de ce qui se passe." Évidemment, la gauche et les syndicats se sont insurgés que l’on puisse accuser, "d’un certain point de vue", les manifestants d’être les complices des casseurs. Mais là n’est pas le sujet. On a envie de répondre au ministre : mais que fait, ou ne fait pas, la police ? La police qui exécute ce que le préfet de police lui commande, lui-même obéissant aux ordres du ministre.
Mais poussons plus loin le raisonnement. Si on veut garder le droit de se déplacer en sécurité dans la rue, il faut que les citoyens puissent s’opposer aux voyous, aux terroristes, et ne pas, par leur passivité, être d’un certain point de vue les complices de ce qui se passe. Si l’on veut garder le droit de propriété, il faut que l’on puisse s’opposer efficacement au voleur qui pénètre dans la maison, sans craindre d’aller en prison si cela se passe mal. Si l’on veut garder le droit de rester chez nous en France, il faut que les Français puissent s’opposer aux migrants qui entrent illégalement sur le territoire national et ne pas, par leur passivité, être d’un certain point de vue complices de ce qui se passe. Et l'État, y fait quoi ?
Oui, les déclarations de Gérard Collomb sont vraiment magiques. On aurait presque envie de lui dire non pas "joker" mais "banco" !
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