Déficit, violence : bilan Macron « extrêmement grave » pour Barnier et Retailleau

Capture d'écran Youtube Gouvernement
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Le macronisme est passé en sept ans de la conciliation des contraires à la schizophrénie assumée : de Bruno Le Maire à Attal et Macron lui-même, les éléments de langage déroulent une propagande à mille lieues de la réalité désastreuse des chiffres de leur bilan. Dans tous les domaines, et notamment ceux, essentiels, où leur échec est patent : les finances publiques et l'insécurité. On savait la situation dégradée, on la pressentait pire que ce que le précédent gouvernement voulait bien en dire, sachant qu'il avait déjà menti, travesti, caché ces chiffres têtus du déficit ou des OQTF non exécutées. Il semble que la réalité soit encore pire, à entendre les premières déclarations des ministres LR du nouveau gouvernement.

Sur le plan financier, c'est Michel Barnier lui-même qui, samedi, sans se départir de son tempérament flegmatique, mais avec gravité, a lâché le morceau. Lors du congrès national des sapeurs pompiers, il a notamment déclaré : « Jamais un Premier ministre, depuis 60 ans, n'a été contraint de présenter un budget en 15 jours et ce que je trouve, je le dis sans polémique, est extrêmement grave. Et je pèse mes mots. » Le premier ministre a enfoncé le clou dans un entretien au Journal de Saône-et-Loire : « J’ai trouvé une situation très dégradée, beaucoup plus dégradée que cela a été dit ». Ce que je trouve ? Un déficit public qui, loin des 5,1% du PIB comme prévu mensongèrement par le gouvernement Attal, dépasse allègrement les 6% ! Du jamais vu depuis 1945, hors crise (financière ou COVID) ! Une dette publique dont les taux s'envolent, dépassant ceux de pays comme ... la Grèce !

Alors les vingt-sept députés macronistes emmenés par Aurore Bergé ont beau jeu de publier un texte, dans La Tribune refusant catégoriquement toute hausse d'impôts ! Comme si le trou abyssal qu'ils ont laissé n'allait pas nécessiter une action vigoureuse aussi bien sur les dépenses que sur les recettes, comme nous y prépare Michel Barnier qui envisage de faire contribuer davantage ceux qui le peuvent, « de manière exceptionnelle et temporaire ».

Mais le toupet des macronistes ne se limite pas à leur domaine d'excellence, les finances. Sur la catastrophe sécuritaire, ils s'accrochent toujours au magistère de la parole, à commencer par le premier d'entre eux. Réagissant au meurtre de Philippine, dont l'auteur serait un clandestin marocain déjà condamné et sous PQTF, Emmanuel Macron n'a-t-il pas osé déclarer : « évidemment, la justice fera son travail », ajoutant qu'il fallait « jour mieux protéger les Français » et demandant au gouvernement Barnier « (à) le faire, le faire, le faire, et moins dire ».

Mais voilà qu'en ce domaine aussi, où le chef de l'Etat se fait donneur de leçons, le bilan est catastrophique, et pire qu'annoncé. Ce serait simplement risible s'il n'y avait ici, derrière ces chiffres terribles de l'insécurité, des horreurs, des vies brisées, des familles meurtries à jamais. Cette fois, c'est le nouveau ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau qui lève une partie du voile sur le bilan de Macron et d'Attal, dans une interview au JDD au titre choc : « Il faut renverser la table en mémoire de Philippine ». Il y confie en particulier son effroi à lire chaque matin le compte rendu des événements de la nuit, cette « chronique devenue trop banale de faits abominables », dont, ajoute-t-il, « les médias ne connaissent qu’une toute petite partie ». « Une toute petite partie » : de quoi clouer le bec à la rhétorique journalistique mainstream de la gauche qui ne parle que de « faits divers montés en épingle ». De quoi aussi justifier le travail remarquable de médias alternatifs comme Boulevard Voltaire qui vont chercher ces informations que l'on cache ou minimise.

On ne sait pas ce que donnera et ce que durera ce gouvernement Barnier (et Michel Barnier lui-même a fait preuve d'une louable lucidité à ce sujet devant les sapeurs-pompiers) mais s'il réussissait enfin à dire la vérité et à amorcer un redressement, il ne serait pas complètement vain. Son paradoxe, sa faiblesse, mais peut-être sa force aussi sont d'avoir à gérer un bilan macroniste catastrophique tout en reposant sur une majorité essentiellement macroniste. Pour le Savoyard comme pour le Vendéen, il y a là un chemin escarpé. Mais ce bilan en forme de boulet peut devenir leur arme favorite à renvoyer dans les quilles macronistes quand un Attal, un Le Maire, un Macron ou un Darmanin, trop heureux d'en être délestés, reprendront leur rôle de petits coqs. Et, dans l'immédiat, en prenant à témoin l'opinion (et les groupes RN et ciottiste à l'Assemblée), un moyen de pression sur un groupe macroniste bien trop oublieux, et de ce bilan, et de sa défaite.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

6 commentaires

  1. Le bilan est grave. Très grave. Ils pourraient peut-être faire quelques actes intéressants, s’ils n’y sont pas empêchés par des « en même temps » qui donnent le tournis. S’ils ne sont pas « recadrés » comme on dit maintenant…

  2. Une raison à ce trou béant du déficit budgétaire est l’idée géniale de M. Macron de supprimer la Taxe d’ habitation pour les résidences principales , de ce fait les communes ont perdu des rentrées d’argent , seuls les propriétaires désormais se voient contraints d’assurer les ressources de la communauté , une ABERRATION !!! certes les communes reçoivent de la part de l’Etat une dotation pour combler ce déficit mais ceci explique cela une part non négligeable du déficit budgétaire vient de là .

  3. Bien que je n’aime pas notre Président ni ses complices, je souhaite que mr Barnier puisse amorcer, voire relever, la France. Mon inquiétude est dans ses mots: « « de manière exceptionnelle et temporaire » ». Un certain nombre de ses prédécesseurs, tous horizons confondus, ont mis en place des mesures temporaires. On s’aperçoit que beaucoup sont devenues pérennes. Difficile, aujourd’hui d’accorder foi à un homme politique!

  4. Lorsque l’on met par terre un pays comme cela, on pourrait être qualifié de traître ou de forfaiture.
    Ce que je ne comprends pas, c’est l’extrême prudence du nouveau 1er Ministre qui ne nous informe pas de la situation autre que par des phrases évasives et laconiques. Quels sont la réalité des faits ? Quels sont les chiffres ? Pourquoi ne sont-ils pas maintenant publiés? Comment juger les coupables si l’on ne dresse pas les constats de leur impéritie?

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