« Depardieugate » : le bal des faux-culs

Depardieu

Ah, le monde du spectacle et la pétition… C’est comme le maquillage et le copinage : ces gens-là ne peuvent pas s’en passer. C’est pavlovien : comme le chien lève la patte pour marquer son passage, le cultureux se doit d’apposer son paraphe. N’importe où, n’importe comment, puisque les copains en sont. Alors, par peur de rater le train du conformisme, il signe plus vite que son ombre.

Et voilà, patatras ! que le vent tourne. Les signataires de la tribune du Figaro en soutien à Gérard Depardieu commencent à se débiner. Débandade en rase campagne : Pierre Richard, qui ne fait plus rire personne ; Jacques Weber, dont le nez emprunte plus à Pinocchio qu'à Cyrano ; Carole Bouquet, la tendre compagne d’hier… tous, à les en croire, ont signé à l’insu de leur plein gré. Ils ne savaient pas, ils avaient mal lu, mal vu. Ah, les ravages de l’âge… Heureusement, Mediapart a décillé leur regard en publiant sur son blog une « Adresse au vieux monde », c’est-à-dire « à celles et ceux qui piétinent la cause des femmes en défendant Gérard Depardieu ».

La manœuvre est politique, disent les auteurs.rices.euses (pour s'exprimer comme eux...) de cette « contre-tribune » où l’on dénonce non seulement les « comportements délictueux » de l’artiste mais aussi « d’autres faits choquants : son évasion fiscale (sic), sa glorification de tyrans ». Et la jeune garde de conclure : « On assiste en ce moment aux soubresauts du vieux monde réactionnaire qui se cabre pour exister encore, s’accrochant à ses privilèges et ses injustices, face au monde nouveau qui cherche à apparaître, pour une vie plus heureuse et plus équilibrée. »

Tous.tes ces jeunes redresseurs.es de vieux tordus sont bien ignorant.es… à moins qu’iels ne soient intellectuellement malhonnêtes ! Ignorent-ils, en effet, que ce « vieux monde réactionnaire » qu’ils dénoncent est en réalité la gauche dont ils se revendiquent, gauche aujourd’hui moraliste et pudibonde ? Savent-ils que c’est elle qui a créé le monde dont ils se plaignent ? Elle qui a voulu interdire d’interdire et prôné la totale libération des meurs face à une société jugée trop corsetée ?

Faut-il leur rappeler la belle époque du « non-art » avec ses happenings et ses performances sur fond de discours révolutionnaires ? Ce temps béni où l’on déclarait le beau « aliénant », où un Journiac parodiait la messe, invitant ses « spectateurs-fidèles » à communier avec du boudin confectionné à partir de son propre sang ? Christophe Deshoulières, dans Le Théâtre au XXe siècle (Bordas, 1993), en retrace l’histoire : « Le but est de ruiner les interdits auxquels l’ordre politique, social, moral ou la simple bienséance soumettent l’individu, de délivrer celui-ci des frustrations et des inhibitions – sexuelles en particulier – pour donner plein droit de cité au corps sur une scène où il était entre parenthèses. »

Une scène où tout était permis pour « combattre l’intolérance de l’ordre bourgeois ». C’est ce théâtre qui fut introduit par Jack Lang dans son festival de Nancy, lui qui revendiquait d’avoir découvert Grotowski et avait compris avant ses amis de gauche les avantages du système : l’avant-garde et la contestation côté cour, les subventions côté jardin.

Rien n’a changé, sinon que cette gauche est aujourd’hui shootée à la moraline. Poursuivant son entreprise de retournement des choses et des valeurs, elle accuse aujourd’hui la droite – et la droite extrême, surtout, comme si celle-ci avait jamais eu voix au chapitre culturel ! – d’être les instigatrices de la chienlit ambiante.

Et quand un Mediapart dénonce « les enjeux politiques de l’affaire Depardieu », accusant une fois encore l’extrême droite d’être à la manœuvre, on est tenté de rafraîchir la mémoire de son fondateur, le vieux trotskiste Edwy Plenel : où était-il, lui, le néo-pudibond, en 1970, année des débuts de Depardieu ?

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

49 commentaires

  1. À d’autres époques, ces artistes de rue n’étaient que des acrobates des saltimbanques à la recherche de leur public, parcourant villes et campagnes. Leur supposé talent ne les rend pas tous courageux, comme l’histoire nous l’a démontré, comme en 1939, où de nombreux artistes comme ceux d’aujourd’hui donneurs de leçons de scène ou de plateaux télévisés, se sont exilés. Le verbiage ne remplace pas le courage.

  2. Je vois surtout de petits mec jaloux des succès de Depardieu, quant aux « femmes meurtries », je pense que nombre d’entre elles avançaient les cuisses ouvertes ver Depardieu pour obtenir un petit rôle à ses côtés, les plaintes des années après c’est une tartufferie.

  3. Il était Krasny militant de l’ultra gauche , Troskyste à ses heures puis rédacteur en chef du Monde et accessoirement millionaire . Il a fait de Mediapart un outil au service de son idéologie pour taper sur ceux qui ne conviennent pas à ses idées gauchistes . Un gauchisme dont il ne s’est jamais départi . Il ne faut pas compter sur l’objectivité avec ce militant .

  4. Le DepardieuGate, juste de la fumée pour empêcher les Français de voir le véritable état de leur pays et d’en discuter. Au passage, ils peuvent même en profiter pour faire voter quelques lois en catimini dans cet hémicycle de corrompus.

  5. Dans le show bizz et dans le milieu « people », il n’y en a pas un pour rattraper l’autre. Je ne connais rien de cet affaire « Depardieu » mais le lynchage est le signe des « petits » et des minus et cette meute m’est insupportable.

  6. Les gauchistes post soixante-huitards on perdu le contrôle de leurs créatures. Le docteur Frankenstein les avaient pourtant mis en garde.

    • Tout à fait ! Ils récoltent ce qu’ils ont semé ! 68 : libération sexuelle, interdit d’interdire…..

  7. Excellente chronique qui dénonce l’insupportable hypocrisie de tous ces « artistes » qui n’ont souvent d’artistes que le nom.

  8. Je n’en veux pas aux démissionnaires car leur désolidarisation est la conséquence de pressions exercées par le monde du show-business. En tout cas, Pierre Richard et Jacques Weber sont des artistes qui signent davantage d’autographes que de pétitions de leurs confrères dont les styles tribunes qu’ils arrivent à remplir sont celles des journaux (de gauche)! Si ce petit milieu, du simple musicien de rue jusqu’à Omar Sy est autant gauchisé et woke, c’est à cause de la fonctionnarisation de l’art en France. Je déplore qu’aucun politique de droite ne profite du moment pour mettre sur la table le gaspillage d’argent public à travers la culture. La politique culturelle est un cuisant échec, les films, musiques, séries anglo-saxonnes marchent mieux en France que ceux en français, les mangas se vendent mieux que les BD, l’exportation de l’art français n’en parlons pas c’est une calamité (sauf Astérix le GAULOIS)… Faisons mettre en question toute la production culturelle française, chère et non rentable plutôt que de nous éterniser sur ce que j’appelle des histoires de coucheries de stars…

  9. Excellente Charlotte d’Ornellas sur les propos de Sandrine Rousseau se rapportant à cette affaire : Replay Cnews l’heure des pros 03/01/2024. Sandrine condamne aujourd’hui ce qui était le slogan de la gauche hier. Elle ne peut pas se souvenir, elle n’était pas née en 1968 et avait 2 ans quand les valseus.e.s sont sorties.

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