[Des lectures pour l’été] Moscou, de Theodor Plievier, 1953
Juin 1941, l’invincible armée allemande se déverse sur la Russie. C’est l’opération Barbarossa (du nom de Frédéric Ier de Hohenstauffen, dit Frédéric Barberousse, empereur allemand du Saint-Empire romain germanique au XIIe siècle).
L’attaque est triple : au nord, vers Leningrad, au sud vers le Caucase et surtout au centre vers Moscou. L’ordre du jour allemand est clair : « Celui qui, de sa position avancée, apercevra le premier les créneaux de Moscou cueillera les lauriers de la victoire. »
La guerre éclair est victorieuse au début et les Russes reculent ou meurent dans un désordre hallucinant. Mais beaucoup s’accrochent et les pertes allemandes sont lourdes également. L’auteur nous fait vivre les combats à travers quelques personnages phares : le général von Bömelburg, revenu presque aveugle de la campagne de France, la capitaine Scheuben et son escadrille de Stukas, Vilshoffen qui fonce à tombeau ouvert avec ses chars et doit établir des têtes de pont au milieu des Russes stupéfaits.
Le lecteur doit changer de camp régulièrement et Plievier nous entraîne chez les Russes avec des officiers qui fuient ou se battent, pour Staline ou pour la Russie éternelle. On croise même un aristocrate devenu vagabond qui se réjouit de cette débâcle. Là aussi, des personnages emblématiques prennent corps : officiers ou humbles soldats, héros ou assassins, une jeune femme également.
Les territoires polonais acclament les libérateurs allemands tandis que les soldats du NKVD (l’ancêtre du KGB) massacrent les prisonniers politiques ou les officiers russes se repliant. Mais l’ambiance change au fur et à mesure que l’on se rapproche de Moscou : les civils deviennent hostiles et les partisans commencent le harcèlement.
Et puis tout s’arrête. Hitler a donné des ordres absurdes bloquant l’offensive. Un temps précieux est perdu et le « général Hiver » arrive : l’armée allemande gèle sur place, c’est déjà le début de la fin et personne n’entrera dans Moscou.
Ce magnifique roman de guerre tient le lecteur en haleine, sans répit. Il y des moments d’anthologie, comme la percée des chars qui n’ont de salut que dans la vitesse, ou la toute fin du livre, d’une grande beauté.
Théodor Pliever n’a pas eu une vie banale : communiste allemand, il fuit le pays en 1933 et c’est à Moscou qu’il s’installe où le trouve l’offensive allemande ! Il écrit Stalingrad en 1945, qu’il complétera par Moscou puis Berlin. Entre-temps, il a rompu avec le communisme.
Premier volet chronologique d’une trilogie restée célèbre, Moscou est un grand récit de guerre que les Éditions Libretto viennent opportunément de rééditer.
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Un vert manteau de mosquées
2 commentaires
Seul ennui, cette affaire réhabilite un peu Staline, tant l’histoire de cette époque est complexe, mais on a tout intérêt à faire l’entière vérité sur l’ensemble de la seconde guerre mondiale, tellement déformée par la saga Américaine officielle. La vérité, c’est effectivement le rôle irremplaçable de l’épisode de Stalingrad dans la défaite nazie.
En effet. Excellent livre qui m’a permis de rentrer de plein pied dans l’Histoire, et d’en devenir un passioné. Merci pour ce rappel.